Gérald Pandelon, Universitaire et avocat à la Cour d’appel de Paris, Gérald Pandelon est docteur en droit et docteur en science politique. Diplômé de Sciences-Po, il est également chargé d’enseignement. Il est également l’auteur de L’aveu en matière…
(…)Autre élément jamais pris en considération par les spécialistes en chambre de l’aveuglement généralisé, ce sont parfois même, et de plus en plus, des immigrés extra-communautaires, de confession musulmane, qui se plaignent du comportement de leurs coreligionnaires qui ne souhaitent pas s’intégrer et qui, contrairement à eux, ont préféré semer le désordre dans le pays que de travailler honnêtement et s’intégrer. Autrement dit, il ne s’agit en aucun cas, (mais faut-il le répéter systématiquement ?), de considérer que ce seraient les immigrés dans leur totalité qui seraient responsables de la hausse de la délinquance car cette hypothèse serait erronée mais de reconnaître toutefois, cet élément ne devant souffrir aucune contestation, que la plupart néanmoins des délinquants sont issus de l’immigration extra-européenne, ce qui est fort différent. Bien davantage, c’est parce l’on admet pas l’évidence que l’on crée un tabou chez une partie croissante de la population française qui ne comprend toujours pas pourquoi et au nom de quoi il faudrait au pays des Lumières et de la sauvegarde des libertés se résoudre à nier les évidences ou, lorsqu’il s’agit du lien évident entre immigration et délinquance, s’interdire de devoir le reconnaître de façon objective sans encourir les foudres de la justice pénale. Le législateur, puis le juge, en arrivent à créer une frustration chez l’électeur qui, bien souvent, pour se venger, sera tenté de voter pour ceux qui, tout simplement, disent la vérité des chiffres tout comme d’ailleurs la vérité vécue. Mais comment les en blâmer ? Puisqu’ils ont raison…(…) Les gouvernements successifs ont souhaité depuis 40 ans acheter la paix sociale. Prenons le problème des cités ou « quartiers de non-droit », QSD selon l’acronyme politiquement correct. Dans ces territoires oubliés de la République, ce qui se prépare est tout simplement une guerre, une guerre qui ne dit pas son nom car il est même devenu incorrect sur un plan politique d’en envisager ne serait-ce que l’hypothèse. Le maître-mot devant être le silence, un silence assourdissant, pourtant. Certes, depuis des années, cette guerre est larvée, mais elle va se déclarer. Oui, une guerre. Et je n’exagère pas, loin s’en faut… J’entends déjà les spécialistes en questions internationales et en matière de défense m’expliquer savamment qu’une guerre ne peut concerner que deux Etats belligérants, me rappelant, au besoin, que seul ce type de conflits peut être défini comme une guerre, ce à quoi je pourrais rétorquer qu’il existe également des conflits armés non internationaux, qui peuvent opposer des forces gouvernementales à des groupes armés non internationaux, voire des groupes armés entre eux. Il suffit de pénétrer au cœur de ces quartiers abandonnés, pas uniquement en Île-de-France, mais également dans le Sud, notamment à Marseille, à la Castellane, à la Busserine ou aux Lauriers pour s’en convaincre. Au sein de ces cités, tous les caïds sont déjà prêts pour un affrontement armé, ils se considèrent même infiniment plus armés et dotés que nos propres forces de l’ordre ; d’ailleurs, non seulement ils ne craignent pas l’affrontement mais certains m’ont même confié qu’ils en attendaient impatiemment le déclenchement ; pour bien démontrer « (…) qui est le patron désormais ».
Car du côté des guérilleros des cités, tout est déjà prêt, tout. Qu’il s’agisse de la logistique, des voitures, des armes, des équipes organisées, des réseaux à utiliser si cela devient « trop chaud ». En revanche, nos forces de l’ordre ne le sont pas ; elles seront donc dépassées, elles le savent car rien n’est prévu pour y faire face ; d’ailleurs, s’il est difficile de venir à bout de quelques casseurs dans une manifestation pacifique dite des « gilets jaunes », comment l’emporter face à des centaines de milliers de voyous, surarmés et particulièrement déterminés à en découdre ? La guerre qui s’annonce est, en réalité, déjà asymétrique. Autrement dit, celle qui s’annonce, sans aucun doute possible, est déjà perdue. Nos acteurs politiques le savent pertinemment mais n’ont aucun intérêt à l’expliquer, nos policiers en ont pleinement conscience également pour y être confrontés au quotidien ; les avocats pénalistes n’en ignorent rien car ils en reçoivent parfois la confidence de certains clients, mais également les éducateurs spécialisés, les magistrats, les citoyens qui survivent honnêtement dans ces cités.
Pourtant, ce secret de Polichinelle repose sur le silence, le secret, le non-dit, qui doit être de mise, une communication interdite sur le sujet, pourtant à mi-chemin entre irresponsabilité politique et résignation, entre politique de l’intérêt (« autant les laisser dans leurs quartiers faire leurs trafics, au moins ils ne foutent pas la pagaille dans nos centres- villes »), et peur (« si ça explose, ils vont nous bouffer »). Autrement dit, nos politiques, tous bords confondus, ont décidé d’acheter la paix sociale (mais pour combien de temps ?) en fermant les yeux sur ce qui vient, irrémédiablement, tôt ou tard, à savoir une guerre entre les cités et les autorités. Et lorsque certains hommes d’Etat, de vrais, comme M. Gérard Collomb, brisent l’omerta sur le sujet, rompent le non-dit, font en d’autres termes preuve de réalisme, et bien curieusement ils quittent aussitôt après le gouvernement. Laissons, en effet, la parole à cet ancien ministre de l’intérieur : « C’est plutôt la loi du plus fort qui s’impose, des narcotrafiquants, des islamistes radicaux. » (Phrase prononcée dans la cour de l’hôtel de Beauvau, le 3 octobre 2018).