« La menace terroriste la plus grave à laquelle l’Europe a dû faire face depuis 9/11 » (Europol)
Le Marocain Ayoub El Khazzani, maîtrisé lourdement armé par des passagers du train Amsterdam-Paris, est « médusé » par les accusations de terrorisme qui pèsent sur lui et nie avoir tiré à bord du train, expliquant qu’il voulait rançonner les voyageurs, selon l’avocate qui l’a assisté au début de sa garde à vue.
« Il est médusé du caractère terroriste qui est attribué à son action », a expliqué dans une interview diffusée dimanche sur la chaîne BFMTV l’avocate commise d’office qui l’a conseillé juste après son arrestation en gare d’Arras vendredi, Me Sophie David.
Quand l’avocate lui a expliqué qu’il y avait des blessés, son client « tombe des nues. « Pour lui il n’y a pas eu de coup de feu », « la kalachnikov n’a pas fonctionné » et il a été maîtrisé « immédiatement », a indiqué Me Sophie David.
Aidé d’un traducteur, car il ne parle « pas un mot de français », selon l’avocate, Ayoub El-Khazzani a assuré avoir trouvé les armes dans une « valise cachée », retrouvée dans un jardin public près de la gare de Bruxelles-midi, « là où il dort fréquemment avec d’autres SDF ».
Le suspect, dont le visage était tuméfié après avoir été neutralisé par trois jeunes passagers américains et un père de famille britannique, a affirmé avoir voulu « faire un braquage » et explique les événements « uniquement par le besoin d’argent ».
Spencer Stone, un militaire de l’armée de l’air américaine âgé de 23 ans, qui a été poignardé dans le cou alors qu’il tentait de désarmer vendredi le terroriste avec une kalachnikov lors de l’attaque du Thalys, a quitté l’hôpital de Lille, dans le nord de la France samedi soir.
Les jeunes Américains qui ont maîtrisé l’homme voulant apparemment commettre un carnage dans un train Amsterdam-Paris ont raconté cet épisode « dingue » dans des propos filmés par divers médias.
« Tout est arrivé très vite », a raconté Anthony Sadler, étudiant, qui voyageait avec ses amis Alex Skarlatos, 22 ans, et Spencer Stone, tous deux militaires américains, qu’il avait retrouvé pour des vacances en Europe.
« On a entendu un coup de feu et du verre brisé, » a raconté M. Skarlatos, membre de la garde nationale de l’Etat de l’Oregon (ouest), rentré il y a peu d’une mission en Afghanistan. « J’ai vu un homme entrer dans le wagon avec une kalachnikov. » (BFM)
Chris Norman, un chef d’entreprise britannique âgé de 62 ans, qui voyageait dans le même wagon, a expliqué qu’ils avaient « vu un gars avec une AK47 (kalachnikov) ». « Je suis intervenu pour prendre le bras droit du forcené », a raconté samedi Chris Norman, qui s’est lui aussi interposé.
« Alex a dit à Spencer, va le choper. Le gars a sorti un cutter et il a tailladé Spencer à l’arrière du cou, il lui a pratiquement coupé le pouce aussi, Spencer l’a tenu et on l’a finalement maîtrisé, il était inconscient, on a fini par l’attacher », a affirmé Chris Norman.
« Spencer a bien couru dix mètres jusqu’au type. On s’est mis à le taper à la tête jusqu’à ce qu’il s’écroule », a expliqué de son côté M. Skarlatos.
Le président des Etats-Unis Barack Obama a téléphoné samedi aux trois jeunes américains qui ont réussi à empêcher un carnage dans le train Thalys Amsterdam-Paris vendredi soir et a salué leur extraordinaire bravoure, a indiqué la Maison Blanche.
M. Obama a appelé en France Spencer Stone, Aleksander Skarlatos et Anthony Sandler pour exprimer sa gratitude pour leurs actes héroïques et la fierté de tous les Américains devant leur extraordinaire bravoure, selon un communiqué d’un porte-parole de la présidence américaine.
Il les a encore félicités pour leur courage et leur action rapide dans le train Thalys en route vers Paris pour maîtriser le suspect lourdement armé, notamment d’un fusil d’assaut Kalachnikov et d’un pistolet automatique Luger, et qui avait ouvert le feu.
