Quelle gifle monumentale à la conception du service diaconal dans la plupart de nos églises aujourd’hui face à ces kehilot (terme hébreu pour églises) des temps apostoliques, d’une réelle efficacité, en mouvement et en croissance permanente, et de quelle façon et avec quels fruits. Lequel parmi nous oserait comparer la plupart des services diaconaux d’aujourd’hui à cela ? Savez-vous où réside le secret ? Nous le trouvons encore à travers les chiffres.
Chapitre 6 des Actes, verset 2 : « Les douze convoquèrent la multitude de disciples, et dirent : Il n’est pas convenable que nous délaissions la Parole de D.ieu pour servir aux tables. ».
« Les douze convoquèrent… » Je ne vous apprendrai rien en vous disant que 12, cela fait trois fois quatre, ni en vous rappelant une fois encore que trois représente les trois personnes de la divinité, Père, Fils et Esprit, ni que le chiffre quatre représente l’accomplissement.
3 x 4 qui font 12 peut donc signifier que les trois personnes de la divinité accomplissent ou plutôt que le D.ieu « Ehad »*, si vous préférez, accomplit. Si c’est le D.ieu « Ehad » qui accomplit, bien sûr les choses sont accomplies parfaitement.
C’est donc le parfait accomplissement de D.ieu à travers douze hommes qui va établir sept diacres.
Nous pourrions continuer ainsi longtemps avec ces chiffres et découvrir bien des choses. En considérant par exemple le nombre 12 si nous additionnons les chiffres qui le forment, le 1 et le 2, nous retrouvons le 3. Il n’y a pas de hasard.
Si nous attribuons le chiffre 1 à l’une quelconque des personnes de la divinité (le Père par exemple), et que nous considérons le chiffre 2 du même nombre douze, nous pouvons décider qu’ils sont intrinsèquement liés dans ce nombre douze et que le 3 (addition de 1 + 2) se confond avec le 1 du Ehad.
Douze Apôtres, représentant la parfaite volonté de D.ieu, imposèrent les mains à sept diacres. Et savez-vous pourquoi ces douze Apôtres représentaient dans le conseil qu’ils donnèrent au peuple l’accomplissement de la parfaite volonté divine en matière de choix de diacres ? Parce qu’ils avaient été eux-mêmes tous les douze des diacres.
N’ont-ils pas suivi Jésus pendant trois ans en tant que disciples et diacres ? Jésus n’était-Il pas en Lui-même et à tous égards un accomplissement (le chiffre 4…) ? Voici encore l’omniprésent et « lancinant » 3 x 4 qui fait 12.
Ces douze Apôtres servirent le pain, le poisson, partirent s’enquérir d’un ânon, allèrent à la pêche pour trouver dans la bouche d’un poisson de quoi payer une taxe et s’acquittèrent probablement de mille et une autres tâches, durant ces trois années au contact du maître de l’accomplissement.
Nous ne savons rien de celui qui remplaça Judas, mais nous pouvons et devons penser que probablement il passa par la même école, d’une façon ou d’une autre. Notons au passage que celui qui fut appelé le fils de perdition avait probablement reçu la tâche la plus élevée et la plus délicate dans les postes diaconaux : la gestion des finances. Méditons à ce sujet…
J’ai pour ma part connu dans ma toute jeune vie chrétienne où j’avais été appelé au ministère diaconal des tribulations plus que comiques face à un faux diacre, en titre mais non de cœur, un homme orgueilleux, épris au fond de succès, de reconnaissance et recherchant insidieusement, comme il le faisait en chaque chose, le poste le plus élevé en matière de diaconat. Un non-sens absolu, le diaconat étant non pas seulement l’école de l’humilité mais la démonstration de celle-ci et d’un esprit de service sans corruption réellement et harmonieusement installé dans le cœur brisé de l’enfant de D.ieu authentique.
Le diaconat devrait, comme nous le voyons dans l’Écriture, ne pas être une fonction dans laquelle le chrétien s’installe (quelquefois à vie car on l’y relègue souvent « à défaut d’autre chose »), mais le diaconat devrait toujours être envisagé comme une étape cruciale de formation et de révélation du caractère de l’individu. Une étape par laquelle tout ministère, tout croyant quel qu’il soit, devrait nécessairement passer d’une façon ou d’une autre.
