Éric Zemmour vend des livres. Il remplit des salles. Et il sait tenir un auditoire en haleine.
Ce mardi après-midi, à Nice, plusieurs dizaines de personnes sont restées sur le trottoir, le Centre universitaire méditerranéen étant trop petit pour contenir tous ceux qui souhaitaient écouter l’auteur du Suicide français, ovationné à son arrivée.
Interrogé par le journaliste Patrice Zehr, Zemmour l’a, d’entrée, confirmé : s’il avait écrit son livre après les attentats de janvier, il n’en aurait pas changé un mot. «La messe était dite depuis longtemps. Nous avons assisté à l’émergence d’un peuple dans le peuple, avec son dieu, sa culture, l’halalisation des quartiers…»
Et de dénoncer ce triple travail de «déconstruction, dérision et finalement destruction de la nation», à l’œuvre ces quarante dernières années, qui constitue la trame de son ouvrage.
Ce leurre d’une laïcité qu’il perçoit comme une autolimitation de l’État, là où l’assimilation – selon le précepte «A Rome, fais comme les Romains» – a totalement échoué à ses yeux.
Des mots factices
«Nous avons poussé l’adoration de l’autre jusqu’à la détestation de nous-mêmes», a-t-il admonesté, mettant l’accent sur des mots en trompe-l’œil : «L’effet Charlie a été une formidable opération de communication du pouvoir en place et c’est au fond assez logique. Quand le peuple a peur, il se réfugie auprès du monarque républicain. Quant au vivre ensemble, on invente des mots quand la réalité n’existe plus. Nous n’avons plus de culture commune, les mots ne sont plus que des attrape-couillons. Ils servent au contraire à effacer la réalité. Nous sommes dans une guerre idéologique.»
Éric Zemmour en serait presque admiratif : «L’idéologie laxiste dominante qui a conduit aux attentats a réussi à retomber sur ses pattes et à faire croire que le plus grand danger serait l’amalgame.»
Le polémiste, dans la même veine, a dénoncé une perversion du débat : «On ne me dit pas « vous avez tort », on me dit « vous êtes méchant ».»
Interrogé sur sa misogynie supposée, il a argumenté : «J’ai simplement souligné que notre société a détruit le patriarcat. Et en supprimant la loi du père, on est tombé dans le caprice permanent, la dictature du bonheur née de la féminisation de la société. Entre l’individu-roi et l’univers, plus rien n’existe désormais.»
Regrettant enfin «une Europe de pouvoirs oligarchiques qui organisent le continent sans tenir compte des peuples »,Zemmour a conclu sur une note nuancée : «La raison me fait penser que les gaules sont pliées. Mais on s’est remis de 1870, de 1940, alors j’espère…»