Chapitre 1 – Israël a raté sa mission… l’Église aussi !
« Israël a raté sa mission », s’exclamait un vieil homme au cours d’un repas amical auquel participait ma femme voici quelques années, à l’ombre d’une synagogue, quelque part dans le Sud de la France.
Selon ce que me conta mon épouse, un profond chagrin avait subitement alors envahi le cœur de cet homme et amené un grand silence ému parmi les convives.
Du point de vue de ce vieillard juif, Israël qui devait apporter la lumière à toutes les nations n’a pas accompli sa mission. Terrible, mais honnête et lucide prise de conscience ! Et quand bien même Israël aurait voulu apporter cette lumière et voudrait le faire encore aujourd’hui, le Temple de Jérusalem, temple qui représentait le centre de la vie juive ayant disparu en 70, phare judaïque essentiel qui attirait, souvenons-nous en, à lui des milliers de prosélytes venus de partout, le traumatisme subi par le peuple juif depuis a mystérieusement brisé cet élan. La position officielle des Juifs religieux, du judaïsme rabbinique, n’est d’ailleurs nullement prosélyte, au contraire.
Ni le judaïsme du Temple, ni par la suite le judaïsme rabbinique, avec tout le développement des commentaires rabbiniques que l’on trouve dans le Midrach et le Talmud (c’est-à-dire la Michna et la Guémara), n’ont donc apporté la lumière aux nations. Mais précisons quand même que l’un comme l’autre ont apporté des choses d’un réel et précieux intérêt, avec autant de perles à prendre pour alimenter notre faim de comprendre nos racines qu’avec de la prudence parfois. Le judaïsme rabbinique risque d’entraîner des êtres imprudents, immatures dans des zones spirituelles dangereuses qu’il faut bien qualifier par moment d’occultes. La racine de ce mal est l’orgueil religieux et l’orgueil tout court, denrée universelle et donc universelle, juive, mais tout autant chrétienne.
Cher vieil homme, ta détresse était grande, mais sincère et courageuse. Certes, tu ignorais, ou ne pouvais pas tenir pour significatif qu’une bonne partie de tes frères juifs, il y a bientôt 2000 ans, prirent le flambeau, après l’événement considérable de la fête juive de Shavouot appelée « Pentecôte » dans le Livre des Actes, et le transportèrent dans une vision de le communiquer à tous les peuples. Le judaïsme paulinien des disciples du Mashiah Yeshoua, celui de Pierre et des autres était né et commença à se répandre chez les Juifs en Israël et parmi les nations, et puis ensuite chez les Gentils des nations. N’oublions pas que Paul, l’apôtre des Gentils, se rendait pourtant toujours prioritairement vers les communautés juives qu’il rencontrait lors de ses périples dans la galout*. Paul, apôtre des Gentils, resta profondément juif !
S’il faut s’en convaincre, relisons l’épisode où Paul fut lié par un vœu en Actes 18 v.18. Plus tard, très vite finalement, ces Juifs messianiques durent céder peu à peu la place à un nombre croissant de non-Juifs devenus des chrétiens. Ils devinrent peu à peu la grande assemblée, la grande Kehila. Ils devinrent l’Église.
Plus tard encore, cette assemblée, cette Kehila, cette Église qui se réclamait toujours du Messie ou Christ Jésus, deviendra une aventure, une épopée qui ressemblera de moins en moins à ce qu’elle était au départ. Elle deviendra une entité pagano-chrétienne de plus en plus tragiquement éloignée de ses sources tout en copiant quelquefois de manière caricaturale les apparences**, au point de susciter de grands mouvements réformateurs que nous connaissons tous. Au point de susciter aussi de grands mouvements de réveil dont nous avons tous entendu parler, les frères Moraves, les Quakers, les réveils de 1903 et 1906 dans le monde américain et anglais par exemple, et tant d’autres connus et pour beaucoup d’autres mal connus voire méconnus, ici ou là étouffés voire massacrés. Au point de restaurer l’esprit de Shavouot/Pentecôte largement répandu à nouveau en ces 20ème et 21ème siècles.