La conception du service diaconal dans la plupart de nos églises, qui est le plus souvent une voie de garage pour chrétiens en éternelle phase d’immaturité ou de sous-développement spirituel, voire de sous-développement en terme de consécration, est une catastrophe, une honte, au regard de ce que nous démontre l’Écriture. Cette conception-là du diaconat est le reflet et la preuve flagrante de l’existence d’une structure, d’un esprit pyramidal et de ses aveuglements devenus normes dans trop d’églises locales. En haut de la pyramide : le Pasteur, talonné et agacé souvent de près par les « anciens », le peuple ensuite et les diacres enfin en queue de peloton.
Combien je jouis quelquefois paisiblement du souvenir enamouré de cette période peut-être la plus joyeuse et la plus paisible de toute ma vie chrétienne, celle où j’accomplissais de bon cœur, comme un enfant, des tâches diaconales au cours des premiers temps de ma vie de croyant né de nouveau. Croyez-moi, ce fut peut-être la période de ma vie où la présence de D.ieu se fit sentir la plus proche, la plus délectable. Je ne parlerai pas ici en termes de Gloire, de Prodiges ou de Miracles avec un grand M creux… Je parle en termes de joies ineffables et d’intimité avec D.ieu.
Jésus n’a-t-Il pas dit : « … et si vous ne devenez pas comme les petits enfants, vous n’entrerez pas dans le royaume des cieux » (Matthieu 18, v.3) ?
Jusqu’à aujourd’hui, pour m’attacher à la valeur spirituelle d’un ministère, je cherchais à connaître :
s’il est ou a été persécuté
s’il est marié, à observer si ce relationnel est biblique ainsi que celui qu’il entretient avec ses enfants et autrui de façon générale et nous en sommes loin très souvent, croyez-moi (Voyez mon livre « EHAD »).
J’ajouterai à présent une question :
« Dis-moi, mon frère, as-tu été un diacre joyeux comme un enfant dans l’intimité de son père ? »
N’oublions pas non plus que Jésus, s’il fut plus que probablement « diacre » de son père nourricier qui était charpentier, fut durant tout son séjour terrestre diacre permanent aux ordres de son Père céleste, ne faisant rien que ce que son Père lui demandait de faire. Et c’est bien pourquoi il put être finalement tout à la fois apôtre, prophète, évangéliste, pasteur et docteur, et bien plus encore, souverain sacrificateur de sa propre vie et enfin Roi en gloire !
Nous sommes appelés au même chemin et cela commence dans le diaconat. La clé, le secret d’un diaconat réussi est simple, c’est accepter d’être souverain sacrificateur de sa propre vie, de mourir, d’emblée et au départ de tout. Mourir par amour et d’amour pour son D.ieu. Quel est, ou bien sont, notre ou nos dieux ? C’est cela la clé. Une authentique conversion y conduit ! C’est également la condition qui accompagnera l’appel à tout ministère, toute fonction, quelle qu’elle soit, je le répète. Tout le reste n’est que tragique calembredaine qui vous transformera un jour ou l’autre, non pas en statue de sel, mais pire encore peut-être, en statue de bronze, en monument inutile à la gloire de l’homme.
Et si le guano du pigeon souille toujours un jour ou l’autre ces statues-là, le temps et le recul qui peuvent être un guano redoutable finiront toujours aussi par mettre en lumière ce que nous avons réellement été. Toujours, quelles que soient les apparences immédiates. Comme le disait un vieux serviteur anglais au jeune serviteur bouillant et saturé du Saint-Esprit que j’étais : « Mon jeune ami, n’oublie pas ceci : L’essentiel n’est pas de savoir comment tu commences, mais comment tu finis. »
Je dis : plus un diaconat a été profond dans ses racines, plus le ministère ou le service qui le suivra, quel qu’il soit, sera solide, résistant, éprouvé et puissant, source de vie et non de mauvais soucis pour autrui. Vous pouvez être aussi une source « de bons soucis ». Mais c’est une tout autre question.
