En 2020, bien avant la propagande autour de l’invasion, un rapport du magazine Focus (1) révélait que des néo-nazis Allemands recevaient une formation paramilitaire à Saint-Pétersbourg, en Russie.
Avance rapide, mai 2022. Pourquoi est-ce en Russie que les néo-nazis Allemands s’entraînent, et pas en Ukraine, si comme le dit Poutine, l’Ukraine est nazie ? Réponse : la propagande russe, fidèle héritière du régime soviétique, est passée par là, et la vérité a été invitée à ne pas la déranger.
L’entraînement proprement dit, auquel les néo-nazis Allemands ont participé, est assuré par un club qui apparaît sous deux noms différents : « Rezerv » ou « Partizan ».
Le lien entre les néo-nazis et la Russie, une affaire de convergence
Les services de renseignement américains sont convaincus que les autorités russes apportent un « soutien indirect et passif » aux groupes néonazis opérant en Amérique et dans d’autres pays.
Yahoo News a examiné la question plus en détail (2). Les documents obtenus par ses journalistes ont révélé que le Kremlin « tolère le soutien de certaines organisations privées russes » aux mouvements néo-nazis et suprémacistes blancs, parce que cela correspond à l’objectif du Kremlin d’aggraver les divisions sociales en Occident, une constante qui est apparue au grand jour lors de l’élection de Donald Trump, ou les trolls farms russes diffusaient des milliers de messages pro-Trump et pro-Hillary, organisant même deux manifestations opposées, une MAGA et une d’activistes Démocrates, le même jour et dans la même ville américaine.
L’entraînement intensif est donné par le Mouvement impérial russe (MIR), une organisation paramilitaire monarchiste qui a épousé l’idéologie nazie de la supériorité de la race blanche, et a tenté de recruter des Américains pour les entraîner dans des camps en Russie. Le groupe a été interdit par le département d’État américain il y a deux ans, ce qui a suscité une réaction plutôt absurde du ministre russe des Affaires étrangères tristement connu, dont la porte-parole Maria Zakharova a qualifié la décision du département d’État de propagande !
La « deuxième Syrie »
La question des liens entre Moscou et les néo-nazis américains a été remise au goût du jour par la menace d’une invasion russe en Ukraine : à trop parler de nazis ukrainiens, on s’expose à un risque de boomerang : des journalistes qui fouillent les placards de celui qui accuse, et y découvrent des cadavres. De plus, les responsables américains se sont efforcés d’identifier et de traquer « leurs » néo-nazis qui pourraient être tentés de se rendre dans la région pour prendre part aux combats.
« On craint vraiment qu’il s’agisse d’une deuxième Syrie », affirment les services de sécurité, faisant référence au fait que d’une part, des musulmans américains, ou résidents américains, aient tenté de rejoindre ISIS, et d’autre part, la zone de guerre de Syrie est devenue un grand camp d’entraînement pour les Russes.
Ainsi, en parallèle avec l’internationale communiste, il existe bien une internationalisation des mouvements néo-nazis, qui transforme l’Amérique en une des arènes de confrontation blanche – Anders Breivik n’est pas loin. Un reportage de la NPR – d’avant l’invasion il faut le préciser – notait que la Russie est « un maillon central de ces liens transnationaux croissants entre les groupes néo-nazis et néo-fascistes du monde entier. » Ces évaluations indiquent que les contacts internationaux entre les partisans de la suprématie blanche sur des côtés opposés de l’océan ne feront qu’augmenter à l’avenir. A moins qu’ils soient combattus de manière transnationale.
Que sait-on des opérations néo-nazies ?
Peu avant l’élection de 2020, les trolls russes s’étaient activés dans une double campagne sur les médias sociaux (3). Elle s’est résumée à une banale incitation des nationalistes blancs à diffuser leur « message » de manière plus agressive et à tenter de mobiliser, pendant que Moscou a également envoyé des messages pour inciter les « groupes extrémistes noirs » de Black Lives Matter à la violence.
Selon le magazine Focus, certains des Allemands sont membres des Jeunes nationalistes, l’aile jeunesse du NPD, le plus ancien parti d’extrême droite allemand. Comme l’aile jeunesse ne compte que 280 membres, elle reste politiquement insignifiante, bien que ses participants soient plutôt actifs lorsqu’il s’agit d’action publique. Le groupe a mené des campagnes de protection de l’environnement, par exemple, pas dans le but de défendre l’environnement, mais pour tenter de recruter de jeunes partisans.
D’autres participants à l’entraînement paramilitaire en Russie sont des membres de la Troisième Voie, l’un des partis politiques les plus radicaux d’Allemagne. Selon l’agence de renseignement intérieure allemande, le BfV, le parti promeut une idéologie nationaliste et raciste influencée par le nazisme, et il rejette la démocratie.
En 2019, le gouvernement allemand a déclaré en réponse à une enquête du Parti de gauche que, depuis de nombreuses années, les néonazis allemands cherchaient à coopérer étroitement avec leurs homologues de Russie. À maintes reprises, des séances d’entraînement au tir ont été rendues publiques sur les médias sociaux. En raison du penchant des extrémistes pour les armes, les autorités affirment qu’ils sont restés en contact avec les services de renseignement des pays concernés.
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Jean-Patrick Grumberg pour Dreuz.info.
- https://www.dw.com/en/why-are-german-neo-nazis-training-in-russia/a-53702613
- https://news.yahoo.com/us-intelligence-report-details-indirect-russian-government-support-for-western-neo-fascist-groups-233831082.html?guccounter=1&guce_referrer=aHR0cHM6Ly93d3cudHJ0cnVzc2lhbi5jb20v&guce_referrer_sig=AQAAAKM8jCNhGpn9-4a0gBml0JADY8wyDI4iNIy50WjXHf5q6n5iFsvpSdV0HGMEHfnSZbeFjiifsxsMakhiUP0ouVzbPGk32j-BWaj-Gxz6pHeP4FkIRkh2CLLZRm9UfPjNprCD2w_D8cO0vgk5YoHaBNjFYtj_aOYau2chLHgk_Ggl
- https://www.nytimes.com/2020/03/10/us/politics/russian-interference-race.html