Lorsque le président Barack Obama a nommé Robert Malley conseiller de la Maison Blanche pour le Moyen-Orient, il a fait un bras d’honneur non seulement à Netanyahou, mais également aux responsables de la communauté juive américaine.
Robert Malley est à l’opposé de Dennis Ross pour ce qui concerne le processus de paix. Il donne du fil à retordre à Israël quant à sa responsabilité dans l’échec des pourparlers lors du mandat de Bill Clinton, et il estime qu’un dialogue avec le Hamas est crucial pour aboutir à un accord global avec les Palestiniens. Il n’est pas surprenant que les dirigeants de la communauté juive le craignent.
Bien qu’Obama l’ait voulu à la Maison Blanche, le président a été forcé de prendre en compte la campagne menée par les dirigeants de la communauté juive contre sa nomination.
Mais maintenant qu’il est libéré des pressions électorales et qu’il a été défié par Netanyahou, Obama a fait clairement savoir à Israël et à ses partisans que la récréation est terminée. La gestion présidentielle du dossier palestinien pour les deux prochaines années est sur le point de prendre une attitude beaucoup plus agressive.
D’un autre côté, Israël, pour certaines raisons, élabore une vision du monde selon laquelle le président se rapproche rapidement du statut de “canard boîteux”.
Il y a ceux qui pensent qu’il est déjà hors-jeu à Washington. Et, de toutes façons, d’ici trois mois, le parti démocrate va débuter le processus des primaires pour élire son prochain candidat présidentiel et, à partir de ce moment, Obama fera partie de l’Histoire. Tous les regards seront tournés vers le QG de campagne de Hillary Clinton.
Il n’y a donc pas de quoi s’énerver, disent les gens ici. Nous devrions essayer de passer tranquillement les prochains trois mois, former un gouvernement et ensuite, de toutes manières, nous serons à même de torpiller toutes les décisions du président Obama.
En ce qui concerne les affaires intérieures, avec le Congrès actuel, il est vrai qu’Obama ne sera pas en mesure de passer le moindre projet de loi.
Mais pour ce qui est de la politique extérieure, il a décidé de s’investir dans le petit crédit politique qu’il a obtenu en “amenant la paix au monde” et en laissant son empreinte dans l’Histoire.
Un de ses principaux efforts se trouve là où tout le monde a échoué: le Moyen-Orient et plus précisément le conflit israélo-palestinien.
Il y a deux canaux d’action au desk ‘Moyen-Orient” de la Maison-Blanche.
Le premier est “l’initiative européenne” qui planche sur une proposition devant le conseil de Sécurité des Nations-Unies pour une solution permanente au Moyen-Orient. Les Européens élaborent actuellement deux documents de travail.
Le premier évoque une “décision a minima” qui programme un agenda mettant fin à l’occupation.
La deuxième formule, “plus élaborée”, est beaucoup plus détaillée et pose les paramètres en vue d’un accord. Cette version accède à la plupart des requêtes “territoriales et politiques” des Palestiniens, leur accorde un Etat indépendant dans les frontières de 1967 avec une capitale à Jérusalem.
D’un autre coté, elle prend en compte les considérations sécuritaires d’Israël, y-compris la demande de ne pas submerger Israël de réfugiés palestiniens et la reconnaissance d’Israël comme Etat juif par les Palestiniens.
Ces derniers avaient demandé aux Américains un accord permanent qui soit appliqué dans un délai de deux ans, tandis que la formule européenne parle de trois années de négociations avant sa mise en œuvre.
Les Américains n’ont pas l’intention de prendre en considération les documents qui prennent forme en Europe jusqu’aux élections israéliennes. Ce n’est que lorsque le nouveau gouvernement israélien sera connu que les Américains se plongeront dans les documents de telle manière à ne pas avoir, le moment venu, à opposer leur veto à la proposition européenne même s’ils ne votent pas en sa faveur.
Le deuxième canal attend également le résultat des élections. C’est le renouvellement de l’initiative de paix américaine derrière laquelle se trouvera une personne très qualifiée et déterminée qui n’apprécie pas trop le gouvernement actuel: le nouvel homme du président pour le Moyen-Orient.
Les responsables israéliens estiment qu’Obama ne sera pas en mesure d’ignorer le point de vue de Hillary Clinton qui semble être le candidat principal pour la présidence. Et il faudra que Hillary Clinton prenne en compte la composante électorale et elle a sans aucun doute une approche différente à l’égard de l’Etat d’Israël.
Ainsi les gens, ici, vivent dans l’illusion basée sur l’espoir que Madame Clinton, même si elle n’était pas élue, émasculera les initiatives d’Obama.
Je doute cependant qu’Obama, après avoir lu dans le livre de Clinton ce qu’elle pense de son mandat, ait le moindre engagement pour envisager de prendre en compte ses opinions et considérations politiques.
Alex Fishman est commentateur des affaires militaires israéliennes au Yediot Aharonot.