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Le nouveau chef d’état-major israélien, son profil et les défis qui l’attendent (i24News)

By 17 février 2015Etz Be Tzion

Gadi Eizenkot fera face à des confrontations au nord et devra empêcher une troisième intifada en Cisjordanie

En sa qualité de 21ème chef d’état-major israélien et plus influente autorité militaire du pays, le lieutenant-général Gadi Eizenkot, entré en fonctions lundi, sera en charge de la liaison entre doctrine et action militaire d’une part et les décisions de l’échelon politique d’autre part.

À l’heure actuelle, vu la situation instable au Moyen-Orient en général et chez les voisins d’Israël en particulier, le défi le plus important auquel fait face le nouveau chef d’état-major est d’empêcher une conflagration à grande échelle causée par un incident de terrain qui conduirait à une escalade, même si cela est contraire à la volonté des dirigeants des deux parties impliquées.

Le chef d’état-major n’intervient pas toujours. Cependant, quand un incident a le potentiel de déclencher une escalade, il est celui qui, après un très bref processus décisionnel, émet des directives aux commandants sur le terrain. Il détermine essentiellement l’ampleur initiale des dégâts puis conseille le ministre de la Défense et le Cabinet sur la façon d’aller de l’avant. Plus précisément, il présente un certain nombre d’alternatives et exprime explicitement sa préférence.

Eizenkot est l’un des rares hauts responsables de Tsahal à avoir une expérience militaire en tant que combattant, commandant et officier supérieur d’état-major. Il a démontré son calme et son sang-froid au cours de diverses campagnes de grande envergure, telles que la Seconde guerre du Liban et l’opération Bordure protectrice. De plus, le fait qu’il ait servi comme secrétaire militaire de l’ancien Premier ministre Ehud Barak contribue également à faire de lui quelqu’un de mûr pour le poste de chef d’état-major.

Ses détracteurs affirment qu’en tant que général, Eizenkot « n’est pas assez offensif » mais même ceux-là ne peuvent nier son état d’esprit militaire, qui sied particulièrement aux défis posés par la période actuelle. Il est en possession de presque tous les attributs nécessaires au bon déroulement des événements qui nécessitent une prise de décision rapide, une pensée flexible, du sang-froid et la volonté de gagner.

Jusqu’à il y a un mois ou deux environ, les responsables du renseignement militaire et ceux de l’état-major étaient d’avis que l’arène palestinienne (Judée-Samarie, bande de Gaza, et la campagne de délégitimation dans le monde entier) serait la préoccupation principale de l’armée israélienne et de son chef au cours de 2015. Néanmoins, l’évaluation qui prévaut actuellement est que le front Nord est sur le point de devenir la principale source d’une potentielle conflagration à grande échelle.

Le Hezbollah, sous la direction de Hassan Nasrallah et les responsables iraniens des Gardiens de la révolution, sont à l’origine des développements en Syrie et au Liban. Ce sont eux qui ont décidé récemment de transformer le plateau du Golan en une zone de conflit actif avec Israël et ils ont fait de vastes progrès en vue de réaliser leurs objectifs.

Ce revirement stratégique de l’axe radical sous direction iranienne vis-à-vis d’Israël tient à deux raisons principales:

L’implication du Hezbollah dans les combats en Syrie suscite de vives critiques de l’organisation chiite au Liban. Certains responsables chiites vont même jusqu’à affirmer que les groupes sunnites État islamique et Jabhat al-Nosra agissent contre le Liban parce que le Hezbollah se bat pour préserver le régime de Bachar al-Assad en Syrie.

Le Hezbollah a donc besoin d’une nouvelle légitimité pour exister et fonctionner comme une armée indépendante du territoire souverain libanais. Cette légitimité est la suivante: « défend le Liban et sa souveraineté » contre Israël ; mais l’organisation chiite craint que ses actions contre Israël depuis le pays du cèdre ne conduisent à une guerre meurtrière et destructrice dans laquelle Israël souffrirait mais dont la principale victime serait le Liban.

Le Hezbollah et les Iraniens ont jusqu’à présent échoué à arrêter les frappes aériennes en territoire syrien sur « les convois d' »armes » que les médias étrangers attribuent à Israël. L’organisation libanaise ne peut pas répondre aux attaques lancées depuis le territoire libanais (pour les raisons mentionnées ci-dessus), et ne peut attaquer la Syrie pour deux motifs. D’une part car l’organisation ne veut pas admettre à la communauté internationale qu’elle viole la souveraineté syrienne, d’autre part car Nasrallah ne veut pas embourber Assad dans un conflit à grande échelle avec Israël qui affaiblirait le président alaouite face aux rebelles syriens.

Mais récemment, un changement s’est opéré. Le Hezbollah et les Iraniens ne sont pas encore prêts à prendre des mesures directes contre Israël à partir du Liban mais ils sont certainement prêts à ouvrir un nouveau front contre l’Etat juif sur le plateau du Golan. Nasrallah l’a même déclaré en public dans un discours qu’il a prononcé il y a quelques semaines.

Les motifs de cette évolution sont simples. Les Iraniens et Nasrallah sont finalement parvenus à la conclusion – assez juste – qu’Israël ne désire pas s’embourber dans un conflit à grande échelle avec la Syrie et n’a pas intérêt à renverser le régime d’Assad dénué d’armes chimiques, qui sert de bouclier aux djihadistes sunnites.