La lumière et les ténèbres ont mené là entre elles, durant des siècles, un jeu féroce, et ceci explique cela.
J’ai le sentiment ici d’être presque iconoclaste en écrivant si brièvement une Histoire qui fut si riche et mouvementée, tellement riche ! Qu’on me pardonne. Mais retenons l’essentiel. Les nations, les peuples, les civilisations passent, mais le déroulement du plan de D.ieu dans l’histoire de l’Humanité à travers Israël et l’Israël messianique qui côtoya le temple toujours dressé, ensuite relayé historiquement, bien et mal selon, par une autre entité, l’Église, ne passe pas.
L’heure est à présent au retour des fils d’Israël dans la Kehila universelle et avec quelles conséquences ? Lisons Romains 11 v.15 : « Car si leur mise à l’écart a été la réconciliation du monde, que sera leur réintégration, sinon LE PASSAGE DE LA MORT A LA VIE ».
Passage de la mort à la vie ? Pour qui, pour eux ? En première lecture, oui ! Mais plus profondément, pour tous ! Et tout autant, et c’est le plus important, pour des principes divins édulcorés durant des siècles de christianisme largement anti-juif.
Comment ? C’est ce que nous allons essayer de comprendre. Il y a là quelque chose d’éminemment prophétique et qui doit être reçu dans un esprit de révélation, avec humilité. Quelque chose que nous devons tous saisir aujourd’hui ! C’est vital.
L’heure est pour les Gentils de la Kehila de les voir (re) venir, ces frères juifs, avec humilité et sensibilité, car plus encore que des remises en question profondes, leur retour va signifier une restauration absolument inattendue, un temps prophétique capital pour la plupart des Gentils mais aussi pour bien des Juifs messianiques christianisés, « gentillisés », ou ce qui est erroné pour les adeptes du judaïsme messianique juste préoccupé de reproduire, en fin de compte, un judaïsme rabbinique formaliste sous illusion d’authenticité.
C’est à une réforme nécessitant une révélation/révolution (à ce jour largement voilée et pourtant présente en ligne directe dans la Bible) concernant tout le fonctionnement, (identité et destinée) du corps des croyants, ministères et autres éléments, que nous sommes conviés, Juifs et Gentils.
Romains 11 v.15 : « Car si leur mise à l’écart a été la réconciliation du monde, que sera leur réintégration, sinon le passage de la mort à la vie ».
Et si tout finira par s’accomplir malgré une évidence certaine, l’imperfection des hommes, tout s’accomplira néanmoins dans le cadre d’un grand dessein divin qui va de la chute à la Jérusalem céleste. Il est évident que le plan de salut de l’humanité devait se trouver inscrit dans le cœur de D.ieu dès avant la création du monde. D.ieu est omniscient. Son omniscience contient tous les possibles et leurs variables à l’infini.
Dites-moi, que pensez-vous de l’aveu tragique effectué par ce vieillard juif dont je vous parlais voici quelques lignes ? En tant que membre de la Kehila universelle, j’entends, moi, aujourd’hui ce même cri résonner au fond de mon cœur pour l’Église. Ce cri est un soupir, une plainte, quelque chose d’inexprimable que l’Esprit murmure sourdement en moi : l’Église elle aussi a raté sa mission.
Très étrangement, bien qu’en tous lieux de la dite Église une activité fébrile, et un activisme extraordinaire même, ce qui est moins bien, pourraient nous donner l’illusion que l’Église est dynamique et vivante, porteuse de nombreux fruits, et elle l’est, assurément, en bien des lieux, il y a « dans le fond de l’air » et tout au fond de nos cœurs, comme une fatigue et une frustration immenses accompagnées cependant d’une espérance qui n’est pas négligeable en ce qu’elle annonce prophétiquement.
L’assurance intuitive et même prophétique que quelque chose de bouleversant se prépare pour l’Église est là. Quelque chose qui culminera avec le retour de Yeshoua en gloire, lequel retour sera précédé d’une restauration toujours plus grande d’un leadership juif dans l’Église.
