Le président de l’Autorité palestinienne peut marquer à son crédit une grande victoire après une série de défaites.
Mahmoud Abbas a récemment réussi à porter à l’ordre du jour international le problème palestinien après une série de tentatives infructueuses. Il a réussi à utiliser la machination d’al-Aqsa, à savoir le mensonge selon lequel Israël profanerait le Mont du Temple. Abbas n’est pas intéressé à une guerre de religion entre Juifs et Arabes, mais il doit payer un salaire à ses fonctionnaires et les pays donateurs sont plutôt avares.
Le problème palestinien n’intéresse pas le monde arabe sans parler de l’Europe tout occupée avec le flux de migrants en provenance de Syrie.
Et comment Mahmoud Abbas a-t-il réussi à attirer l’attention de la communauté internationale ?
Il a tout d’abord essayé d’envoyer des messages évoquant sa démission puis ses proches ont ébruité sa soi-disant intention d’abroger les Accords d’Oslo. Ni les Israéliens ni personne dans le monde ne s’en est ému. Finalement il s’est rapidement résolu à faire usage de la formule gagnante, celle qui a réussi il y a un siècle et qui fonctionne encore et toujours aujourd’hui.
Les Juifs veulent s’emparer de la mosquée al-Aqsa, le lieu saint des Musulmans, les Juifs veulent détruire la mosquée al-Aqsa. Celui qui avait réussi avec cette grossière propagande est le chef spirituel de l’Autorité palestinienne et du mouvement national de libération palestinien, le mufti de Jérusalem, Hadj Amin al Husseini, celui-là même qui a collaboré avec Adolf Hitler.
En fait lorsque Herbert Samuel nomme al-Husseini au poste de mufti en 1921, ce dernier se fixe pour but d’expulser des Juifs de Palestine et de les empêcher d’y mettre les pieds, mais il n’avait pas le pouvoir de le faire et de faire face à des milliers de Juifs ni de s’opposer aux conséquences de la Déclaration Balfour et à l’aide britannique aux Juifs.
Il était en position de faiblesse et son camp était divisé et isolé. Les pays arabes voisins étaient faibles et occupés à résoudre leurs problèmes avec les puissances colonialistes.
Que ce soit au niveau politique ou économique, le mufti n’avait absolument pas la possibilité d’organiser une grève ou d’acquérir des armes, c’est la raison pour laquelle le mufti est arrivé à la conclusion qu’il lui fallait mobiliser le monde arabe-musulman, les réunir sur la question palestinienne dans le but d’obtenir le soutien des millions de Musulmans dans le monde. Comment s’y est pris le mufti ?
Tout comme Mahmoud Abbas, le mufti a voulu convaincre le monde arabe que les juifs avaient l’intention de détruire la mosquée al-Aqsa et d’y ériger à la place le troisième Temple à la place de la coupole dorée, puis d’envahir les autres pays arabes.
« La Palestine ne suffit pas aux Juifs car leur but est de contrôler le reste des Etats arabes, comme le Liban, la Syrie et l’Irak et même les régions d’Arabie saoudite où vivaient des tribus juives au 7ème siècle. », voilà ce que répétait à l’envi le mufti de Jérusalem.
Les actions du mufti ont pris des formes variées, mais le moyen le plus efficace fut l’envoi d’émissaires auprès des dirigeants arabes. Ces émissaires apportaient des « preuves » quant aux intentions des Juifs de « profaner » les lieux saints de l’islam. Ces envoyés avaient des reçus témoignant des dons d’institutions religieuses juives.
Sur ces reçus figuraient des dessins du Mur occidental et des parties du Mont du Temple avec des illustrations de symboles religieux juifs comme ceux qui décorent les livres sacrés et les synagogues. Ce matériel a suscité l’inquiétude parmi les dirigeants musulmans et dans le monde arabe. S’apercevant que les Juifs considéraient le Mur occidental comme un site sacré et une relique du Temple, ils ont été saisis par la peur et se sont précipités au secours du mufti.
Tout comme le mufti, Mahmoud Abbas considère la mosquée al-Aqsa comme un outil dans son combat et un moyen de mobiliser des soutiens dans le monde arabe et dans la communauté internationale en faveur de la cause palestinienne qui en ont plus qu’assez de ce problème.
Cependant le complot de la formule « la mosquée al-Aqsa est en danger », de l’appel à venir la défendre même au prix de l’âme et du sang, réussit une fois de plus, comme l’année dernière.
La question qui se pose est de savoir combien de fois encore le monde tombera dans le panneau et combien de fois encore Abbas fera usage de ce complot.
Edy Cohen est spécialiste du Moyen-Orient et chercheur au département d’Etudes du Moyen-Orient à l’université de Bar Ilan.