Igor* a été arrêté par des séparatistes dans l’Est de l’Ukraine, interrogé, battu et conduit vers son lieu d’exécution. Nos collaborateurs l’ont rencontré durant leur mission humanitaire.
Dominic Heinzmann Collaborateur du CACP
Le 26 décembre 2014, j’atterris à Kiev au milieu de la nuit en compagnie d’Ivan Stuker, responsable d’une église de Bochum et de mon collègue Amane. Nos sentiments sont mitigés, il fait horriblement froid. Voyage en « No man’s Land » Par contre, l’accueil d’Oleksii, coordinateur de l’Alliance d’Eglises Libres « Sauvons l’Ukraine », est cordial et chaleureux. Notre voyage se poursuit vers Krasnoarmeysk, Slaviansk et Marioupol, et de là vers de petites villes et villages de la zone en crise. A plusieurs reprises, nous traversons la zone tampon, un « No man’s Land » entre les régions contrôlées par l’armée régulière ukrainienne et celles occupées par les séparatistes. Ce que nous y voyons et entendons nous remue profondément : atrocités, détresse, misère, faim et gelures d’un côté, espoir, confiance, et miracles divins de l’autre. Aucune aide de l’Etat Le piteux état politique et économique de l’Ukraine s’exprime de multiples manières : les soldats n’ont pas tous le même uniforme ; chacun porte ce qu’il a trouvé, comme des habits militaires allemands ou américains. L’approvisionnement des troupes ayant été interrompu, c’est la population qui nourrit l’armée, avec le peu qui lui reste. Nous visitons une école qui donne l’impression de n’avoir plus été entretenue depuis l’époque soviétique. Les finances de l’Etat servant surtout à l’armée, il ne reste plus rien pour soutenir les victimes de la guerre civile.
Dominic Heinzmann Collaborateur du CACP Igor* a été arrêté par des séparatistes dans l’Est de l’Ukraine, interrogé, battu et conduit vers son lieu d’exécution. Nos collaborateurs l’ont rencontré durant leur mission humanitaire. La population des régions sous contrôle des séparatistes souffre de la faim et du froid. L’approvisionnement en nourriture est coupé, celui en gaz pour se chauffer pas garanti. Les réserves des caves s’épuisent, celles des épiceries ne se portent pas mieux. Sans aide extérieure, la survie est à peine possible. Une aide presque exclusivement chrétienne « Sauvons l’Ukraine ». Cette initiative de plusieurs groupements d‘églises démarrée en mai 2014 est d’une grande valeur pour les populations sinistrées. C’est une plateforme d’échange et de coordination des efforts d’entraide des différentes églises. Des milliers de personnes ont été évacuées depuis le début des hostilités. Environ 40‘000 ont pu bénéficier d’une place pour dormir et de nourriture. A ce jour, 20‘000 sont encore entretenus. Oleksii estime que 90% de l‘aide aux victimes a passé par l’Alliance. Un signe fort et concret de l’amour de Dieu donné par les chrétiens. La nourriture est transportée depuis trois centres de dépôts proches de la zone de conflit vers des lieux de transbordement plus petits, et de là, 40 soupes populaires sont préparées et transportées vers la zone tampon. Le CACP a livré vers les trois centres de dépôt 4 camions contenant environ 80 tonnes de pommes-de-terre et 10 tonnes de nourriture variée achetées à Kiev, et a aidé à la distribution. Beaucoup de gens paraissent apathiques, ont les larmes aux yeux. Nous entendons souvent des « Dieu soit loué » !
Echapper à la mort
A côté de la faim et du froid, l’instable région souffre d’autres dangers : Les églises libres et leurs collaborateurs sont particulièrement pris pour cible par les séparatistes pro-russes (voir l’article en page 6 du CACPactualités 6.14). Nous rencontrons Igor, diacre d’une église locale à Slaviansk.
Igor est prisonnier des séparatistes. Dès le début, on lui a clairement fait comprendre qu’on ne le laisserait partir que « les pieds devant ». On l’a interrogé et roué de coups ; des pros du KGB, selon lui. Il est surpris de constater à quel point ces gars savent des choses sur l‘église de Slaviansk. Maintenant, Igor est conduit vers le lieu de son exécution. Il entend le clic de la détente d’une arme à feu. Mais l’arme n’est pas chargée. Les fausses exécutions sont une des pires tortures psychologiques. « Rendez-vous » est pris pour le lendemain matin. Mais finalement retardé par une offensive de l’armée ukrainienne en cours de soirée. A sa grande surprise, Igor est libéré le soir même. Une aide au péril de sa vie Et aujourd’hui, que fait Igor ? Est-il résigné, paralysé par la peur ? intimidé ? Non, bien au contraire. Et pour moi, c’est une des preuves les plus surprenantes de l’action puissante de Dieu dans les situations les plus désespérées. De Slaviansk, de la nourriture est transporté vers la zone de conflit. Quatre hommes prennent sur eux ce risque énorme. Igor est l’un d’entre eux. Nous lui demandons s’il a peur. « Seul un idiot n’a pas peur ! » nous répond-il, « nous devons apprendre à vivre avec la peur et ne pas nous laisser emporter par la panique. » A propos de sa motivation, il déclare : « Si je ne le fais pas, personne ne le fera. »
Peu de temps après, deux collaborateurs de l’église qui s’investissaient auprès des nécessiteux ont été assassinés en plein jour. Atmosphère de renouveau A Krasnoarmeysk, en compagnie d’Oleksii, nous parlons avec un pasteur local. Tous expriment beaucoup de confiance et d’espoir. Depuis 21 ans, le pasteur reçoit prophétiquement que l’Ukraine sera secouée par un réveil. « Aujourd’hui le temps est venu ! » Beaucoup d’autres pasteurs et de responsables de différentes communautés adhèrent à cette pensée. L’un des effets de la guerre est la recherche de sens, d’équilibre et de paix. Et quel meilleur endroit pour les trouver qu‘en Jésus-Christ ? Dans l’Est du pays, les Ukrainiens ont urgemment besoin d’aide pour survivre. Je suis reconnaissant de pouvoir prendre ne serait-ce qu’une petite part à cet effort. Rejoignez-nous !
* Nom modifié pour des raisons de sécurité.
CACP : Comité d‘action pour les chrétiens persécutés et les personnes dans la détresse.