Plus encore, le régime syrien aimerait reprendre le contrôle du plateau du Golan, avec l’aide de combattants du Hezbollah et de conseillers iraniens afin d’alléger la pression des rebelles sur Damas. Israël comprend tout cela, mais ne permettra pas au Hezbollah et aux Iraniens de mener à bien leur plan.

L’attaque attribuée à Israël sur le convoi transportant Jihad Mughniyeh et le responsable iranien en est une preuve flagrante.

Il n’y aura rien à envier au chef d’état-major Eizenkot si et quand il reçoit des informations des renseignements militaires ou du Mossad sur la préparation d’une action militaire ou lorsque le Hezbollah décidera de tirer un missile anti-char mortel sur une patrouille israélienne. La prochaine fois, dans des circonstances différentes, des sources militaires estiment qu’Israël aura du mal « à contenir » l’incident comme il l’a fait il y a deux semaines.

Un autre défi majeur pour le nouveau chef d’état-major est de prévenir que les troubles en Cisjordanie ne dégénèrent en une troisième intifada. Dans les circonstances actuelles, une telle escalade, même sous la forme de ce qu’on appelle « le terrorisme populaire », pourrait déboucher sur des combats à grande échelle et provoquerait un désastre pour les deux parties.

Mahmoud Abbas et la plupart des civils palestiniens sans doute, ne le veulent pas que, tout comme Israël. Mais les incidents en Cisjordanie augmentent en raison de l’impasse politique, de l’incitation du Hamas, et du gel qu’Israël a imposé sur le transfert de fonds à l’Autorité palestinienne.

Des responsables de Tsahal, en accord avec le coordinateur des activités gouvernementales dans les Territoires, estiment que l’agitation croissante en Cisjordanie pouvait voir les Palestiniens prendre les rues en masse. Dans de telles circonstances, le chef d’état-major Eizenkot devra s’assurer que les commandants sur le terrain évitent au maximum les victimes des deux côtés et restaurent le calme dans la région, y compris la prévention du terrorisme juif. Cela nécessitera le déploiement des forces anti-émeutes de Tsahal et de la police des frontières sur tous les sites sensibles.

Le défi de Gaza est bien connu. Le Hamas a effectivement subi un coup majeur lors de l’opération Bordure protectrice mais l’organisation est en train de se reconstruire et se renforcer car ses leaders pensent qu’un nouveau conflit avec Israël est probable. L’argent promis par les pays donateurs n’arrive pas au rythme souhaité ; l’UNRWA a suspendu certaines de ses opérations de reconstruction et la fermeture imposée par l’Egypte rend la vie dans la bande encore plus difficile.

Dans de telles circonstances, le Hamas, ainsi que les habitants de Gaza, peuvent très bien décider qu’ils n’ont rien à perdre – et lancer une autre série de combats. Ils seraient les premiers à en souffrir, mais ils seraient aussi en mesue de retrouver l’attention internationale.

En accord avec son point de vue, Eizenkot tentera probablement d’aider le major général Yoav Mordechai, le coordinateur des activités gouvernementales dans les Territoires, à promouvoir des initiatives politiques et économiques, israéliennes et internationales, pour accélérer le rythme de la reconstruction de la bande de Gaza pour empêcher une autre opération militaire infructueuse.

Dans le domaine militaire, Eizenkot devra de toute urgence trouver de meilleures réponses à une série de problèmes. Tout d’abord, il sera en charge de proposer une réponse combinée défensive-offensive aux projectiles de courte portée (mortiers, roquettes Qassam et autres), et d’assurer en même temps la réussite du nouveau système « fronde de David », conçu pour intercepter les tirs de moyenne à longue portée et des missiles de croisière. L’enjeu des tunnels nécessite aussi une solution globale.

L’autre prérogative de taille pour Eizenkot sera de maintenir la capacité et la volonté de Tsahal d’empêcher l’Iran de fabriquer des armes nucléaires – si et quand le temps sera venu.

Eizenkot devra finalement trouver une réponse adéquate pour promouvoir ses actions, malgré l’isolement politique d’Israël, lorsqu’il s’agira de mener des actions préventives face à une menace dangereuse. Ce type d’actions pouvant conduire à des sanctions économiques et diplomatiques contre Jérusalem. Nous avons payé un prix élevé en terme de légitimité internationale après l’opération terrestre de Bordure protectrice. D’autre part, nous devons nous rappeler que les frappes préventives sont le meilleur moyen d’épargner des vies – les nôtres et celles de l’ennemi.

Un cinquième défi majeur avec lequel devra composer le chef d’état-major est la préservation du sentiment de sécurité des citoyens israéliens en général, et en particulier ceux en première ligne. L’armée d’aujourd’hui a besoin de savoir non seulement comment se battre et gagner physiquement tout en ne négligeant pas la bataille pour les esprits et les cœurs des civils.

Les circonstances dans lesquelles Eizenkot entre en fonctions sont difficiles pour lui: un grand nombre des officiers de l’état-major sont nouveaux et les élections approchent. Il ne sait pas encore avec quel gouvernement il travaillera ni à quoi ressemblera le cabinet de sécurité ; mais Eizenkot, comme nous l’avons dit, est expérimenté. Il est ainsi raisonnable de supposer qu’il fera avec le choix des électeurs israéliens.

Ron Ben-Yishai est un correspondant de guerre et analyste en matière de défense. Cet article est publié avec l’autorisation de Ynet.

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