La bataille sur le Mont du Temple fait rage. Ce n’est plus un violent affrontement occasionnel entre musulmans etjuifs, mais des combats quotidiens avec des moyens de plus en plus violents et de plus en plus de participants. Les fidèles « soldats » de « l’armée de Dieu » sont déployés des deux côtés, prêts à se sacrifier dans la guerre religieuse menée sur leurs lieux saints.

Côté juif il y a Yehuda Glick, président de la Fondation du patrimoine du Mont du Temple, qui a échappé de justesse à une tentative d’assassinat à Jérusalem en Octobre dernier.

Côté musulman, deux organisations agissent de concert, une pour les hommes, une pour les femmes, que l’on nomme  respectivement  Mourabitoun et Mourabitat. Ces noms sont pris à partir d’une phrase dans le Coran qui oblige chaque musulman à être un « Mourabit » (défenseur) des lieux saints de l’Islam et à les protéger contre les païens qui menacent de les profaner.

La lutte sur le Mont du Temple, ou Haram al-Charif (Noble Sanctuaire), est exponentielle car les musulmans pensent que leur mosquée Al-Aqsa, est réellement en danger. Par conséquent le nombre le nombre de recrues hommes et femmes a augmenté.

La police et l’Agence de sécurité nationale (Shin Bet) estiment leur nombre à plus de 1.000 pour les femmes et des centaines pour les hommes, qui sont payés jusqu’à 4.000 shekels (1040 $) par mois pour leur activisme terroriste.

Le financement est assuré par des organisations caritatives islamiques, principalement la branche nord du Mouvement islamique, dirigée par le Sheikh Raid Salah, qui, apparemment, a conçu l’idée de ces violences et commandite les activités de ces organisations. Les Services de sécurité israéliens affirment que le Hamas finance aussi ces organisations. En Novembre 2013, le Shin Bet a fermé les bureaux de Amara al-Aqsa de Jérusalem, affirmant que l’organisation a servi de vecteur pour financer les violences à Al-Aqsa, y compris ceux des Mourabitoun.

Le 9 septembre, à la demande du ministre de la Sécurité Intérieure Gilad Erdan et sur la recommandation du Shin Bet, le ministre de la Défense Moshe Ya’alon a désigné ces organisations de Mourabitoun et Mourabitat comme illégales. Le procureur général de l’Etat a validé la décision fondée sur la détermination des services de sécurité disant que ces groupes étaient largement responsables de la montée en flèche des tensions et attisent la violence à Jérusalem en général et sur le Mont du Temple en particulier. Interdire ces groupes permet à l’État de poursuivre toute personne participant à leurs activités ou qui leurs versent des fonds pour financer leurs opérations.

Par conséquent, les militants des deux organisations qui ont dans le passé fait aucun secret de leur mission – de défendre le Haram al-Sharif contre les Juifs – sont maintenant beaucoup plus prudents et dissimulent leurs liens avec ces organisations  affirmant qu’ils agissent indépendamment de leur propre chef en tant qu’individus. Les militants disent maintenant qu’ils combinent études coraniques avec l’action spontanées contre les provocations des organisations juives qui violent, comme ils le prétendent, la sainteté de la mosquée Al-Aqsa.

Après m’être présenté comme journaliste auprès d’une militante Mourabitat et résidente de Jérusalem-Est elle m’a demandé, « Comment puis-je être certaine que vous n’êtes pas un policier juif ou un militaire qui veut m’interroger pour ensuite me causer des ennuis avec la loi? » J’ai eu une longue conversation avec elle pour la convaincre que je voulais l’interviewer pour Al-Monitor, et je lui ai fait la promesse que son nom ne serait pas dévoilé. C’est pourquoi je l’appelle simplement « Mourabita. »

« Il y a un hadith [enseignement religieux] du Coran qui dit que quiconque prie avec une vraie ferveur est une Mourabit, qu’elle prie à la maison, au travail ou dans une mosquée, » a-t-elle expliqué. « Tout le monde est obligé de se prémunir contre la profanation. Dans le Coran, il est dit expressément: «Au nom d’Allah le miséricordieux et compatissant, il faut être prêt et disposé à défendre les lieux saints de l’Islam. ‘Ceci est un commandement qui doit être respecté. »

