Je me suis rendu cette semaine au Tombeau de Rachel, matriarche du Peuple juif, situé à l’entrée de Bethle’hem. Rachel, femme de Jacob, mère de Joseph et Benjamin, était l’héroïne des sections bibliques lues ces dernières semaines dans toutes les synagogues du monde.
L’aspect extérieur de ce mausolée n’a plus rien à voir avec celui du tableau pastoral qui ornait les murs des foyers juifs à travers le monde durant des siècles. Les Accords d’Oslo et la deuxième Intifada ont transformé ce lieu de pèlerinage en une forteresse bétonnée afin de permettre aux fidèles juifs de s’y rendre en relative sécurité. A l’intérieur, près du lieu présumé de la sépulture, une plaque ancienne en pierre, gravée d’un passage du prophète Jérémie : « Ainsi parle l’Et-ernel, une voix s’élève à Rama, une voix plaintive, d’amers sanglots. C’est Rachel qui pleure ses enfants, et qui refuse de se consoler de ses fils perdus. Or, dit l’Et-ernel, que ta voix cesse de gémir, et tes yeux de pleurer, car il y aura une compensation à tes efforts. Ils reviendront du pays de l’ennemi. Oui, il y a de l’espoir pour ton avenir, dit l’Et-ernel, tes fils reviendront dans leurs frontières ».
Le prophète, témoin de la destruction du 1er Temple de Jérusalem (-586) y parle des Juifs en partance pour l’exil de Babylonie. Les longues cohortes de captifs, qui sont passées près du Tombeau de Rachel, ont inspiré à Jérémie ces paroles aussi prenantes que prémonitoires.
Non loin de ce même Tombeau de Rachel se situe le camp de ‘réfugiés’ d’Aida, l’un des nombreux camps de misère dans lesquels les pays arabes ont parqué leurs « frères palestiniens » après les guerres de 1948 ou 1967. A l’entrée de ce camp, un grand portail surmonté d’une immense clé en bronze, offert par l’Allemagne, et qui symbolise l’espoir « du retour ». Mais ce qui est plus intéressant est la plaque apposée sur le linteau du portail et qui porte l’inscription suivante : « Tes fils reviendront dans leurs frontières », l’expression mot pour mot empruntée à Jérémie mais décontextualisée et détournée.
Cet exemple n’en est qu’un parmi une multitude dans la politique méthodique appliquée par les Arabes palestiniens de coller à l’Histoire et à l’ethos juifs. Concernant le Tombeau de Rachel, en 2001, les livres du système scolaire de l’Autorité Palestinienne ont remplacé la dénomination traditionnelle de « Dôme de Rachel » par celle de « Mosquée Al Bilal », devenu lieu saint musulman et que l’UNESCO a entériné en 2010 comme « faisant partie du patrimoine palestinien » ! Ce genre de réappropriation identitaire relève du même procédé que celui utilisé par les Pères de l’Eglise des premiers siècles qui avaient développé la Théologie de la Substitution affirmant que c’était désormais l’Eglise qui était le « Verus Israel » face à un peuple juif relégué et caduc.
L’apparition d’un « peuple palestinien chassé de chez lui » ramène déjà à l’Histoire juive ancienne et à l’exil du peuple juif chassé de Judée par les Romains. De là était née l’expression de « diaspora juive » qui comme par hasard donna lieu à celle de « diaspora palestinienne » dans la lexicologie arabe palestinienne. Les exemples ne manquent pas : exode, errance, camps, retour, centralité de Jérusalem, comparaison odieuse entre Gaza et Auschwitz, entre l’enfant A-Dura et celui du ghetto de Varsovie, autant d’emprunts pas du tout innocents destinés à superposer le vécu palestinien à celui du peuple juif. Même Jésus, né et mort en Juif, devient soudain un « palestinien qui luttait contre l’occupant ». Certes, mais contre l’occupant romain et avec ses frères juifs ! Sans parler de tous les personnages bibliques qui se trouvent convertis en bons musulmans pas un tour de main.
Cette escroquerie identitaire n’est pas sans conséquences. Elle est au centre de l’une des plus grandes manipulations intellectuelles et politiques de tous les temps qui a notamment abouti au vote récent en Europe sur la reconnaissance d’un « Etat de Palestine » virtuel qui ne correspond à rien sur le plan historique.
Abou Mazen déclarait il y a quelques jours encore « que 6 millions de réfugiés (autre récupération douteuse) attendaient de pouvoir revenir dans leur foyers ». Depuis le Parlement de Londres où il participait à une séance sur le rôle de l’UNRWA, le militant palestinien des Droits de l’Homme Bassam Aïd a eu le courage de dénoncer « l’utilisation cynique et l’exploitation du statut de ‘réfugié’ par les instances palestiniennes avec la complicité de cette institution de l’ONU ».
Ce n’est donc pas pour le retour des Arabes palestiniens, invention tout récente, que pleurait notre matriarche Rachel, c’était bel et bien pour les exilés juifs, et lorsque le prophète Jérémie annonçait le retour de ses fils dans leurs frontières, il ne parlait pas des résidents du camp d’Aida.
Les Sages du Talmud nous enseignent « que le Monde repose sur trois choses : la Vérité, la Justice et la Paix ». La Paix n’est pas un moyen pour arriver à d’autres objectifs. Elle est la résultante de la Vérité et de la Justice.
Shraga Blum est un journaliste indépendant qui contribue à l’hebdomadaire « P’tit Hebdo » et un analyste politique pour plusieurs sites internet en français
Note d’Etzbetzion : D’accord avec Shraga Blum lorsqu’il dit que Jésus n’était pas palestinien, mais juif. D’ailleurs, le terme « Palestine » n’existait pas à l’époque. Il a été inventé par les Romains à l’époque de la révolte de Bar Ko’hba qui fut jugulée par les troupes romaines et lorsque les Judéens furent emmenés en déportation, pour se moquer de la terre de Juda et d’Israël, en référence à leurs ennemis Philistins. Par contre, non, Jésus n’était pas un combattant qui luttait contre l’occupant romain. Il savait que son royaume n’était pas de ce monde et que celui-ci serait établi lors de Sa seconde venue.
Quant à la référence des maîtres du Talmud (Les Sages du Talmud nous enseignent « que le Monde repose sur trois choses : la Vérité, la Justice et la Paix »), elle est exacte, mais on la retrouve également et avant tout dans le Tana’h. (Psaumes 15.2 Celui qui marche dans l’intégrité, qui pratique la justice Et qui dit la vérité selon son coeur. – Psaumes 33.5 Il aime la justice et la droiture; La bonté de l’Éternel remplit la terre. – Psaumes 37.28 Car l’Éternel aime la justice, Et il n’abandonne pas ses fidèles; Ils sont toujours sous sa garde, Mais la postérité des méchants est retranchée. – et tant d’autres versets !).