Il va de soi que l’émigration forcée pose un problème d’intégration aux nations européennes.
La France, la Belgique, les pays-Bas, l’Italie, la Suisse ainsi que les pays scandinaves refusent d’accorder les précieux visas à cette population en fuite, estimant pour justifier leur refus que les quotas d’immigrations sont dépassés.
Mais non, cette population en fuite n’est pas celle que vous croyez … nous ne sommes pas en 2015 mais en 1938.
La France envisage de reconduire à ses frontières dix mille juifs allemands qu’elle avait accueillis en 1933.
« Nous voudrions tous nous débarrasser de nos juifs mais les difficultés résident dans le fait qu’aucun pays n’est disposé à les accueillir. »
Georges Bonnet, ministre des Affaires Etrangères, confie à son homologue allemand son souhait de ne plus recevoir de Juifs. Von Ribbentrop lui répond : « Nous voudrions tous nous débarrasser de nos juifs mais les difficultés résident dans le fait qu’aucun pays n’est disposé à les accueillir. »
De retour aux Etats-Unis, James MacDonald propose au Foreign Office un plan prévoyant l’évacuation de cent mille juifs allemands.
Les associations juives sont disposées à prendre en charge la totalité des frais, soit 50 millions de dollars, somme colossale.
Le gouvernement britannique, toujours dominé par la crainte de voir les émigrés affluer en Palestine, refuse le plan du Haut-Commissaire.
Le 22 mars 1938, Franklin Delano Roosevelt lance le projet d’une conférence internationale pour les réfugiés, qui se tiendra à Evian.
Il propose à 32 pays de se réunir afin de trouver des pays d’accueil aux juifs.
Il y a six cent cinquante mille juifs allemands à sauver. 29 pays répondent présents. L’Italie, l’Afrique du Sud et le Salvador refusent d’y participer.
Le président confie à son secrétaire d’état, Cordell Hull, la tâche de prévenir les ambassadeurs américains de ces 29 pays, que les quotas à l’immigration aux Etats-Unis ne seront pas augmentés.
Les mots « juif » et « Palestine » ne devront jamais être prononcés durant la conférence
Les Anglais font savoir à l’ambassadeur américain Joseph Kennedy que les mots « juif » et « Palestine » ne devront jamais être prononcés durant la conférence.
Les ONG juives proposent l’ouverture des frontières de la Palestine, où vivent déjà environ 230.000 juifs.
Le représentant anglais, Lord Winterton, leur répond que « toute proposition de ce genre est inadmissible. »
L’enthousiasme est palpable parmi l’opinion publique qui, bien-sûr, ignore tout des intentions secrètes du président américain et de ses alliés.
Le monde entier retient son souffle, six cent cinquante mille vies humaines sont en jeu.
Les délégués de ces 29 pays prennent à tour de rôle la parole. Ils savent qu’ils participent à une mascarade, mais s’efforecent de donner le change devant les photographes qui immortalisent cette journée historique.
Tous, sans exceptions, trouvent des excuses à leur pays pour refuser de sauver les juifs.
Henry Béranger, sénateur de la Guadeloupe et représentant de la France auprès de la SDN (Société des Nations) :
« j’apporte ici l’accord de principe le plus entier et la volonté de réalisation la plus sincère, mais ma patrie a déjà fait jusqu’à l’épuisement de ses propres ressources qui ne sont, hélas, pas aussi illimitées que son ardeur à servir la communauté des hommes. »
Pour l’Angleterre, Lord Winterton :
« pour des raisons économiques et sociales, la politique traditionnelle consistant à accorder asile ne peut être appliquée que dans d’étroites limites. »
Pour les Pays-Bas :
« Depuis quelques temps, à son grand regret, la continuation de l’afflux des réfugiés doit être stoppée pour le moment, sauf dans des cas exceptionnels. »
Le Brésil, l’Australie, l’Argentine, la Colombie, l’Equateur, l’Uruguay, les pays d’Amérique du sud en général ont besoin d’agriculteurs, d’éleveurs, et de rien d’autres. Surtout pas d’intellectuels, de commerçants, de professions libérales et d’intermédiaires.
Il ne faut pas que les postulants [juifs] tombent à la charge des fonds publics
Pour le Canada, l’Angleterre et la Nouvelle Zelande, il est nécessaire que ceux dont le départ est désiré doivent pouvoir emporter avec eux des capitaux et des biens. Il ne faut pas que les postulants tombent à la charge des fonds publics. Il est indispensable que le pays d’origine apporte sa contribution, son aide, afin que les émigrants puissent commencer leur existence avec quelques chances de succès. Comme si Hitler allait autoriser les juifs à quitter le pays avec leurs biens et encore bien moins les aider financièrement à partir…
Le 15 juillet 1938, la conférence de la honte clôt ses travaux. Aucune décision de sauvetage n’a été prise.
Les délégués ont agi en conformité avec les directives de leur gouvernement.
- Si chaque nation présente à la conférence avait accepté d’accueillir dix-sept mille réfugiés juifs, les juifs allemands auraient été sauvés !
A Berlin, les nazis exultent : « Juifs à vendre, même à bas prix personne n’en veut »
Six millions de juifs sont morts avec la complicité des nations.
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