Mourabita dit que les mourabitat sont dans les salles de classe de la mosquée Al-Aqsa et les maisons voisines pour la prière, et prennent des cours de Coran et de Hadith. A l’extérieur, les hommes Mourabitoun font des quarts de garde. Quand les Juifs sont repérés arrivant sur le Mont du temple, les hommes debout à côté de la salle de classe des femmes le leurs signalent et appelent les femmes à l’action. Les mourabitat, vêtues de noir, leurs visages voilés, crient à plusieurs reprises à l’unisson, « Allahu Akbar » (Dieu est grand), pour effrayer les pèlerins juifs dans un genre de guerre psychologique.

La division du travail entre les hommes et les femmes est fondée sur le fait que seules les femmes peuvent circuler autour de l’enceinte car grâce à leurs visages voilés la police ne peut pas les identifier. Elles sont chargées de s’abstenir de confrontations physiques avec les Juifs et la police afin d’éviter le risque d’arrestation.

Les militants des organisations juives qui se rendent sur le Mont du Temple affirment que la police les abandonne à leur sort, refusant de les protéger à l’intérieur, même si ils ont le droit légal de visiter le Mont du Temple une fois par mois selon la décision de la haute cour de justice en 2015 suite à la présentation d’une pétition par Glick.

Le texte de l’interview avec Mourabita :

Al-Monitor: Comment votre travail est-il défini? Il ne porte pas que sur la prière ?

Mourabita: Ceux qui viennent ici comme innocents [touristes] et simples visiteurs, nous les saluons avec des mots de bienvenue en Palestine et à Jérusalem, mais aux occupants nous disons, « quittez notre terre. » Ils devraient se tenir loin de notre Al-Aqsa. Nous luttons principalement contre les colons. Je vis à Jérusalem depuis 43 ans. Où étaient-ils avant ?  Dans le passé, quand ils voulaient venir à la mosquée Al-Aqsa, la police  les en empêchait et même les  expulsait par la force. Mais il y a 10 ans, les choses ont commencé à changer, et maintenant ils ont atteint un point intolérable. Tout le temps, ils veulent occuper un autre morceau de terre, et un autre morceau de terre, et changer la situation (sur le terrain). Vous savez, même les rabbins d’habitude disaient que les juifs religieux ont l’interdiction de se rendre à la mosquée Al-Aqsa. Maintenant, ils viennent tous les jours. Pourquoi? Autrefois il n’y avait aucun problème entre nous et les Juifs, aujourd’hui, la situation est sur le point d’exploser.Chaque jour, il y a un grand désordre.

Al-Monitor: Vous n’avez pas peur que la police change son attitude envers vous?

Mourabita: Nous avons seulement peur d’Allah. Pour défendre la mosquée Al-Aqsa sacrée, nous sommes disposés à être « chahids » [martyrs], à mourir pour une cause sacrée, pour la sanctification de Dieu.

Al-Monitor: Selon le décret du ministre de la Défense, vous êtes ceux qui créez le désordre et initiant les violences. Qu’en dites-vous?

Mourabita: Que font les mourabitat de mal ? Sont-ils en train d’abattre des oliviers ? Sont-ils en train de détruire des maisons? Sont-ils entrain de construire des colonies pour empêcher les autres de construction leurs maisons?Le mourabitat est assis dans la mosquée Al-Aqsa pour que le monde entier va voir et entendre. Ils étudier le Coran, les Hadith, et quand un colon arrive, ils crient à haute voix ensemble, « Allahu Akhbar, Allahu Akhbar. » Dites-moi, en tant que Juif, si un musulman entre dans une synagogue dans laquelle vous priiez, vous accepteriez que quelqu’un vous dérange pendant que vous êtes en prière? Bien sûr que non. Voilà ce qui nous guide dans la protection de la sainte mosquée Al-Aqsa.

(NDLR : les Juifs n’ont aucune intention de pénétrer dans la mosquée Al-Aqsa et ne dérange jamais les musulmans en prière. Les musulmans les empêchent de fouler les abords de la mosquée construite sur le Mont du temple et les agressent à peine ils arrivent sur l’esplanade.)

Shlomi Eldar
Al Monitor

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