Comment sommes-nous parvenus à déformer à ce point la vision du service diaconal dans nos églises ?
Je ne prétends pas ici faire une étude de l’évolution plus que probablement chaotique et étrange de cette fonction ecclésiale durant les presque deux mille ans écoulés. En creusant, on devrait bien entendu trouver des « perles ». Bonjour pauvre Quasimodo, débile bredouillant sous la férule d’un terrible abbé Frolo chez Victor Hugo. Pauvres bedeaux de l’Église en certains temps pas si lointains. Sinistres vestiges caricaturaux de l’admirable modèle premier que l’on trouve cependant décrit si spirituel dans les Actes.
Mais je voudrais encore néanmoins toucher deux ou trois points qui pourront, je le crois, nous éclairer, nous instruire.
La raison me semble-t-il fondamentale de l’évolution dégénérative du concept et de la manifestation du service diaconal dans l’église est à mettre en relation avec une vision du monde qui n’a plus rien de juif mais est, ô combien, devenue grecque au fil des âges.
Jésus était juif. Les Apôtres étaient juifs. Il n’est pas inutile de le rappeler, car j’ai entendu dans la bouche d’un ancien, je parle de son âge, qui remplissait la tâche pastorale « par défaut » dans une assemblée de deux cents personnes du Nord de l’Italie, que jusqu’au moment où il m’avait rencontré, il avait toujours cru que seul Judas était juif et que Jésus, les douze Apôtres, Joseph, Marie, etc., étaient tous … catholiques ! Ben voyons !
Cet homme, malgré trente, trente-cinq ans de cheminement avec la Bible, en était resté là. J’ose espérer que ce genre de méconnaissance, d’ignorance biblique, fruit de l’antisémitisme acharné d’une bonne part de la chrétienté pendant des siècles, est rare, mais n’en suis pas certain, hélas.
Qu’y a-t-il au niveau de la vision du monde dans la culture juive de radicalement différent de la conception du monde dans la culture des Gentils, en ce qui nous concerne ici, c’est-à- dire le diaconat ?
Dans la culture juive, il n’existe que fort peu cette espèce de séparation mentale accompagnée le plus souvent de mépris entre le travail manuel et le travail intellectuel. J’ai quelquefois vainement tenté d’expliquer à certains – et c’est pourtant aisé à comprendre, me semble-t-il – que, de la même façon qu’il existe des travailleurs manuels dotés d’une profonde intelligence, il existe des intellectuels stupides. Je ne sais pas pourquoi la plupart des gens ont une difficulté à admettre cela. Peut-être parce qu’il ne sont pas sûrs d’eux-mêmes. Complexes de supériorité et d’infériorité aux sources socioculturelles évidentes ? Plus ? Ailleurs ? Mais quoi ? Discours dominants et snobinards récurrents dans la montée de la domination bourgeoise en tant que sous « aristocratie moderne » depuis la Révolution française ?
Je ne crois pas que l’on naisse intellectuel ou manuel. Je crois que l’on naît et que l’on devient quelque chose, quelqu’un et que les mille et une raisons des choix intellectuels qui nous mèneront ici ou ailleurs et toujours à une place unique finalement sont tellement complexes qu’il est vraiment idiot et superflu de résumer le monde des humains en deux catégories faites d’un côté de manuels et de l’autre d’intellectuels.
Cela n’a évidemment pas de sens. Ne serait-ce que par le fait que nous sommes tous appelés à poser des centaines d’actes manuels au cours d’une journée. Simplement écrire ce livre a requis de moi une activité intellectuelle soumise au Saint-Esprit et une série de gestes manuels innombrables de ma part, de la part de mon épouse et de toute une série de personnes par la suite : metteur en page, graphiste, imprimeur, manutentionnaires, etc. Merci à eux d’ailleurs !
Cette dichotomie étrangement entretenue à travers les mentalités et les comportements est au fond absurde et le signe profond d’une forme de décadence morale. Un signe de faiblesse de notre civilisation.
* Voyez mon interprétation du « Ehad » dans le livre « Bénédiction du Père, bénédiction des pères » paru aux Editions RDF et mieux encore dans mon livre « Ehad » paru aux Editions EHAD.