Beaucoup ont prophétisé que « Monseigneur » Lustiger serait le prochain et dernier pape de l’Église catholique romaine. Je ne suis pas en phase avec le catholicisme romain, mais la question n’est pas là. Ce que je veux exprimer ici en relevant la chose, c’est qu’à travers toutes sortes de signes dont nous n’avons même pas idée, toutes sortes de bouleversements dans l’Église et parmi les nations, c’est toute notre conception de l’Église elle-même et du gouvernement des peuples qui va être bousculée à des profondeurs aujourd’hui insondables, avant, pendant, et après le retour du Seigneur. Si Lustiger, juif et catholique, pouvait être, s’il devenait pape romain, considéré comme le faux prophète, que penser de la puissance de la révélation que D.ieu veut amener dans Son Église en y ramenant des Juifs qui ne soient pas une caricature de chrétiens ni une caricature d’un judaïsme rabbinique formaliste ? Celui-ci étant hélas idolâtré dans certains milieux messianiques au point de conduire plusieurs à renier la divinité de Yeshoua, voire celle du Saint-Esprit que j’ai vu méprisé par certain « Rabbin* » messianique. Je suppose que « Pentecôte » cela fait trop chrétien pour certains.
Mais voyons, Pentecôte, c’est Shavouot en plénitude, non ? Je crains fort que dans certains milieux, à la haine (le mot n’est pas trop fort, hélas) séculaire manifestée dans une bonne part de l’Église à l’égard des grands frères juifs, on oppose à présent une haine inavouée mais perceptible sous forme de mépris à l’égard des chrétiens. Cette « haine »-là se développe sur le terreau de l’ignorance et tout au fond sur un manque d’assurance débouchant sur un orgueil compensatoire. Le mépris est alors favorisé et accompagne le non-pardon. Les deux aliènent et conduisent à la catastrophe, aux fausses doctrines, aux dérives sectaires, à la mort spirituelle. L’amour persévérant, commandement central de la Loi, est la seule coque de navire capable de nous conduire hors des dérives. C’est cet amour d’autrui qui donne recul et prémunit des pièges sectaires. Ne l’oublions jamais, car la philosophie de l’amour parfait procède du D.ieu d’amour qui nous a sauvés. C’est bien encore et toujours l’événement essentiel de notre existence, Juifs et Gentils, non ? Dès lors tout ce qui nous éloigne de cet axe d’amour parfait ouvre la porte à la mort, au jugement et au retrait de D.ieu de nos vies. Quelles que soient la conviction de nos gesticulations, cela ne changera rien à l’affaire !
Mais revenons à l’essentiel de notre message. Nous sommes devant quelque chose de grand, de considérable qui risque bientôt de nous faire voir, et en peu de temps, le fonctionnement même de nos églises comme souvenirs quelque peu désuets tant nous comprendrons la vacuité de nos errements passés.
Nous allons assister à la plus grande des réformes et d’une façon que peu avaient envisagé.
Celles d’un Luther, d’un Calvin et d’autres, furent capitales pour la survie de l’Église et le redéploiement de ses forces et de son message essentiel, savoir : le salut par la foi en Jésus-Christ. Mais ces réformes-là sembleront vite minimes au regard de ce qui vient et de ce qui est déjà en train de se jouer d’ailleurs, en ce moment même.
Dans ma pensée, déclarer que l’Église a raté sa mission ne revient pas à manifester une mentalité négative, mais revient à laisser vivre en moi un débat intérieur sur le « pourquoi », le « comment » et le « que faire, Seigneur ? » qui ronge le cœur de tout chrétien sincère face à beaucoup de choses qui ressemblent à un grand trouble aujourd’hui, et par ailleurs de grands bouleversements positifs, créatifs à venir dont il convient de saisir les ressorts profonds. Quelque chose d’étonnant se bouscule au fond de mon cœur, comme un bouillonnement prophétique qui me permet de prendre appui avec jubilation sur cette déclaration : « L’Église a raté sa mission », mais cela est révélé parce que quelque chose de très grand est en train de se préparer et de se vivre déjà dès aujourd’hui. Je n’en veux pour témoin que l’éclosion tellement rapide un peu partout en ce moment de quelque chose qui n’était encore que le fait d’une minorité il y a quelques années. Le temps n’est pas loin où (il y a seulement quelques années) je pratiquais devant cent quarante chrétiens une ouverture de shabbat à Valence (France) et où je m’attirais de très, très hostiles réactions du corps. Réactions qui me coûtèrent cher en terme d’incompréhension, d’hostilité à fleur de peau, de coups bas et de calomnies. Si vous êtes engagé dans une démarche prophétique en tant que leader, assurez-vous que votre entourage est capable de vous suivre. Une démarche prophétique authentique est kedosha (sainte). Si les gens que vous avez autour de vous ont des lacunes de ce point de vue, soyez assurés qu’ils deviendront de terribles instruments de Satan contre vous. Prudence et sagesse si vous avez à construire une tour ! (Luc 14 v.28). Et attendez-vous pourtant toujours à des surprises.
