Le choc des cultures
« La beauté de Yaphet habitera dans les tentes de Shem ».
Par Rony Akrich.
Le divorce des cultures entre le renouveau d’Israël et un Occident décadent, tant moralement que socialement, est-il inéluctable ? Une réconciliation reste-t-elle envisageable.
Cette question exige au préalable une connaissance des trois champs qui composent la culture occidentale : tout d’abord le monde de la science et de ses dérivés, comme par exemple la technologie, puis, celui de la pensée, de la philosophie et des idées du monde ; le troisième champ se rapporte, quant à lui, à la société des loisirs.
Le Judaïsme et la Torah ne contestent en aucune manière la science et le progrès. Le Maharal de Prague approuve et loue ces hommes de science ayant offert leur sagesse au bien être de la recherche qui fait comprendre l’étendue du projet de la création, échafaudé et exécuté par l’Éternel. La loi du rituel juif impose même la récitation d’une bénédiction originale en présence d’un savant émérite.
Nos maîtres, souligne le Maharal, interpellent leurs élèves pour une plus grande curiosité intellectuelle, voire de tenter d’acquérir des connaissances scientifiques. La Bible, témoin du Projet de D.ieu pour les hommes, confirme cela à travers son propos : “Car c’est votre science et votre sagesse aux yeux des peuples.”
Effectivement, à la faveur de leur calendrier luni-solaire si spécifique et compris par nos Sages, les Hébreux ont su maîtriser les sciences commandant le mouvement des astres et la structure de leur almanach.
Le calendrier grégorien est un calendrier solaire malgré son temps variable au moment de la Pâques alors que l’islam a un calendrier lunaire dont les solennités diffèrent chaque année d’époque. Le Maharal rappelle ce qu’étaient les ânonnements des peuples en la matière et nous remémore sans le citer, Galilée. Le Rav Kook prononcera une célèbre allocution lors de la journée d’inauguration de l’Université hébraïque de Jérusalem; il déclarera que la science avait une infinie valeur et en particulier pour le peuple hébreu ressuscitant sur sa Terre ancestrale après une interminable nuit en exil !
La sagesse des Nations
Il faut que la nation d’Israël s’instruise au déchiffrement des sciences car elles deviendront indispensables au mouvement de renaissance nationale et en parallèle, ne jamais oublier d’assumer et de transmettre aux autres nations nos connaissances, nos valeurs et ce modèle de société dont nous sommes les mandataires en tant que fidèles serviteurs du D.ieu d’Israël dont le Message et la Finalité divine sont une réalité.
L’histoire de Hanouka restera certainement la référence et la réponse du Peuple hébreu sur ce qu’il acceptera ou non de la culture européenne occidentale. Ce drame, à l’époque de Mattathias, permit à l’esprit, la pensée et la culture hellène de pénétrer le sanctuaire du Temple et de souiller les huiles. Ils bouleversèrent la volonté différenciatrice de l’esprit d’Israël, cette manière de vouloir redevenir, un Hébreu.
Les rebelles Hasmonéens affirmèrent qu’il s’agissait d’une erreur concernant la nature essentielle du peuple Hébreu.
La Maison d’Israël est différente des autres nations et chacune peut si bon lui semble adopter d’autres us et coutumes.
Israël ne peut remplacer aucune des composantes de son état national sans causer un dommage irréversible à son être.
L’identité juive n’a nul devenir sans la “Torah”, c’est-à-dire sans la “Constitution” pour être un peuple, une nation et un Etat. L’absence de Torah provoque des dommages irrévocables et Israël se ruine dans la corruption et les tentations plus que toute autre nation.
Peu importe la culture adoptée, rétrograde ou avancée, Israël ne peut s’autoriser le luxe de se fourvoyer dans les artifices étranges et étrangers sans sombrer dans la “haine de soi”.
Par conséquent, le combat d’Israël contre les Grecs ne fut pas une guerre culturelle, mais bien une révolte pour une bataille spirituelle à la vie à la mort.
Les sages enseignent : “La beauté de Yaphet habitera dans les tentes de Shem”.
Concernant la science et des technologies, il est normal d’évoquer la contribution des Nations – “Il existe une sagesse parmi les nations”.
Toutefois, cette sagesse s’avère inopérante lorsqu’il s’agit de la sphère intérieure de la Torah, son éthique, sa perception du monde. Dans ce cadre, la culture et le génie des autres nations générent des dommages considérables. Les fondements de leur monde spirituel sont sensiblement différents de celui des Hébreux et restent menaçants pour l’esprit d’Israël.
Néanmoins la référence à l’œuvre d’art et à l’esthétique prise dans la culture grecque nous permet de prendre en compte l’utilisation d’éléments d’une autre culture que la nôtre.
“Science sans conscience n’est que ruine de l’âme !”
