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Les ravages de l’art politique des « circonstances »

By 14 août 2015mai 3rd, 2020Etz Be Tzion

 

par Nessim Robert Cohen Tanugi

 

Il n’y aura pas de véritable avenir à long terme pour Israël si l’on ne se distancie pas de l’art classique de la politique et de la diplomatie occidentale que le grand Fouché, surintendant  de Louis XIV, résumait en une courte phrase : « La politique est l’art des circonstances. » Les politiques analysent « les circonstances » et les placent sur un échiquier, puis imaginent toutes les hypothèses possibles en vue d’un résultat souhaité. Ainsi font les USA et l’Europe devant le développement rapide de l’État islamique. L’Iran et la Turquie, pensent-ils, ont des raisons et des moyens pour contrer l’EI. Donc, on les soutient. C’est le pragmatisme réaliste. À court terme. Sauf que les circonstances changent plus vite qu’on ne l’imagine, et que ce que l’on voit est très différent de ce que les acteurs méditent. Au lieu « des circonstances » on ferait mieux de réfléchir aux intentions, surtout quand elles ne sont pas cachées.

La Turquie d’Erdogan a une vision à moyen terme : reconstruire autant que faire se peut l’Empire ottoman et l’EI est, dans cette optique, un danger et un concurrent à moyen terme. Dans la foulée, Erdogan frappe sur les Kurdes qui souhaitent instaurer un État dans un territoire qui s’appelle… le Kurdistan, pays des Kurdes, mais il paraît qu’ils n’y ont pas droit. Les Juifs aussi voudraient que la terre de Judée soit la terre du peuple des Juifs, comme son nom l’indique ! Mais les USA et l’Europe se désintéressent de la vérité et de la justice : ce qui les occupe ce sont les « circonstances » !

L’Iran ne veut surtout pas d’un Empire mondial islamique sunnite, il veut un Empire mondial islamique chiite ! Mais cela n’intéresse pas l’Occident obsédé pragmatiquement par « les circonstances ». Alors l’Iran se frotte les mains, et il s’empresse de renforcer Bashar el-Assad et le Hezbollah : avec l’argent à profusion espéré grâce à l’annulation de l’embargo. L’expansion de l’empire chiite avance rapidement au Moyen Orient. La suite sera la tentative de mainmise chiite sur les Palestiniens et la Jordanie. Évidement, l’Arabie sunnite n’en veut en aucun cas : elle se prépare à acheter des armes atomiques « ready made » à la Corée du Nord, cette même Corée du Nord qui avait signé avec les USA, naïfs et aveuglés par leurs œillères sur « les circonstances », sans anticiper sur les intentions des acteurs.

L’accord avec l’Iran sur l’EI est le plus irresponsable jamais concocté par les USA, puisque l’Iran confirme que son objectif est « Mort à l’Amérique ! »

Pourtant un État Kurde serait une pièce capitale pour un Moyen-Orient plus diversifié. Or George W.Bush avait choisi de punir Saddam et l’Irak au nom du risque nucléaire. Nous avions écrit à l’époque que même sans armes atomiques, l’Irak de Saddam devait être combattu parce que l’Irak, conçu par les Anglais, était une hérésie politique explosive car elle unissait en un seul État 18 % de sunnites, 22% de Kurdes et 60% de chiites. Au nom des « circonstances » l’Angleterre a bricolé malgré tout un État unique  et choisi, pour comble, de donner le pouvoir aux peu nombreux sunnites dont elle connaît mieux les méthodes. Saddam a été un tyran sanguinaire et dictatorial tout simplement parce qu’il avait face à lui 82% des Irakiens anti sunnites ! Donc, ou ils les terrifiait et les gazait (Halabja 1988 !) ou il perdait le pouvoir. L’ Irak doit logiquement être divisé en trois entités de 22% de Kurdes, 60% de chiites, et 18% de sunnites. Même une fédération n’est pas possible. De plus, les trois États pourraient avoir chacun leurs propres puits pétroliers. Mais la logique, la raison, la morale et la vérité n’intéressent pas l’Occident : seul compte le pragmatisme face aux « circonstances » qui pourraient servir leurs intérêts : le pétrole n’a pas de religion. Oui, mais ce qui le possède en ont une.

Faut-il parler du colossal contresens de l’Occident face à la Russie de Poutine ? L’URSS démembrée, les USA n’ont eu u’une idée : encercler les frontières de la Russie de bases militaires, susceptibles de menacer la Russie si elle osait développer ses liens commerciaux et politiques avec les anciens pays satellites. Poutine désirait ardemment une paix « chaude » et non « froide » avec l’Europe. Il espérait beaucoup offrir à bon prix du gaz et du pétrole russes à l’Europe d’autant que leurs pipes-lines étaient opérationnels. Pensez-vous ! L’Occident regarde l’avenir à travers son rétroviseur et non en face. Il a donc créé un énorme nouveau pipeline coûteux, passant d’Asie jusqu’à la Turquie pour ne pas utiliser celui des Russes ! C’était se gratter l’oreille droite avec la main gauche. Ça avait de plus, espérait-on, l’avantage de paupériser la Russie. L’Europe a fait ce qu’elle a pu pour couper les liens très nombreux de l’Europe centrale avec la Russie dans l’espoir de l’annexer à l’Europe unie. D’où la guerre à la Serbie pour lui voler le Kosovo tandis que les USA ont en pris une part pour créer une énorme station militaire, anti-russe bien sûr ! D’où, encore, les « guerres de velours » fomentées pour couper de la Russie des régions slavisées : Ukraine, Crimée, Kosovo, Georgie, etc. Évidemment, Poutine, qui est tout sauf un idiot, tente de limiter la casse. Avec l’Ukraine, trop c’était trop, c’est le moins qu’on puisse dire, Poutine a relevé le défi sans toutefois se lancer dans une guerre mondiale avec l’Occident. Le benêt Hollande a été assez stupide pour refuser de livrer les bateaux de guerre prêts à être livrés aux Russes. La France envisage de les céder à l’Arabie… qui inonde la France de ses imams, mosquées, livres et prédicateurs djihadistes.

De plus, Poutine s’est battu comme un diable pour empêcher les régions de Russie, fortement islamisées, de se transformer en Etats terroristes islamistes. Il a écrasé les terroristes et offert une modernisation au pays de sorte qu’il ne regrette plus les terroristes. L’Occident a été assez aveugle pour le traîner dans la boue pour cela alors qu’il aurait dû s’entendre avec lui pour faire alliance contre l’expansion islamiste ! Résultat : Poutine était bien obligé de contrer la néfaste influence américaine envers l’Iran des ayatollahs. Il ne peut pas laisser tomber l’Iran dans l’escarcelle américaine et laisser l’islamisme chiite s’étendre en Asie en Russie, Inde et Chine, trois pays aux frontières du dangereux Pakistan, armé de bombes atomiques grâce à l’irresponsabilité américaine.

Il faut espérer que les démocrates américains abandonnent leur pacifisme naïf et que les Républicains tournent leur pugnacité moins vers le monde russe et plus vers l’islamisme fanatique rampant.

Dans notre très prochaine lettre, nous exposerons d’autres orientations pour Israël qui nous dégageraient de l’étreinte insupportable : une alliance, oui, une tutelle, non.

 

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Lève-toi ! / Etz Be-Tzion
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