J’aime de toujours les arbres, les grands arbres et tous leurs discours de formes, de couleurs, de mouvements si nobles, élevés. J’aime aussi leurs infinies cargaisons d’oiseaux à l’aube. Et plutôt que de vous décrire le pourquoi, le comment de la chose, je vous livre ce poème de Charles Baudelaire qui dit si bien les choses…(mais de grâce allez plus loin, après lecture de ce texte admirable)
La nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles;
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers.
Comme de longs échos qui de loin se confondent
Dans une ténébreuse et profonde unité,
Vaste comme la nuit et comme la clarté,
Les parfums, les couleurs et les sons se répondent.
Il est des parfums frais comme des chairs d’enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
– Et d’autres, corrompus, riches et triomphants,
Ayant l’expansion des choses infinies,
Comme l’ambre, le musc, le benjoin et l’encens,
Qui chantent les transports de l’esprit et des sens.
J’ai cherché grâce à mon ordinateur une image d’arbre à vous proposer. Celle que j’ai choisie, je l’ai choisie parce qu’elle est un peu folle et que donc ELLE PARLE. Ailleurs, j’en ai trouvé d’admirables, de toutes couleurs et formes, mais une mort étrange régnait, une espèce d’absence mortelle, glaciale. Non décidément les arbres en catalogues ne sont pas pour moi. Je veux dire que j’ai trouvé d’extraordinaires images d’arbres, mais je n’ai pas trouvé d’arbres. Ces arbres-là étaient aussi morts que le papier glacé qui les porte peut-être en photos. Il manquait l’essentiel, LE VENT DANS LES BRANCHES, LE SOUFFLE ETRANGE A L’OREILLE, AU COEUR ET A L’ESPRIT QUAND IL PASSE…, LE VENT.
C’est le vent dans les branches qui fait l’arbre !
Pour l’arbre et ce que j’en perçois, le vent est la vie réelle de l’arbre. Il manque encore dans ces photos, les senteurs, l’humus chaud et tendre du sous-bois, le soleil qui filtre et dont la douceur peut nous faire s’évanouir de bonheur, le craquement des branches et nos milles regrets de coeur à l’arbre quand nous les piétinons, maladroits, ces branches et brindilles. Il manque les soupirs des troncs qui se meuvent, ardents intercesseurs entre terre et ciel. Il manque, il manque,…
Ainsi en est-il des humains. Parfois on nous livre une photo bien pâle, une rumeur, une idole ou un bruit de scandale et nous fixons comme pour l’éternité l’image comme on fixe la photo de l’arbre (la conscience est une plaque photographique très sensible, très). Il nous manque l’essentiel, la façon dont le vent de l’Esprit qui préside au souffle de cette existence parle, l’humus doux de son âme souvent refermée, afin qu’aucun ne vienne plus piétiner, manque. Il nous manque de connaître « le tronc », la verticalité morale et spirituelle dont seul D.ieu connaît la naissance, la croissance et la destinée.
Très sincèrement j’ai haï les photos mortes d’arbres aussi chatoyantes soient-elles et je hais les clichés trop rapides sur mon frère, ma soeur, le voisin, l’inconnu. Un jour, en pleine lumière D.ieu fera la lumière en 3D et même beaucoup plus sur nos existences bafouées. Prenez courage et vous, photographes de la mort, prenez garde lorsque vous distribuez vos pâles clichés sur autrui. Il existe un lieu où votre vie pourrait devenir un cliché éternel en noir, sans blanc.
Bon vent à tous!
Haïm Goël, un arbre parmi d’autres,… dans le vent !