Le Corps d’action en Profondeur prêt à frapper en Jordanie
dimanche 14 septembre 2014, par Corps D’action En Profondeur
Le drapeau noir de l’EI flotte à 104 kms d’Eilat, sur Ma’an, ville des Bédouins jordaniens du sud du royaume. Le Corps des opérations en Profondeur est sur le pied de guerre, depuis, au moins 3 mois, prêt à intervenir en Jordanie, mais uniquement à la demande expresse du Roi Abdallah II.
Netanyahu et Steinitz ont confirmé qu’Israël interviendrait, en cas d’invasion du royaume hachémite, mais que celui-ci reste un Etat fort, capable de se défendre. Les dirigeants israéliens mettent aussi en garde contre l’Iran, que la communauté internationale, essentiellement l’Occident, semble (délibérément ?) oublier. La France vient, ainsi de faire un appel du pied à Téhéran, en l’invitant à une conférence des donateurs, censée alimenter les caisses de la coalition antiterroriste, lancée par les Etats-Unis.
Yuval Steinitz, Ministre chargé des Renseignements, a confirmé que Tsahal aurait les coudées franches, en cas d’appel de la Jordanie, pour faire face à l’Etat Islamique. Selon ses propres évaluations, les coups portés par les Pehmergas kurdes, à la faveur des frappes aériennes américaines, donnent actuellement trop de « grain à moudre » à cet Etat Islamique pour qu’il se lance dans l’ouverture d’un front supplémentaire contre Amman. La situation était encore plus précaire, en juillet dernier.
Les services de sécurité jordaniens veillent. Ils ont procédé à l’arrestations d’au moins 71 agitateurs favorables à l’Etat Islamique ou au Front Al Nusra, au cours des dix derniers jours. On dit moins ouvertement, que les commandos des forces spéciales jordaniennes ont frappé, à plusieurs reprises, en Irak même, pour briser la progression de convois islamistes en direction du Royaume, qui est aussi le portail d’entrée vers l’Arabie Saoudite.
“Ma’an est la Fallouja de Jordanie !” criaient des milliers de Bédouins, samedi 28 juin, dans la ville de Ma’an, au sud du Royaume Hachémite. Cette légende s’inscrivait sur les affiches et les drapeaux qu’ils faisaient flotter d’une main, au nom de l’Etat Islamique en Irak et au Levant -qui vient de proclamer le Califat-, et de l’autre, ils agitaient des fusils automatiques.
Ma’an (population : 50.000 hbts) est un site sensible : à 218 kms au sud d’Amman, elle se situe aussi à 104 kms du port d’Eilat et à quelques 60 kms de la principale artère d’autoroute coupant le nord du sud d’Israël.
Mais, bien que des émeutes favorables à Al Qaïda-EIIL se poursuivent depuis des jours à Ma’an, capitale de la Province du Sud du Royaume de Jordanie, on n’a pas aperçu le personnel sécuritaire et militaire dans les parages. Cette ville a un passé historique nourri de troubles violents. Elle a, plusieurs fois, subi le couvre-feu et elle a même été quadrillée par des soldats tirant à balles réelles et qui ont laissé des dizaiens de morts, lorsque ce type d’émeutes devenaient hors de contrôle.
Pour l’instant, le Roi Abdallah s’entretient avec ses chefs des renseignements et de l’armée, sur la façon de réprimer cette révolte islamiste de Ma’an sans qu’elle ne se propage à d’autres villesjordaniennes, particulièrement à Salt, Irbid et Zarka (ville d’où était originaire Abu Musab Al Zarqawi, le fondateur de l’Emirat Islamique en Mésopotamie), où vivent de vastes foyers de disciples d’al Qaïda.
On a assisté à des discussions anxieuses, à Washington, dimanche, sur la perspective que le trône d’Abdallah puisse être renversé par une révolte islamiste, auquel cas l’Administration Obama n’aurait pas d’autre option que d’approuver une intervention des forces spéciales américaines et israéliennes pour défendre le roi et repousser une invasion de l’EI et d’Al Qaïda. Cependant, le péril islamiste intérieur peut s’avérer plus immédiat et aigu que la menace extérieure.
Ma’an, le 27 janvier.
Une source militaire consultée par Debkafile a révélé que l’armée jordanienne est, actuellement, concentrée sur trois secteurs : la frontière syrienne dans le nord, la frontière irakienne dans l’est, et lacapitale. Dans le premier cas, les troupes jordaniennes sont déployées pour tenir tête à une éventuelle incursion des forces de l’EIIL, qui sont concentrées dans l’Est de la Syrie. Elles sont aussi prêtes à résister à un éventuel assaut de l’armée syrienne, visant à refroidir les ardeurs de l’armée jordanienne, qui soutient les rebelles syriens, opérant dans le sud syrien, en position de tampon et de défense des frontières jordaniennes et israéliennes.
Dans le second cas, l’armée jordanienne se déploie directement en face des forces de l’EI, qui ont pris le contrôle de l’essentiel de la province d’Anbar, adjacente à la frontière jordanienne. Le troisième secteur important pour l’armée, c’est la capitale, Amman, où elle agit en tant quegardienne du régime royal. Si jamais la conflagration islamiste se propageait depuis Ma’an vers d’autres recoins du royaume, cette armée serait vite à court de ressources humaines, pour organiser simultanément sa défense face aux deux menaces, interne et externe.