Je suis donc en train d’évoquer la redécouverte et de la reconnaissance des racines juives de notre histoire judéo-chrétienne. Et cela dans le même temps où l’antisionisme et l’antisémitisme tracent dans nos sociétés de véritables autoroutes que l’on aurait cru ensablées pour toujours depuis le terrible épisode de la Shoah.
Des forces colossales et parfois contradictoires traversent l’Église comme les peuples aujourd’hui, en les sommant de faire un choix. La Terre craque de partout autour de la question juive, et craquera de plus en plus, jusqu’à ce que s’accomplisse tout ce qui doit s’accomplir comme l’Écriture nous l’annonce. D.ieu nous presse à ce sujet. Même le gouvernement et le peuple d’Israël, si lents à saisir les chances historiques que D.ieu leur a données depuis 1948 de construire un état bien plus souverain qu’il ne l’est, sont interpellés par D.ieu.
Ainsi lors du dernier tremblement de terre à Jérusalem en mars 2004, c’est d’une part le bureau (à la Knesset) d’Ariel Sharon, le Premier Ministre, et la rampe d’accès au Mont du Temple près du Kottel (mur de prière des Juifs à Jérusalem et vestige du mur de l’esplanade du Temple) qui ont été les plus touchés. D.ieu parle de Sa souveraineté sur ces lieux et de la trop grande distance tenue par les Israéliens, leur timidité, face à cela. Elle est immense et déroutante. Songez qu’en 1967 les paras israéliens reprirent la vieille ville de Jérusalem et le Mont du Temple occupés par les Jordaniens et l’Islam. A cette époque, le monde arabe était tétanisé par le choc de la défaite et il était plus que simple de restituer le Mont du Temple à la vie juive. Selon ce que je sais partiellement, c’est sous l’influence humaniste de Moshé Dayan que cela n’a pas eu lieu. Il y a tant d’autres exemples !
J’aimerais dire ici qu’il existe une relation entre la position à prendre vis-à-vis d’Israël aujourd’hui, et le fait de vivre dans la plénitude de sa révélation la prochaine réforme de l’Église qui est déjà en marche pour qui sait voir d’un peu loin.
Nous avons à faire un choix : prendre position pour Israël et vivre cette réforme riche et abondante qui vient, car nous sommes greffés sur un olivier franc. Vivre cela comme jamais nous ne le fîmes, tout en étant au bénéfice de richesses non encore reçues, car Paul nous dit, je me répète : « Que sera leur réintégration, si ce n’est le passage de la mort à la vie… » Romains 11 v .15, ou nous éloigner de ces choses par indifférence, voire hostilité et y perdre tant, pour subsister, isolés bientôt dans une coquille religieuse creuse, vaine et, n’ayons pas peur des mots, sous une malédiction qui perdurera et culminera dans un jugement.
Or le temps de la restauration des fils d’Israël qui découvrent toujours plus nombreux la messianité de Yeshoua est là, chaque jour un peu plus. Quelque chose de tout à fait particulier se déroule en Israël depuis trois ou quatre ans. Le nombre des assemblées juives messianiques y a littéralement explosé. Comme je viens de l’écrire plus haut, voici une année je fus convoqué solennellement par l’Éternel à venir prier à Jérusalem chez des amis pendant presque une semaine. Ce que D.ieu me révéla pendant cette semaine revêtit pour moi un caractère de grande solennité. J’eus le sentiment très net en priant et méditant, que je pourrais un jour payer de ma vie ce qui allait venir sur Jérusalem.
