Voici un très bref résumé de ce que l’on sait du programme iranien et de son développement actuel.
La République islamique a toujours démenti avec force vouloir se doter de l’arme atomique, et assure ne poursuivre qu’un but civil.
Parallèlement à la négociation en cours avec les grandes puissances, l’Onu continue d’enquêter pour vérifier des allégations précises, formulées en 2011, selon lesquelles l’Iran aurait mené des recherches et des travaux concrets dans le passé pour se doter de la bombe atomique.
Une centrale civile
L’Iran possède une unique centrale nucléaire de production d’électricité, à Bouchehr sur la côte du golfe Persique, construite par la Russie et officiellement remise aux Iraniens en septembre 2013. Elle développe 1.000 mégawatts. Un accord pour la construction de deux réacteurs supplémentaires sur le même site a été signé avec Moscou en novembre dernier. L’Iran possède également une mine d’uranium à Gachin.
L’usine d’Arak
Le réacteur à eau lourde d’Arak (centre), dont la construction a été interrompue en 2014, pourrait fournir, s’il était achevé, du plutonium, c’est-à-dire l’alternative à l’uranium hautement enrichi (HEU) pour entrer dans la composition d’une arme nucléaire.
Les capacités d’enrichissement d’uranium
L’Iran produit de l’uranium faiblement enrichi à usage civil, et fabriquait jusqu’en janvier 2014 des isotopes médicaux plus fortement enrichis. Le stock d’uranium faiblement enrichi détenu par le pays est évalué à huit tonnes, soit de quoi produire huit bombes nucléaires après un nouveau processus d’enrichissement de ce matériau jusqu’au niveau militaire (HEU). Il ne possède pas pour l’heure, a priori, de stocks de cet HEU.
L’Iran dispose de quelque 19.000 centrifugeuses – les machines qui réalisent l’enrichissement – dont environ 10.200 sont en opération. Réduire drastiquement leur nombre est l’un des objectifs majeurs de l’accord négocié, mais le nombre de machines ne dit pas tout. A Natanz (centre), la principale installation d’enrichissement iranienne, quelque 17.000 centrifugeuses de première génération côtoient un millier de modèles IR-2M nettement plus rapides.
Un deuxième site d’enrichissement plus petit existe à Fordo (centre).source
Téhéran n’a cédé sur aucun point par rapport à ses positions initiales
Négociations à Lausanne sur le nucléaire iranien, Suisse, 30 Mars 2015 (Source UE service presse)
Par Y. Carmon et A. Savyon *
Au vu de leur incapacité à parvenir à un accord en novembre 2014, l’Iran et le groupe des P5 + 1 ont décidé de prolonger la validité du plan d’action conjoint conclu à Genève le 24 novembre de six mois supplémentaires, jusqu’à juin 2015.
Suite à cet arrangement, les Etats-Unis ont prévu une poursuite des négociations en deux temps :
- Trois mois (jusqu’à fin mars 2015) pour parvenir à un accord-cadre
- Trois mois supplémentaires (jusqu’à fin juin 2015) pour s’entendre sur les points techniques de cet accord.
Toutefois, dans un discours prononcé en février 2015, le Guide suprême iranien Ali Khamenei a annoncé qu’il était en total désaccord avec cette procédure, affirmant qu’il n’y aurait pas deux, mais une seule étape, que l’accord devait être conclu en juin 2015, et qu’il comprendrait la levée de toutes les sanctions contre l’Iran. Cela signifie que la date limite du 31 mars 2015 ne signifie rien pour Khamenei.
De leur côté, les États-Unis ne tiennent pas compte de l’annonce de Khamenei, et s’efforcent, sans grand succès, de placer l’Iran dans cette logique de processus en deux temps qu’ils ont instituée. Mais l’Iran refuse de signer un document provisoire ; c’est pourquoi les ministres des Affaires étrangères occidentaux impliqués dans les négociations, comme le ministre des Affaires étrangères britannique Phillip Hammond, ont précisé que les arrangements qui seraient conclus à ce stade seraient uniquement oraux.
Il convient de souligner que l’Iran n’a rien cédé, à aucun moment, sur ses exigences initiales :
- Téhéran refuse le retrait de son uranium enrichi d’Iran.