Nos sources à Washington rapportent que le Général de Brigade Dennis McKean, Commandant de Centre de Commandement Avancé et conjoint américano-jordano-israélien, établi dans des souterrains fortifiés près d’Amman, a déjà reçu des ordres pour placer les 12.000 soldats américains et l’escadrille de F-16 de l’Air force US positionnés en Jordanie, en état d’alerte et d’intervention à tout moment.
Elles dévoilent également que le Brigadier Mc Kean est en communication directe avec le Chef d’Etat-Major d’Israël, le Lieutenant-Général Benny Gantz, le Commandant des Opérations spéciales en profondeur, le Général Major Shaï Avital et le Chef de la Force aérienne d’Israël, le Général Major Amir Eshel.
Le Commandement des Opérations en Profondeur a été instauré en cas de nécessité extrême de lancer des opérations contre l’Iran et le Hezbollah libanais, sur n’importe quel territoire étranger (chez eux, Soudan, Afrique, Amérique Latine…). Cette unité spéciale pourrait bien se retrouver, plutôt, dans des temps très rapprochés, à opérer derrière les lignes arrières de l’EIIL ou/et en Jordanie.
Washington, Jérusalem et Amman discutent intensément pour savoir s’ils doivent attendre que les troubles en Jordanie suivent une escalade, avant d’intervenir, ou s’ils doivent agir préventivement, avant que les choses ne deviennent hors de contrôle, en frappant très durement les forces de l’EI concentrées tout le long de la frontière irako-jordanienne de façon à les éparpiller aux quatre vents. Dans ce dernier cas, il y aurait une seconde décision à prendre, à savoir quelle est l’armée qui serait chargée d’infliger le coup magistral, où il devrait se situer, de façon à faire la meilleure estimation possible des répercussions potentielles sur la sécurité intérieure en Jordanie.
Le problème n’est, en effet, pas uniquement sécuritaire et militaire, mais culturel et politique.
L’EI a en effet un vieux compte à régler avec le Royaume hachémite. La Jordanie a collaboré avec les États-Unis dans la collecte du renseignement qui a conduit en juin 2006, à l’assassinat ciblé d’Abou Moussab Al-Zarqawi, un ressortissant jordanien qui dirigeait Al-Qaïda en Irak et reste considéré comme le « père spirituel » de l’EIIL.
Selon Assaf David (membre de l’Institut Truman de l’Université hébraïque pour la paix et du Forum pour la Réflexion Régionale à Molad), la Jordanie a toujours faut preuve de clémence, face à son propre djihadisme salafiste, un fait qui commence maintenant à la hanter. Il y a quelques semaines, elle a libéré de prison le chef salafiste Abu Muhammad al-Maqdisi et a acquitté le prédicateur radical Abou Qatada, pour avoir fomenté un attentat contre l’école américaine à Amman en 1998.
« La Jordanie fait, depuis plusieurs années, des clins d’œil aux djihadistes », déclare David. « Elle ne leur fait pas une guerre tous azimuts, mais les combat d’une manière sophistiquée, qui comprend les tentatives de coopter des djihadistes et de conserver des contacts avec eux. »
Un exemple est donné par Mohammed Shalabi, alias Abu Sayyaf, un salafiste radical de la ville de Maan au sud de la Jordanie, cette même ville qui a expérimenté la fermentation djihadiste depuis les succès de l’EIIL en Irak. Abou Sayyaf a contenu l’influence de l’EIIL en Jordanie, en jouant sur la sensibilité de l’élite dirigeante de la Jordanie.
« Abu Sayyaf était alternativement arrêté et libéré des prisons jordaniennes. Pourquoi ne le coffrent-ils pas loin dans un cachot pendant de nombreuses années ? Parce que les Jordaniens gèrent les djihadistes salafistes d’une manière très sophistiquée », a-t-il dit.
Mais la Jordanie n’est pas à l’abri de l’EI de l’intérieur. Comme beaucoup d’autres pays arabes, la Jordanie a concentré ses énergies dans la répression contre les Frères musulmans, et ces pays se réveillent au dernier moment face à la menace du djihadisme.
« Au bout du compte, soit vous choisissez de travailler avec une opposition islamiste pragmatique qui respecte les règles du jeu politique, soit si vous vous retrouvez avec des nihilistes qui ne croient en rien. »
Mais aujourd’hui, ajoute-t-il , une vague massive de réfugiés irakiens à l’Est de la Jordanie constitue une menace plus grande qu’une invasion militaire du royaume par l’EI.
Le courant intellectuel de la pensée représenté par l’EI, connu sous le nom Salafiya-Jihadiya ou djihadisme salafiste, a toujours plus attiré les Jordaniens ; par opposition aux Frères musulmans qui misent d’avantage sur la population palestinienne importante dans le Royaume.
« Les Frères musulmans sont essentiellement un mouvement urbain, tandis que le djihadisme salafiste est plus connecté à la périphérie et la campagne, ainsi que dans les zones urbaines défavorisées », a déclaré David.
DEBKAfile Reportage Exclusif 29 juin 2014, 8:44 PM (IDT)
Ajout : timesofisrael.com
Adaptation : Marc Brzustowski.