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Pleins pouvoirs, extrême droite boostée, frontières… pourquoi on peut avoir peur de la victoire de Norbert Hofer en Autriche / Le HuffPost avec AFP | Par Maxime Bourdier E-mail

By 22 mai 2016mai 13th, 2020Lève-toi !

Arrivé largement en tête du premier tour avec 35% des voix (contre 21,3% à son adversaire), Norbert Hofer se présente comme le favori du deuxième tour en l’absence de front républicain, ni les sociaux-démocrates du SPÖ ni les conservateurs de l’ÖVP (éliminés au 1er tour) n’ayant clairement appelé à voter pour Alexander Van der Bellen, son rival écologiste. Ingénieur aéronautique de 45 ans, actuel 3e président du Conseil national (équivalent de notre Assemblée nationale) Norbert Hofer a contribué à polir l’image de son parti, d’où son succès électoral.

Au-delà du symbole – et même si le président de la République d’Autriche n’a pas autant de pouvoirs que son homologue français, par exemple – une victoire du candidat du FPÖ pourrait avoir des répercussions considérables en Autriche mais aussi en Europe, notamment dans le contexte de la crise des migrants et alors que l’euroscepticisme ne cesse de grimper sur le Vieux Continent. Jusqu’à envisager un scénario catastrophe?

Dissolution, nouvelles élections… les pleins pouvoirs au FPÖ?

Cité par Le Monde, Alexander Van der Bellen résume les craintes des opposants à Norbert Hofer, à savoir que ce dernier « renvoie le gouvernement et provoque de nouvelles élections ». L’objectif? Placer les fonctions les plus importantes « dans les mains de sa formation politique, du président de la République au chancelier, en passant par les ministères importants ». En effet, la Constitution l’y autorise et Norbert Hofer a assuré qu’il serait un « président actif », contrairement à certains de ses prédécesseurs.

Avant le premier tour, il a d’ailleurs explicitement menacé s’il était élu de révoquer le gouvernement voire même de dissoudre le parlement, notamment « si la majorité ne suivait pas ses décisions concernant la crise migratoire », souligne Slate.

Même si Norbert Hofer a par la suite nuancé ses propos, il pourrait effectivement en tant que président changer son chancelier (le social-démocrate Christian Kern) ou dissoudre le parlement, actuellement dominé par une coalition des sociaux-démocrates du SPÖ et des conservateurs de l’ÖVP. Des compétences dont n’ont pas fait usage les chefs d’Etat autrichiens successifs, optant pour une présidence profil bas, à l’image du sortant social-démocrate Heinz Fischer.

norbert hofer

Heinz-Christian Strache et Norbert Hofer
En parlant de chancelier, les opposants du FPÖ craignent que par ce « tour de passe-passe constitutionnel », ce soit Heinz-Christian Strache, patron et incarnation de l’aile dure du parti, qui soit désigné à l’issue d’éventuelles élections. Un scrutin que le FPÖ « remporterait à coup sûr » selon Christian Rainer, rédacteur en chef de l’hebdomadaire autrichien Profil cité par L’Hebdo.

« La situation actuelle n’a pas été bien comprise à l’extérieur de l’Autriche, souligne aussi Patrick Moreau, chercheur du CNRS cité par Le Monde. La Constitution autrichienne est très proche de celle de la République de Weimar », explique-t-il, ajoutant que « si Norbert Hofer est élu le 22 mai […] il peut tout à fait, dans la foulée, nommer chancelier Heinz-Christian Strache ». Un homme politique radicalement anti-islam et anti-Turquie qui défend le « sang viennois » et a fréquenté dans sa jeunesse les milieux néo-nazis.

Euroscepticisme, hostilité aux migrants… l’extrême droite reboostée

Au-delà de l’Autriche, un succès de l’extrême droite à ce niveau pourrait aussi avoir un effet d’entraînement en Europe. Alors que la légitimité de l’UE est remise en cause par une multiplication de crises, cela marquerait un nouveau jalon dans cette montée de l’eurosceptisme qui, de Budapest à Varsovie, en passant par la menace d’un Brexit, fait tanguer l’Union.

Nobert Hofer avait personnellement voté contre l’entrée de l’Autriche dans l’UE en 1994. Depuis, ce souverainiste assumé dit être revenu à une position plus nuancée, même s’il n’exclut pas d’organiser un référendum populaire, à l’image de ce que va faire la Grande-Bretagne le 23 juin prochain. Pas étonnant que Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne, se soit senti « obligé de dire » qu’il « ne les aime pas ».

La Hongrie de Viktor Orban, régulièrement en délicatesse avec Bruxelles, pourrait en tout cas compter sur un nouvel allié. Critiquer la Hongrie pour sa politique anti-migration « était une lourde faute diplomatique que je veux réparer en tant que président. Déclarer que la Hongrie est proche du ‘fascisme’ seulement parce qu’elle met en oeuvre le droit de Schengen (…) était une absurdité », a par exemple déclaré Nobert Hofer à l’hebdomadaire français Valeurs Actuelles.

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Heinz-Christian Strache et Marine Le Pen au Parlement européen en 2011
Allié avec le Front national en France ou le Parti pour la Liberté de Geert Wilders aux Pays-Bas dans le groupe « Europe des nations et des libertés », qui souhaite combattre « l’islamisation de l’Europe », le FPÖ fait partie des formations d’extrême droite déjà installées dans le paysage politique et qui ont surfé sur la question migratoire. Heinz-Christian Strache a récemment qualifié la chancelière allemande Angela Merkel et le chef du gouvernement italien Matteo Renzi de « passeurs d’Etat » pour critiquer leur politique migratoire.

L’Autriche, dont le gouvernement refuse déjà de prendre part au système de quotasvisant à répartir les réfugiés entre pays membres et qui a décidé de rétablir sa frontière avec l’Italie, pourrait aller plus loin avec un président, voire un exécutif d’extrême droite.

« Le candidat et son parti ont fait campagne contre l’accueil des réfugiés », noteGeopolis, surfant « sur la crainte que suscite, dans les régions rurales et les petites agglomérations, la venue des migrants ». 90.000 réfugiés ont été accueillis dans le pays en 2015, un chiffre important rapporté aux 8,4 millions d’Autrichiens. 61% des Autrichiens, selon un sondage, ont reconnu que l’immigration avait été un facteur décisif dans leur vote.

Autre remise en cause de taille, Heinz-Christian Strache et Norbert Hofer sont favorables à un changement des frontières au sein de l’UE puisqu’ils souhaitent organiser un référendum sur le rattachement à l’Autriche du Tyrol du sud (ou Haut-Adige), province du nord de l’Italie à forte population germanophone.

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