Qu’allait-il venir sur Jérusalem et sur Israël ? Et ce serait bientôt !
Le Seigneur m’annonça que l’onction apostolique allait y être bientôt rétablie et que la restauration de cette onction serait digne de celle qui présidait dans le Livre des Actes après Shavouot/Pentecôte .
Ces choses sont en passe d’arriver, et si nous vivons personnellement une partie de l’année en Europe pour y implanter groupes de prières et églises dans une pensée apostolique et messianique, nous vivons l’autre partie de l’année à Jérusalem.
Voici donc jetées quelques bases pour entamer une réflexion positive et non pas négative, à partir d’un cri du cœur que nous pourrions pousser aujourd’hui comme le vieillard juif du Sud de la France en début de ce chapitre à propos d’Israël. Et ce cri est bien : « L’Église a raté sa mission ! »
Si la Réforme a rejeté le culte des idoles, la mariolâtrie, le culte des saints, et tant d’autres choses manifestement non-bibliques, la Réforme de Luther, Calvin et d’autres s’est aussi arrêtée en trop bon chemin, semble-t-il. Elle s’est même parfois inversée, cette Réforme, reniée chez Luther par exemple à certains égards, hélas. A l’égard des Juifs par exemple qu’il trouva plutôt sympathiques aux débuts* et qu’il exhorta furieusement à détruire ensuite de façon nettement moins sympathique.
La découverte ou la redécouverte des racines juives de notre foi qui aurait pourtant pu avoir un effet capital n’a pas semblé être saisie par les réformateurs de façon déterminante, loin de là. Cette redécouverte aurait pu conduire l’Église dans un temps de repentance et de restauration qui aurait aussi soulevé, dégagé un voile de malédiction. Mais le temps n’était pas venu et cela ne fut peut-être finalement que le fait de quelques hébraïsants isolés et étouffés dans la masse et dont il n’est pas du tout évident qu’ils aient plongé leurs regards jusqu’au fin fond de ce mystère réservé, je le crois, à notre temps.
N’oublions pas que ces Réformateurs étaient issus d’un monde catholique et humaniste (voyez les écrits d’Erasme par exemple pour comprendre l’air du temps). Un univers qui pratiquait un profond mépris ou de l’indifférence dédaigneuse pour le peuple juif, accompagné pour le peuple et tout le bas clergé en tout cas d’une ignorance abyssale de ce même peuple-racines, de son identité et de sa destinée prophétique. N’oublions pas non plus qu’une immense partie de la planète n’avait pas encore entendu parler ni du D.ieu d’Abraham ni de l’Évangile. La doctrine de la substitution, savoir que l’Église était le « nouvel Israël », un « Nouveau Monde », jouait de toute évidence un rôle majeur dans les schémas intellectuels de ces hommes*.
A l’apogée de son dérapage, Luther n’écrivait-il pas : « Premièrement, on devrait mettre le feu à leurs synagogues… Deuxièmement, on devrait de la même manière casser et détruire leurs maisons… Troisièmement, on devrait les priver de leurs livres de prière et de leurs Talmuds… Quatrièmement, on doit interdire à leurs rabbins, sous peine de mort, d’enseigner encore… Cinquièmement, on devrait interdire absolument aux Juifs les passeports et les privilèges de voyage… Sixièmement, on devrait les empêcher de pratiquer l’usure (facturer les intérêts sur des prêts)… Septièmement, qu’on donne aux Juifs et Juives, jeunes et forts, le fléau, la hache, la houe, la bêche, la quenouille et le fuseau et qu’ils gagnent leur pain à la sueur de leur nez… Nous devrions éconduire les os paresseux et retors hors de notre système. Par conséquent, débarrassons-nous d’eux… Pour résumer, chers princes et nobles qui avez des Juifs dans vos domaines, si ce conseil de ma part ne vous convient pas, alors trouvez-en un meilleur, afin que vous et nous soyons libres de ce fardeau diabolique insupportable : les Juifs » ?
