Les Grecs ont donc dit NON aux mesures d’austérité demandées par les créanciers de la Grèce; qui sont avant tout le FMI et les autres 18 états de la zone EUR. Il fallait s’y attendre. La démagogie irresponsable de Tsipras a fonctionné. Le peuple grec est épuisé et c’est compréhensible.
Quelles conclusions (temporaires) peut-on en tirer?
1- L’Europe est en panne, par la faute de la Commission européenne et des gouvernants des partis traditionnels qui n’ont pas été fichus de négocier en 1999-2000 une monnaie unique fiable, avec mécanisme de sortie. Rien n’avait été prévu pour la sortie d’un pays de la zone EUR. Pire: on a fait entrer la Grèce malgré les mensonges de ses gouvernements successifs de gauche comme de droite. Il faut demander à Didier Reynders et Louis Michel pourquoi ils ont dit oui à la Grèce, malgré les avertissements.
2- Si on rouvre les banques, ce sera la déroute! En Grèce, les 39% des votants grecs responsables, qui ont voté Oui à ce référendum incompréhensible, sont pour la plus grande part, les citoyens de la classe moyenne qui ont un peu d’argent de côté à la banque et sont très angoissés face à l’aventure que promet Tsipras et l’extrême gauche. Dans le mécanisme bancaire européen, il est prévu, depuis la crise chypriote, que les personnes physiques peuvent retirer jusqu’à 100.000 € en cas de crise monétaire. C’est déjà une belle somme, mais si les banques privées grecques rouvrent demain mardi comme le veut Tsipras, les grecs se rueront sur leur banque pour retirer tout ce qu’ils possèdent, à concurrence de 100.000 €. Les riches, ceux qui ont plus de 100.000 € en banque sont partis depuis longtemps et sont en Suisse ou aux îles Caïmans. Les banques privées et la banque centrale grecques n’ont plus les liquidités pour rembourser les épargnants! Si on rouvre les banques, c’est la banqueroute de la Grèce, sans une aide européenne de plus… C’est la classe moyenne que Tsipras va décapiter. La confiance des grecs responsables a totalement disparu.
3- Le peuple allemand, mais aussi les Finnois, les Tchèques, les Slovaques, les Néerlandais sont excédés et ne veulent plus que leurs gouvernements acceptent de donner de nouvelles rallonges aux grecs, considérés comme non fiables. Angela Merkel et son excellent ministre des Finances, Wolfgang Schäuble, font la tête. Ils espéraient un oui et savent que s’ils se tournent vers le Bundestag, la réponse des députés sera très probablement: coupons le robinet, que les grecs se débrouillent et quittent l’EUR!
4- Le ministre grec de l’Economie et des Finances, le flamboyant Varoufakis, a démissionné hier soir « pour permettre au Premier ministre Tsipras de mieux défendre la Grèce ». La vérité est qu’il y a des dissensions entre les 2 hommes. Tsipras aurait lancé le référendum sans consulter son ministre . Varoufakis se rend compte que c’est la fin du processus et quitte la scène la tête haute. Il laisse Tsipras se débrouiller, ce qui permet au négociateur grec, quel qu’il soit aujourd’hui, de repartir de zéro. Du moins les Grecs l’espèrent-ils.
5- On se rapproche du GREXIT. Tsipras a mené le pays à l’impasse. Si la Banque centrale européenne arrête les avances urgentes qu’elle pratique depuis des semaines (elle aurait déjà dû le faire selon ses règles officielles), les grecs n’auront plus d’EUR à disposition comme moyen de paiement. L’introduction rapide d’une nouvelle monnaie devient la moins mauvaise des solutions pour le peuple grec: une sortie de l’EUR, l’émission d’ »assignats » ou autres reconnaissances de dette par le gouvernement grec, le lancement d’une nouvelle drachme et l’abandon complet de la dette grecque. Il faudra des années pour que le moindre créancier prête encore de l’argent à la Grèce à un taux normal, mais le coup de fouet concurrentiel donné à l’économie et au tourisme compenserait en grande partie la perte subie. Le sommet de la zone EUR demain sera pour le moins « intéressant »…
6- Comment en sortir en gardant la Grèce dans l’EUR? Certainement pas comme Tsipras l’entend, c’est-à-dire, en réduisant (encore) la dette grecque de 30% (autrement dit, c’est un transfert de dette du citoyen grec vers le citoyen belge) et en obtenant 20 ans de non-remboursement pour « permettre à la Grèce de redresser son économie ». La seule solution – si on veut le maintien des remboursements de la dette grecque aux prêteurs que nous sommes tous – c’est de revenir aux accords conclus avec Antonis Samaras, l’ancien Premier ministre conservateur, qui était tout doucement en train de réussir son pari et de redresser la Grèce, avant que le démagogique Tsipras ne soit élu aux dernières élections. En attendant, l’Europe va devoir accorder des crédits d’urgence pour payer les services publics, les pensions et une aide sociale de survie. Bravo Tsipras!
En tant que citoyen belge, l’auteur de ces lignes ne veut pas augmenter la dette belge à concurrence de 1.000 € par citoyen, du nourrisson au vieillard, pour permettre aux grecs de ne pas rembourser leur dette. Négocions encore. Il n’y a pas de « solution de gauche » à la question grecque, n’en déplaise à Raoul Hedebouw et au PTB. La cigale et la fourmi, vous connaissez?
L.R.