- Téhéran refuse une levée progressive des sanctions.
- Téhéran refuse toute restriction du nombre de ses centrifugeuses.
- Téhéran refuse les inspections intrusives et les inspections inopinées.
- Téhéran refuse toute interruption de ses recherches et activités de développement.
- Téhéran refuse tout changement relatif à la nature de son réacteur à eau lourde d’Arak.
- Téhéran refuse la fermeture de son site secret d’enrichissement de Fordow.
- Téhéran refuse toutes les restrictions à ses activités nucléaires après l’expiration de l’accord.
- Téhéran refuse que son programme de missiles à longue portée soit inclus dans les négociations.
- Téhéran refuse de rendre des comptes sur ses anciennes activités nucléaires militaires clandestines.
- Téhéran refuse d’autoriser des inspections de sites militaires soupçonnés de mener des activités nucléaires.
Dans sa déclaration du 18 février 2015, Khamenei a précisé qu’il accepterait uniquement un accord en une étape, et que cet accord devait inclure la levée de toutes les sanctions contre l’Iran et clairement établir que l’Occident ne profiterait pas d’un accord-cadre pour imposer sa position à l’Iran lors d’une seconde étape, lorsque les détails seraient discutés.
Ci-dessous la déclaration du 18 février de Khamenei sur les négociations nucléaires : [1]
« Les mains de la nation iranienne et de ses hauts responsables n’ont jamais été liées, ce que nous avons bien montré. A partir de maintenant, nous allons également le démontrer avec nos initiatives et notre courage. C’est l’Amérique qui est coincée et empêtrée dans un problème, et la réalité à l’intérieur et à l’extérieur de la région le prouve.
C’est vous [les Américains] qui avez subi défaite sur défaite pendant de nombreuses années ; c’est la République islamique d’Iran qui progresse, et qui ne peut en aucune façon être comparée à [l’Iran] d’il y a 30 et quelques années…
L’Iran va de l’avant, tandis que les Américains, qui n’ont pas réussi à déraciner [la République islamique d’Iran], sont maintenant forcés de tolérer le régime de la République islamique. Leurs plans politiques, sécuritaires, économiques et culturels ne nous empêcheront pas d’avancer…
[Dans le cadre des négociations nucléaires,] je vais accepter un plan réalisable, mais je ne vais pas accepter un mauvais accord. Comme les Américains, je pense que pas d’accord vaut mieux qu’un mauvais accord, et je crois qu’il vaut mieux ne pas parvenir à un accord que de conclure un accord qui nuira aux intérêts nationaux de l’Iran et ouvrira la voie à l’humiliation de la nation iranienne.La conduite des États-Unis au cours des négociations, et de certains pays européens qui lui obéissent, est illogique. Ils ont de multiples attentes et pensent que l’on va satisfaire toutes leurs exigences. Mais ce n’est pas ainsi que l’on mène des négociations. La nation iranienne ne tolérera pas le harcèlement, la cupidité et une conduite irrationnelle. J’accepte de poursuivre les négociations afin de parvenir à un bon accord… Les négociations doivent préserver l’honneur de la nation iranienne, et la poursuite [de son programme nucléaire]…
Le scénario d’un accord sur les grands principes, suivi d’un accord sur les détails, n’est pas recommandé, car notre expérience avec la partie adverse nous a appris qu’un accord-cadre leur servira à inventer une série d’excuses dans [la suite des négociations sur] les détails. Si un accord doit être atteint, ce sera un accord en une seule étape, et il doit comprendre le cadre général ainsi que les détails. Le contenu de l’accord doit être clair, et ne pas donner lieu à [diverses] interprétations. Les paragraphes de l’accord ne doivent pas permettre à la partie adverse, habituée à marchander, de chercher des excuses au sujet des différents points. Les sanctions doivent être complètement levées. »
En outre, Khamenei a menacé d’imposer des sanctions avec le gaz naturel : « S’il doit y avoir des sanctions, la nation iranienne peut également imposer des sanctions, et elle le fera. »
* Y. Carmon est président fondateur de MEMRI ; A. Savyon est directrice du Projet sur les médias iraniens. source