A propos d’ « Apartheid » en Israël, John Kerry devrait mieux s’informer
A propos d’ « Apartheid » en Israël
Par Fr. Yohanan Elihaï
Le 18 août 2013
Yohanan Elihaï, Jean Leroy à l’état-civil, est un religieux catholique né en France qui vit en Israël depuis une soixantaine d’années. Il commence à s’intéresser au peuple juif et à l’hébreu, lors de la Libération de Paris en 1945. A l’occasion de son service militaire qu’il effectue dans le cadre de la coopération à Beyrouth, il a l’occasion de venir en pèlerinage à Jérusalem en 1946. Au Liban, il apprend l’arabe. Il revient en Israël en 1956 et se voit accorder la nationalité israélienne en 1960 ; c’est alors qu’il prend le nom deYohanan Elihaï. Comme religieux de la congrégation des Petits Frères de Jésus, il mène, en milieu israélien, une vie discrète d’artisan en céramique puis d’imprimeur. Durant toutes ces années, il se consacre à une œuvre monumentale : la composition d’un dictionnaire d’arabe palestinien. Il a également rédigé des livres d’étude de l’arabe palestinien, ainsi qu’une méthode d’étude de l’hébreu moderne en français, en russe et en anglais. Enfin, il est l’auteur d’un livre sur l’histoire des relations entre Juifs et chrétiens.
On a oublié, ou jamais vraiment su, ce qu’était l’apartheid.
Dans ce type de régime, on ne se fréquente pas, on habite dans des quartiers séparés, on est séparés partout. Qu’en est-il de l’apartheid en Israël, en général, et là où j’habite, en particulier ? Quelques faits en vrac…
– Des voitures passent près de chez nous en direction de Sur Baher, village arabe, enclaxonnant, en l’honneur d’un mariage, à quoi s’ajoutent des feux d’artifice et de la musique.
– On entend l’appel à la prière du muezzin cinq fois par jour, même le jour de Kippour.
– Des femmes musulmanes très bien habillées viennent dans nos supermarchés faire leurs emplettes.
– Un infirmier arabe, chef de section au grand hôpital a quelques jeunes infirmières juives sous ses ordres. La fille d’un vieux juif roumain a amené son père au bureau afin qu’il demande pardon à cet infirmier pour fausse accusation.
– Deux médecins arabes font la tournée avec trois médecins juifs, comme de bons amis : les deux Arabes parlent arabe entre eux librement, puis passent à l’hébreu avec les Juifs.
– Une voiture s’arrête, deux femmes amies en sortent, une Juive et une Arabe avec son voile : elles blaguent ensemble.
– Récemment, la reine de beauté de l’année était une Arabe chrétienne de Galilée.
– L’équipe de foot qui a gagné la coupe de l’année en Israël est de Sakhnin, village arabe musulman.
– Le médecin arabe, nouveau directeur de l’hôpital de Nahariya, a été choisi de préférence à deux candidats juifs, car “plus compétent”.
– Des députés arabes qui ont été en rapport avec l’ennemi, à Damas en Syrie, sont ensuite revenus à la Knesset, sans être inquiétés.
– Un médecin juif soigne un Arabe qui a été grièvement blessé en tentant de se faire exploser dans la foule. Le médecin dit : « C’était un terroriste, mais à présent pour moi c’est un blessé à sauver ».
– Dans notre dispensaire, nos deux pharmaciens sont Arabes, notre infirmière l’est aussi et porte le voile.
– Au procès du Président de l’Etat, Katsav, le président du tribunal est un Arabe, et l’un des juges est le juge Kara, un Arabe chrétien de Nazareth.
– En cette fin de l’année scolaire palestinienne, dans les villages (et tout près de chez nous), il y a eu des feux d’artifices toute la journée. La radio annonce la raison (l’occasion) et signale que des Juifs se sont plaints du bruit, et le speaker poursuit, sur un ton résigné : « On leur en a fait la remarque, mais… cela n’a rien changé et cela continue. » (Je les entends de ma chambre ce 19 juillet 2012 à 20 h).
– Dans un bus, un soldat se lève pour donner sa place à une femme arabe enceinte. Même geste d’un autre soldat pour une vieille Arabe.
– Au milieu d’un bus israélien, un vieil Arabe parle bruyamment en arabe dans son portable. Personne ne lui dit rien.
– du 17 au 26 février 2013, lors de mon séjour à l’hôpital Hadassa A-K, plusieurs jeunes infirmiers arabes, détendus, blaguent, surtout le soir, et parlent arabe tout haut ensemble.
Deux infirmières voilées, très libres et efficaces. Je n’ai jamais constaté chez elles de différence d’attitudes à l’égard des Juifs qu’elles soignent, ni n’ai entendu ces Juifs se plaindre d’elles.
Une fillette juive qui a reçu beaucoup de cadeaux pour sa Bat-mitswa, va à l’hôpital les distribuer aux enfants malades, y compris aux enfants arabes, tout naturellement.
– le 13-8-2013 – le Ministère de la santé envisage d’ouvrir des lieux de prières pour les Musulmans dans les grands hôpitaux.
Assurément, il y a assez souvent des violences dans les Territoires, où l’ambiance est tendue, mais il ne faut pas généraliser, ni parler d’apartheid en Israël. Il y a des inégalités dans certains cas, hélas, oui ; mais dans quels pays n’y en a-t-il pas ?
Note d’Etzbetzion : effectivement, ce qui est raconté plus haut nous le constatons quotidiennement à Jérusalem où nous vivons. Les Arabes et les Juifs travaillent ensemble et de plus en plus on rencontre des Arabes à des postes importants car ils ont pu faire des études comme les Juifs à l’université. Nous faisons aussi nos achats dans les mêmes centres commerciaux quelquefois très luxueux à Jérusalem. Quant aux violences en Judée et Samarie, on ne peut que les regretter, mais ayant vécu en Samarie dans la vallée du Jourdain et ayant eu quatre fils qui ont fait leur service militaire dans ces régions difficiles, nous pouvons témoigner de l’extrême prudence de l’armée vis-à-vis des Arabes qui y vivent et du respect absolu de la vie humaine. Nos soldats sont astreints à des règles très strictes en cas de conflits, comme par exemple les sommations, puis le tir en l’air avant de tirer lors d’une absolue nécessité dans les les jambes des terroristes d’abord, et en tout dernier recours de les tuer s’il n’y a pas moyen de faire autrement, en cas de danger de mort pour des civils ou des soldats présents sur le terrain. La désinformation dans ce domaine est extrêmement importante et il ne faut pas négliger le fait qu’il s’agit en l’occurrence d’une guerre médiatique bien menée depuis des années par le monde arabe.