Si l’on veut appréhender la culture occidentale, il faut garder à l’esprit que notre existence en tant qu’Hébreu repose sur un juste équilibre dans chaque détail de la vie. La culture occidentale a glorifié l’aspect matériel de l’existence à l’extrême, de sorte qu’une personne est jugée en fonction de son apparence ou de son compte bancaire. Malheureusement, cette façon de penser a lentement pénétré toutes les couches de la communauté, tandis que l’esprit de sainteté et de la pureté de l’esprit qui découle de notre culture, des sources juives, est poussé de côté. La clé est un bon équilibre entre notre approche de la matière et les aspects spirituels de l’existence.
Evidemment “science sans conscience n’est que ruine de l’âme !” Cette formule de Rabelais, sans doute usée par les années, est pourtant importante pour “l’honnête homme” de notre temps. Les hommes de sciences sont censés être inspirés par la sagesse et la morale, pour devenir non seulement des savants mais surtout des hommes de l’esprit. Il leur faudra aspirer, sincèrement, à ce que leurs découvertes et les fonctions qui en dérivent servent à bon escient. Henri Bergson disait : “Le corps agrandi attend un supplément d’âme, et que la mécanique exigerait une mystique.” Il faut entendre une proportionnelle de l’Histoire, plus il y aura de pouvoir entre les mains de la “matière” plus la présence de l’Esprit sera nécessaire. Sans cela, le pouvoir de la Science, sous toutes ses formes, ne pourra jamais devenir un moyen de rédemption mais celui d’une plus grande servitude.
L’autre domaine, plus caractéristique de la culture européenne, parait particulièrement complexe au regard de celui des sciences. Il affecte le champ de l’esprit, de la philosophie et des diverses opinions concernant le monde. Le Judaïsme et la raison occidentale peuvent se retrouver en conflit et exprimer quelquefois des réflexions opposées.
La philosophie s’intéresse à l’existence humaine et les solutions qu’elle présente sont fréquemment antinomiques à celles que la Torah professe. Car ni l’essence originelle ni la finalité rédemptrice ne sont prises en compte par la philosophie.
Rambam étudia Aristote et fut capable de faire la différence entre les principes nocifs et utiles de sa philosophie. Aristote repoussa le concept de la Création du monde, de la Providence et de la Révélation, ce qui était irrecevable chez Rambam. Cet éminent savant eut toutefois l’audace de séparer l’ivraie du bon grain et ce pour mieux souscrire dans son “Guide des Égarés” à quelques brillantes pensées du Grec.
Aussi faire fi, d’emblée, des cultures philosophiques relève d’une insuffisance profonde de notre confiance en ce que nous représentons. Cela exige pourtant de nos vertus morales, d’être éclairées et observatrices pour pouvoir différencier le bien du mal.
Parlons enfin des loisirs qui inspirent de manière excessive le mode de vie de toute notre civilisation. Or, ce sujet est celui qui suscite le plus de controverse, l’incontestable choc des cultures entre Israël et le monde occidental.
Rappelons ici aussi: le Judaïsme ne s’oppose nullement au plaisir, à la joie dans ce monde, la Torah nous enjoint uniquement de dominer et de gérer ce plaisir. En clair, être capable de nous transporter vers une autre dimension, plus sainte, plus saine et plus vertueuse. Le plaisir n’est et ne sera jamais une fin en soi pour les Hébreux, il n’est que le moyen de faire valoir le meilleur de notre nature humaine. Ce que la Torah requiert de nous, c’est une épuration en bonne et due forme de nos pulsions sensuelles. Elles ne sont, en vérité, présentes que pour mieux nous faire participer au dévoilement du Bien absolu.
À l’opposé la culture occidentale file du mauvais coton en poursuivant le plaisir, en s’abandonnant aux inclinations les plus souillonnes de l’être vivant.
Comment exiger d’une société corrompue, par l’appât du gain et de l’intérêt bassement matériel, de ne pas susciter grâce aux moyens de communication qu’elles possèdent : la violence, la débauche, l’infamie etc. ?…
Les temps modernes, grâce aux sciences, au progrès technologique, offrent aux Hommes une plus grande liberté de mouvement, les rend moins tributaires, et soudain propriétaires de plus de temps et de moyens pour se divertir. La sociologie nous assure que le “festif” devient omniprésent, que très prochainement la communauté humaine sera évaluée en proportion de son aptitude aux loisirs qu’elle sera à même d’exhiber.
On s’engage ainsi vers un antagonisme culturel, persistant, entre Judaïsme et Occident.
Entre la Foi d’Israël et le “festivus” séculier, il ne peut y avoir ni concessions, ni alliance, car l’un est à la recherche du “bien absolu” quand l’autre quête le “plaisir absolu”.
Il faut remédier à la dramatique vacuité que charrie la culture occidentale, en dispensant la grandeur du Projet de société liée inéluctablement à cette “Identité Morale de la Manière d’Être Homme-Hébreu”.
Abonnez-vous dès maintenant à Israël Magazine papier en cliquant ici
ou par mail : darmon7@gmail.com
ou par Tél : 054 254 45 20 ou de l’étranger au 00972 54 254 45 20
Vous pouvez aussi acheter Israël Magazine dans notre boutique en cliquant ici
Ou consultez Israël Magazine Virtuel en ligne en vous inscrivant ici :
magazine-virtuel/join-us