Les événements qui forgent l’Histoire de l’Israël moderne nous ramènent toujours à d’autres qui appartiennent à l’Histoire plus ancienne de notre peuple. Et lorsqu’ils sont tragiques et douloureux comme ceux qui se déroulent actuellement, cela prend une dimension symbolique encore bien plus importante.
Dans toutes les synagogues du monde, le texte biblique hebdomadaire qui sera lu ce samedi commence par la mort de notre matriarche Sarah, épouse d’Abraham, et l’acquisition à prix d’or par ce dernier d’un caveau pour l’enterrer, au lieu-dit de « Kiryat Arba – Hebron » selon l’expression du texte. A part ce couple mythique, c’est dans ce même caveau que furent enterrés plus tard d’autres fondateurs du peuple d’Israël : Isaac, Rebecca, Léa et Jacob. Seule Rachel fut enterrée à Bethlehem, à quelques dizaines de kilomètres de là.
Selon tous les commentateurs juifs du texte biblique, l’insistance du texte sur l’achat de ce caveau est d’une importance capitale pour la suite de l’Histoire. Une exégèse datant de plus de 20 siècles – bien avant l’apparition de l’Islam et de la moindre présence arabe en Palestine – nous apporte un éclairage d’une brûlante actualité : « Trois endroits en Israël ont été acquis par transaction formelle malgré la promesse que D.ieu fit à nos ancêtres d’accorder cette terre à Israël : le Caveau des Patriarches (Hebron), le Tombeau de Joseph (Sichem-Naplouse) et le Mont Moriah à Jérusalem (Mont du Temple), avec cette précision qui fait frémir aujourd’hui : « Ceci pour que personne ne vienne un jour prétendre que vous avez volé ces endroits »…
L’actualité vient nous rappeler tragiquement que ces lieux sont paradoxalement aujourd’hui les trois foyers de la haine la plus implacable que nous livre le monde musulman à travers la contestation palestinienne : les auteurs des attentats à la voiture-bélier étaient résidents de Jérusalem, le terroriste qui a tué un soldat à Tel-Aviv venait de Sichem (Naplouse) et celui qui a écrasé une jeune femme à une station de bus avant de l’achever au couteau venait de Hebron.
Mis à part la question politico-métaphysique de comprendre pourquoi ce sont justement ces trois endroits où nos ancêtres ont établi une propriété en bonne et due forme qui nous sont aujourd’hui les plus contestées par le monde arabe mais aussi par l’Occident chrétien, mon propos est de montrer que toutes les « causes » qui sont invoquées aujourd’hui par les uns et les autres pour expliquer voire justifier la violence arabe ne sont que des prétextes fallacieux et non des causes, car elles attribuent aux victimes ou à la collectivité à laquelle elles appartiennent la responsabilité de ce qui leur arrive alors que les causes réelles sont bien plus profondes.
J’en veux pour preuve ce qui suit. Au mois d’octobre s’est éteint Shlomo Slonim, à l’âge de 86 ans. Il était le dernier survivant du massacre de Hebron en août 1929, où 67 hommes, femmes, enfants et vieillards juifs furent massacrés par des Arabes chauffés à blanc par la propagande. Gravement blessé et laissé pour mort parmi les cadavres de ses parents et de son frère, le jeune Shlomo Slonim âgé d’un an avait survécu et avait été recueilli par des tantes rescapées.
En 1929, il n’y avait pas encore de « territoires occupés ». Il n’y avait même pas encore d’Etat d’Israël ! Pas de « processus de paix dans l’impasse » non plus, pas de juifs « provocateurs » qui foulent l’Esplanade du Temple, pas de « jeunes inconscients » qui font du stop pour rentrer chez eux, pas de « Bibi Netanyahou immobiliste », pas de « construction-juive-obstacle-à-la-paix » etc.
Par contre, cette même année, il y eut une terrible vague d’incitation à la haine anti-juive de la part des dirigeants arabes locaux. Shlomo Slonim, qui a beaucoup étudié cette période qui l’a marqué à vie, s’est toujours demandé « comment des amis ou voisins arabes, avec lesquels les familles juives vivaient en bonne harmonie, avaient pu soudain se transformer en monstres et assassiner des familles entières avec lesquelles ils parlaient voire riaient encore quelques jours auparavant ». Ces Juifs étaient tellement en confiance qu’ils avaient refusé l’offre de la Hagana de recevoir des armes, craignant « que cela ne soit interprété comme une provocation face à leur amis arabes ».
En cette année 1929, le mufti de Jérusalem, Hadj Amin El-Husseini, qui fit plus tard allégeance à Hitler, voulut fédérer autour de lui tous les Arabes de Palestine et le monde musulman en lançant une violente campagne antisioniste et antijuive sur le thème « Al-Aqsa et les lieux saints de l’Islam sont en danger car les Juifs veulent s’en emparer ». Dans une prêche qui précédait de quelques jours le massacre de Hebron, Al-Husseini avait clamé « Quiconque tue un Juif aura droit au Monde futur » (dans « Hadj Amin et Berlin » – Jenny Leibel – 1966).
Cela vous rappelle-t-il quelque chose ?
Alors de grâce, Européens comme Américains, médias israéliens et partis de gauche, arrêtez de trouver sans cesse je ne sais quels justificatifs circonstanciels à la violence aveugle qui frappe les Israéliens.
Cela devient indécent.
Shraga Blum est un journaliste indépendant qui contribue à l’hebdomadaire « P’tit Hebdo » et un analyste politique pour plusieurs sites internet en français