Quelle horreur, et penser que cela vint sous la plume ou entre les lèvres d’un ennemi éclairé de Rome, d’un Réformateur . Pourtant dans sa rupture avec l’Église catholique, Luther s’était tourné avec bonté vers les Juifs. Il mit en relief le fait que Jésus était né juif et il se mit à espérer une conversion des Juifs. Il écrivit : « Peut-être attirerais-je quelques-uns de ces Juifs à la foi chrétienne. Car nos fous – les papes, évêques, sophistes et moines – les grossiers imbéciles ! ont jusqu’à cette époque traité les Juifs de telle manière que… si j’avais été un Juif et avais vu de tels idiots et imbéciles diriger et enseigner la religion chrétienne, j’aurais préféré être une truie plutôt qu’un chrétien. Car ils ont traité les Juifs comme s’ils étaient des chiens et non des êtres humains. »
Ceci a été écrit en 1523. Vingt ans plus tard les Juifs ne s’étant pas convertis en masse, Luther, vieux et malade, changea son discours. Citons encore cette phrase terrible écrite après avoir lu de la littérature antichrétienne écrite par des plumes juives : « Que ferons-nous, chrétiens, de cette race de Juifs, damnée et rejetée ? » Avec de terribles mots, Luther préparait une autoroute pour celui qui allait créer un faux miracle économique à l’aide d’autres autoroutes à construire dans une Allemagne ébranlée par la crise des années 30 : Adolf Hitler. La suite est connue. Elle fut à son apogée, à travers la Cristal Nacht, les pogroms, Auschwitz ou Treblinka, l’incarnation des paroles de Luther.
La Réforme, c’est-à-dire en fait une partie de l’Église catholique dissidente, a combattu les propres démons doctrinaux de son époque, et en a vaincu quelques-uns. Mais faute d’avoir vaincu un des plus graves démons du christianisme de leur temps et de ce temps : l’antisémitisme, au mépris de pans entiers de l’Écriture, la Réforme a failli. Relisons entièrement Romains 11 par exemple. Extrayons de ce simple verset 29 de ce même chapitre :
« Car les dons et l’APPEL de D.ieu sont irrévocables ». Un texte qui est à lui seul suffisant.
Relisons l’abondante littérature prophétique bienveillante à l’égard d’Israël, et non encore accomplie de l’Ancien Testament, etc.). Au mépris d’une alliance solennelle jamais réfutée entre l’Éternel et Israël, les Réformateurs ont été plus que partiellement aveuglés sur les desseins profonds de D.ieu concernant l’Église et ses structures bibliques.
L’Église et ses structures bibliques ! Nous y voilà !
* Galout : terme désignant le monde de la diaspora juive.
** La théologie du remplacement a curieusement conduit l’Eglise catholique à reproduire en les réinterprétant un nombre important de signes appartenant au judaïsme, à la liturgie du Temple par exemple. Il suffit d’observer la distribution géographique des lieux et leur fonction depuis le fond d’une église catholique jusqu’à son extrémité nord, là où réside le tabernacle avec le « saint-sacrement », une évidente redite du Saint des saints dans le Temple, pour le comprendre de toute évidence. Et ce n’est qu’un exemple parmi une abondance d’autres.
* Une remarque insistante au passage : Que faisons-nous du commandement de Yeshoua : « Que personne ne vous appelle Rabbi ou Rabbin » ce qui signifie Maître.
* N’oublions pas que les temps de Réforme furent précédés et traversés des travaux et de l’influence d’hébraïsants notoires dont Mélanchton par exemple et dont l’audience n’était sans doute pas négligeable.
* L’esprit de La Renaissance (redécouverte des valeurs greco-romaines) n’est pas loin, ne l’oublions pas, ni l’époque des grands voyages de découvertes avec cette vision d’un élargissement du champ mental de l’Europe vers l’Ouest, l’Eldorado , le « Nouveau Monde », loin de l’ancien qui a des racines judéo-chrétiennes et dont le point de départ est pourtant le monde sémite d’Abraham et de Yeshoua. Dont le point central de départ (et d’ailleurs de retour ) est et sera Jérusalem.