Comme il l’avait déjà fait savoir dès vendredi soir dans un communiqué, le président américain a estimé que l’intervention de ses trois jeunes concitoyens avait permis de déjouer une « tragédie encore plus grande ».
Le président français François Hollande a remercié chaleureusement samedi son homologue américain Barack Obama pour la conduite exemplaire de citoyens américains qui ont permis d’empêcher un carnage à bord du train Thalys Amsterdam-Paris, a annoncé l’Elysée dans un communiqué.
Lors d’un entretien téléphonique en fin d’après-midi, les deux présidents ont renouvelé leur détermination à combattre ensemble la violence et le terrorisme sur tous les fronts, ajoute la présidence française.
M. Hollande recevra lundi matin à l’Elysée les citoyens américains, français et britannique ayant permis d’éviter un carnage à bord de ce train, a par ailleurs indiqué son entourage à l’AFP.
M. Hollande a également invité les chefs du gouvernement belge, Charles Michel, et néerlandais, Mark Rutte, ainsi que l’ambassadrice des Etats-Unis en France, Jane Hartley, à cette réception à laquelle assisteront le Premier ministre français Manuel Valls et plusieurs membres de son gouvernement.
La sécurité renforcée dans les gares
L’attaque déjouée par les trois américains à bord du Thalys pose la question de la sécurité dans les gares et trains.
La sécurité a été renforcée sur les principaux services ferroviaires européens alors que les autorités craignent « un retour de flamme » et que les attaques par des jihadistes de retour de la Syrie s’intensifient après que l’homme armé, Ayoub El Khazzani, le ressortissant marocain signalé par les services de renseignement espagnols comme appartenant à la mouvance islamiste radicale, a ouvert le feu dans le train à grande vitesse et a été interpelé par les services de sécurités.
Les experts en sécurité ont mis en garde à plusieurs reprises contre le risque de « blowback » (terme utilisé pour décrire le rebond de la violence d’une région à l’autre) et ont indiqué que le menace terroriste posée par les djihadistes européens qui ont combattu en Syrie ou l’Irak et qui retournent en Europe est « très sérieuse ».
Un porte-parole d’Europol, l’agence de police de l’UE, a déclaré samedi que les Européens qui reviennent d’Irak et la Syrie représentent la « menace terroriste la plus grave à laquelle l’Europe a dû faire face depuis 9/11″ », rapporte dimanche The Guadian.
Selon les dernières évaluations d’Europol, pas moins de 5.000 Européens ont déjà rejoint les combats en Syrie, ce qui pose un risque potentiellement important pour leur pays d’origine. Parmi ces Européens, on compte environ 600 Britanniques, 1.200 ressortissants français et au moins 350 Belges.
Le gouvernement belge a décidé dès samedi, quelques heures après cette attaque, de renforcer les mesures de sécurité dans les trains et les gares du pays: contrôle des bagages renforcé, intensification des patrouilles dans les Thalys, mais aussi dans les gares.
De mesures de sécurité renforcée ont également été décidées par plusieurs gouvernements en Europe. Le Premier Ministre français, Manuel Valls, a ainsi annoncé que la SNCF allait « mettre en place un numéro national de signalement des situations anormales ».
L’auteur présumé de l’attaque du Thalys, un jeune ressortissant marocain établi depuis peu en Belgique et qui serait passé par la Syrie, avait été repéré par les radars de plusieurs services antiterroristes européens, sans être pour autant surveillé.
Selon une source de l’antiterrorisme espagnol à l’AFP, le suspect avait vécu « sept ans en Espagne, d’abord à Madrid et ensuite à Algesiras, entre 2007 et mars 2014 avant de déménager en France ».
« Une fois en France, il s’est déplacé en Syrie, avant de rentrer en France », a-t-elle précisé, sans que l’on sache la durée de ce séjour.
Le journal français La Voix du Nord a affirmé qu’ Ayoub El Khazzani pourrait avoir eu des liens avec un groupe impliqué dans une fusillade qui a eu lieu en Belgique en Janvier.
Alors que la France enterrait ses victimes de l’attaque de Charlie Hebdo, la police belge menait une importante opération contre un groupe composé de personnes revenant de Syrie; deux jihadistes avaient été tués à Verviers, dans l’est du pays.
(avec l’AFP)