Guy Millière – Le deuxième tour des élections départementales a eu lieu dans un contexte où il y a eu en France tout à la fois un crash aérien, et la publication de données économiques montrant que la France continue à s’enliser, et ne connaît aucun redressement.
Comme prévu, le Front National remporte quelques victoires, mais n’apparaît pas comme le grand vainqueur. Comme prévu aussi, l’UMP apparaît comme plus nettement victorieuse, tandis que la gauche s’effondre.
Ce qui me semble devoir être dit est que la surabondance de commentaires sur le crash aérien a servi, du côté du gouvernement et de François Hollande à éviter qu’on parle trop des données économiques publiées : il ne reste rien ou presque à la gauche, sinon, lorsqu’elle ne crie pas au fascisme, l’art du camouflage, qui marche encore un peu.
Ce qui me semble devoir être dit est que la gauche s’effondre, mais pas totalement : si des gens ne votaient pas à gauche parce qu’ils adhèrent stupidement à l’idée d’un danger fasciste, parce qu’ils se laissent abuser par l’art du camouflage, parce qu’ils ont des dogmes ancrés dans la tête qui leur donnent un confort intellectuel imperméable à toute donnée venant de la réalité, ou parce que leurs voix sont achetées par des allocations diverses, Hollande, Valls et les autres seraient des marginaux.
Ce qui me semble devoir être dit est que la victoire de l’UMP est en trompe l’œil : nombre de gens votent UMP (ou UDI) pour ne pas voter à gauche, par rejet de tout ce qu’a fait la gauche depuis bientôt trois ans et de tout ce qu’incarne la gauche, pas vraiment par adhésion à un programme et à un projet, car pour l’heure, il n’y a ni programme ni projet précis du côté de l’UMP (ou de l’UDI).
le Front National est plus victorieux qu’il ne semble
Ce qui me semble devoir être dit, enfin, est que le Front National est plus victorieux qu’il ne semble et que ne le disent divers commentateurs. Le Front National s’implante, se dote d’élus locaux, et, au premier tour, le nombre de voix qu’il a remporté en fait le premier parti de France. Sauf retournement, Marine Le Pen sera au second tour de l’élection présidentielle du 2017.
Ce qui doit être ajouté est que le Front National a un programme, et ceux qui votent pour le Front National votent, pour une part importante d’entre eux, par adhésion à ce programme.
Le programme du FN est essentiellement nationaliste, protectionniste, étatiste, socialiste
Or, ce programme est essentiellement nationaliste, protectionniste, étatiste, socialiste. Il donne l’impression à l’ancien électorat du Parti communiste que le Front National peut préserver ce que d’aucuns nomment encore des « acquis sociaux » et ce que les mêmes nomment encore des « services publics », ce en pratiquant la préférence nationale, en mettant en place des protections dites « intelligentes », et en recréant un « Etat stratège ». Il est aussi, logiquement en ce contexte, hostile à la finance, très hostile à la globalisation, et plutôt (voire très) anti-américain.
L’UMP (et l’UDI) paraissent, quelles que soient les proclamations de leurs dirigeants, désarmés face à ce programme, et peu susceptibles, pour l’heure, de se doter d’un programme et d’un projet précis qui soit tourné sans ambiguïtés vers le dynamisme et la liberté.
En ces conditions, ce qui pourrait se profiler est (je l’ai déjà écrit) un second tour d’élection présidentielle en 2017 qui verrait, face à Marine Le Pen, Nicolas Sarkozy. Ce qui pourrait se dessiner serait une victoire de Nicolas Sarkozy, mais avec une Marine Le Pen à même de réaliser un score sans précédents pour son parti. Ce qui pourrait prendre forme peu de temps après serait une situation marquée par l’échec de Nicolas Sarkozy, la décomposition de la gauche et la présence insistante d’une Marine Le Pen attendant son heure qui, dès lors, pourrait approcher.
Dans un court livre que j’ai publié il y a quelques mois (Voici revenu le temps des imposteurs*), je décrivais l’existence en France d’une hégémonie constituée par une nébuleuse d’idées qui ne sont situables ni à droite ni à gauche aujourd’hui quand bien même elles viennent essentiellement de la gauche. Je disais que l’hégémonie allait mener à l’anomie.
L’anomie est en chemin. Il n’y a personne à mes yeux pour éviter le désastre qui vient lentement. J’espère vraiment me tromper.
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Guy Millière
Publié sur les4verites.com
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