La lettre que l’organisation “Rabbis for Human Rights” (RHR) a récemment envoyé au Premier Ministre Binyamin Netanyahou pour protester contre sa decision de démanteler des implantations arabes illégales a généralement été présentée dans les médias comme une pétition bona fide de militants des droits de l’homme contre “la destruction de maisons palestiniennes”. Derrière cette façade de légalité et d’innocence, cependant, se cache la réalité plus sombre d’une tentative européenne sournoise et illégale de porter atteinte à la souveraineté d’Israël.
Un rapport récemment publié par l’ONG israélienne “Regavim” montre que l’Union européenne (UE), tout en exhortant Israël à ne pas « établir des faits sur le terrain” par la construction dans les zones contestées, encourage et même finance l’Autorité palestinienne (AP) pour construire dans des zones contestées afin, justement, d’établir des faits sur le terrain. En septembre 2012, par exemple, l’UE a annoncé l’attribution de 100 millions d’euros pour la construction de logements arabes en «zone C» (la partie de la Judée-Samarie maintenue sous juridiction israélienne par les Accords d’Oslo). Un rapport de la Commission européenne d’octobre 2012 insiste sur «l’importance de l’aide (y compris l’aide humanitaire), en particulier dans les régions dans lesquelles la jurisdiction de [l’Autorité palestinienne] ne s’applique pas. »
Un rapport de la Commission européenne de septembre de 2014 stipule ouvertement que « l’Union européenne et l’Autorité palestinienne font activement la promotion de la planification et de la construction dans la Zone C, ce qui, en cas de succès, ouvrira la voie pour le développement et l’expansion du contrôle de l’Autorité palestinienne sur la zone C ». Dernièrement, les efforts de l’UE se sont concentrés dans la zone dite « E1 » (elle-même située dans la zone C), un territoire presque vide entre Jérusalem et la ville de Ma’ale Adumim.
Les gouvernements israéliens successifs prévoient, depuis plusieurs années, de construire dans E1 pour créer une continuité territoriale entre Jérusalem et Ma’ale Adumim. Mais la construction est toujours en suspens à cause des pressions américaines. Non contente de ces pressions, l’UE finance la construction de maisons préfabriquées pour la population arabe, justement pour « établir des faits sur le terrain. » Selon Regavim, l’UE a financé la construction illégale de centaines de maisons préfabriquées dans E1 ainsi que dans d’autres parties de la Zone C. Les photos prises par Regavim montrent clairement le drapeau et le logo européens mis en évidence sur lesdites habitations. Selon le droit international et les accords d’Oslo, la construction dans la zone C (qu’elle fût temporaire ou permanente) exige l’autorisation d’Israël -une règle que l’UE défie et viole ouvertement.
Au total, l’UE a financé la création de 17 villages arabes illégaux (“les colonies de l’UE”) en Judée et en Samarie. Le 1er février 2015, l’eurodéputé britannique James Carver a écrit au Comité des Affaires étrangères du Parlement européen que «les structures portent toutes le nom et le drapeau de l’UE et les agents officiels de l’UE ont été photographiés en train de participer à la supervision de la construction, de sorte que la participation active de l’UE n’est guère contestable. » Le 5 février 2015, le Daily Mail a écrit que la construction de l’UE dans la zone C « soulève des soupçons selon lesquels l’UE utilise des ressources précieuses afin de prendre parti dans un différend territorial étranger.”
Le Premier Ministre israélien n’a donc pas ordonné « la démolition de maisons palestiniennes. » Il a ordonné le démantèlement de structures préfabriquées non approuvées récemment construites par l’UE en contravention du droit international.
Quant aux “400 rabbins” s’adressant au Premier Ministre, ne nous laissons pas berner non plus. L’organisation RHR est financée en partie par l’UE (selon «NGO Monitor, » RHR a reçu € 248 914 de l’UE en 2012). L’UE la finance RHR pour promouvoir sa politique. Leur lettre au Premier Ministre n’était donc pas un innocent cri du cœur.
L’UE a le droit, bien sûr, de prendre parti (comme elle le fait copieusement) dans le conflit entre Israël et les Palestiniens. Mais pourquoi le faire sournoisement? L’UE n’a pas de problème à défier le droit international lorsque cela sert son ordre du jour politique, mais c’est au nom de ce même droit qu’elle sermonne Israël. L’UE finance des ONG qui soi-disant défendent les droits de l’homme alors qu’en réalité ces ONG sont des relais locaux de relations publiques.
Comme le disait Abraham Lincoln: «vous pouvez berner tout le monde une partie du temps et une partie du monde tout le temps, mais vous ne pouvez pas berner tout le monde tout le temps. » Si Lincoln avait entendu parler de la Commission européenne, son optimisme eût été tempéré.
Emmanuel Navon dirige le département de Science politique et de Communication au Collège universitaire orthodoxe de Jérusalem et enseigne les relations internationales à l’Université de Tel Aviv et au Centre interdisciplinaire d’Herzliya. Il est membre du Forum Kohelet de politique publique.