« La loi Taubira devra être réécrite de fond en comble », a affirmé M. Sarkozy, devant environ 3.000 personnes.
Nicolas Sarkozy, candidat à la présidence de l’UMP, s’est finalement prononcé pour « l’abrogation » de la loi Taubira sur le mariage pour tous après avoir été chahuté pour avoir d’abord évoqué une « réécriture » de la loi, samedi à Paris, lors d’un meeting de l’association Sens commun.
C’est la première fois que l’ancien président emploie le terme d’ »abrogation » alors que, jusqu’à présent, il prônait une « réécriture » du texte sur l’ouverture du mariage et de l’adoption aux couples homosexuels, principale réforme sociétale de son successeur François Hollande.
Les trois candidats à la présidence de l’UMP – Bruno Le Maire, Hervé Mariton puis Nicolas Sarkozy – ont été invités samedi à venir exposer leur vision sur l’avenir de leur parti devant Sens commun, une association au sein de l’UMP née dans le sillage de la Manif pour tous.
« La loi Taubira devra être réécrite de fond en comble », a affirmé M. Sarkozy, devant environ 3.000 personnes, selon les organisateurs. Frigide Barjot, un temps égérie de la Manif pour tous, était assise au premier rang.
Il a alors été interrompu par de très nombreux participants qui scandaient « Abrogation ! Abrogation ! » tandis que d’autres le huaient.
« Si vous préférez qu’on dise (qu’il faut) abroger la loi Taubira pour en faire une autre… En français, ça veut dire la même chose… Ca aboutit au même résultat. Mais enfin, si ça vous fait plaisir, franchement, ça coûte pas très cher », a fini par dire M. Sarkozy, chahuté également quand il s’est prononcé pour un « mariage » pour les homosexuels. En 2007, il avait promis une union civile sans jamais la mettre en oeuvre.
« Ca ne sert à rien qu’on soit contre la GPA (gestation pour autrui) si on n’abroge pas la loi Taubira », a-t-il dit un peu plus tard, déclenchant dès lors de forts applaudissements.
– Deux unions distinctes –
L’ancien président, qui souhaite qu’il y ait deux « mariages » distincts célébrés en mairie – le mariage classique pour les hétérosexuels et une union spécifique pour les homosexuels – a également été très applaudi quand il a affirmé que « le droit à l’enfant (était) une folie. Il n’y a pas de droit à l’enfant, il y a désir d’enfant », a-t-il dit.
Avant lui, à la tribune, Bruno Le Maire, qui s’est abstenu sur la loi Taubira, s’était fait huer pour avoir maintenu son opposition à une abrogation du texte: « Nous ne reviendrons pas, nous la droite républicaine, sur le mariage homosexuel ».
A l’inverse, Hervé Mariton a eu droit à un tonnerre d’applaudissements pour avoir lancé: « abrogation de la loi ». « Ce qu’une loi a fait, une loi peut le défaire », a déclaré le député de la Drôme, qui a accusé Nicolas Sarkozy de ne pas être « clair » sur ce sujet.
Les trois candidats ont pris la parole à tour de rôle, sans jamais se croiser ni, a fortiori, débattre, au grand dam de MM. Le Maire et Mariton.
« Ne soyons pas dupes, il ne s’agit encore que de déclarations d’intention », a réagi samedi soir La Manif pour tous après la « conversion » de Nicolas Sarkozy.
Le PS lui a dénoncé ce revirement, accusant M. Sarkozy de « flatter les instincts les plus réactionnaires de sa base militante » à 15 jours de l’élection UMP et de proposer « une nouvelle forme de ségrégation » avec un mariage distinct pour homosexuels et hétérosexuels.
« Il faut relativiser cette déclaration, ce n’est qu’un effet d’annonce (…) Il n’y a jamais eu de retour en arrière sur une réforme de société », a réagi de son côté Amandine Miguel, porte-parole de l’Inter-LGBT, qui regroupe des associations de défense des droits des gays, lesbiennes, bi et trans.
« Nicolas Sarkozy est un menteur », « il sait qu’il ne pourra pas le faire » car « s’il le fait, il va créer de l’inégalité », a dénoncé Vincent Autin, uni lors du premier mariage homosexuel de France, le 29 mai 2013.
Plus surprenant, l’ex-ministre sarkozyste Christian Estrosi a tenu à rappeler samedi soir sa position: si elle retrouve le pouvoir en 2017, la droite ne doit pas revenir sur le mariage gay, qui est « une avancée ».
Selon un sondage Ifop publié samedi sur le site Atlantico, plus des deux tiers des Français (68%) sont favorables au mariage gay et une majorité (53%) pour l’adoption d’enfants par des couples de même sexe, l’approbation de ces nouveaux droits progressant très nettement chez les sympathisants UMP.
Ces derniers sont désormais majoritaires (58% contre 33% en janvier 2013) à se dire en faveur du mariage gay. Et s’ils sont toujours minoritaires (38%) à soutenir l’adoption par des couples de même sexe, la progression est là aussi notable (+16 points).
Source: i24 News
Cette annonce a effectivement été relayée dans la presse française. Mais attention : à ce qu’on nous y explique, un retour en arrière ne serait pas si simple que cela, en l’état actuel du droit constitutionnel français et du droit européen. Selon certains commentateurs, le « mariage pour tous » aurait en effet accédé au statut de « liberté fondamentale », donc intouchable. Il faut aussi se souvenir que ses défenseurs se réclament de deux principes qui sont l’égalité et la non discrimination, tels qu’on les comprend aujourd’hui. Le droit, noble et passionnante discipline, est un merveilleux outil providentiel de structuration et d’équilibre de la pensée. Il n’est pas une morale, mais un instrument. Il ne faut pas confondre le droit et les sources du droit. En d’autres termes, les lois sont des vecteurs qui servent à faire respecter des valeurs. Le très honorable principe d’égalité s’applique à ce qui est « égalisable », et il ne faut pas confondre la discrimination injuste avec la différentiation. Le droit français et ses juristes ont toujours eu la finesse de préciser la nuance qui existe entre légalité et légitimité. Quels drames faudra-t-il pour nous réapprendre à réfléchir, et à nous demander quelles libertés sont licites, et à quels droits nous acons droit ? Quant à la noble science du droit, elle n’est pas en cause. Ce sont les sources morales de notre monde qui sont polluées.