« Nous avons connu une ère où l’Etat d’Israël n’était qu’un rêve, nous devons tout faire pour garder ce que nous avons acquis à la sueur de notre front »
La sirène du souvenir vient de retentir. D’un seul coup, des millions d’Israéliens se sont figés. Au garde à vous. A la mémoire des 6 millions de martyrs juifs disparus durant la Shoah. Et, durant cette minute de recueillement, cette année, une seule question: qu’auraient-ils dit ?
Qu’auraient dit ceux qui ont péri dans les chambres à gaz d’Auschwitz, ceux qui ont combattu durant la révolte du Ghetto de Varsovie, ceux qui se sont cachés pour échapper aux griffes des nazis, en voyant les Israéliens se déchirer, comme ils le font depuis quatre mois, autour de la réforme judiciaire, et par extension autour du caractère juif et/ou démocratique de l’Etat d’Israël ?
On peut légitimement supposer qu’ils seraient, d’abord et avant tout, heureux de voir et de savoir que l’Etat d’Israël existe, qu’il dispose d’une armée puissante qui, si elle avait été là, il y a 80 ans, aurait volé à leur secours et bombardé les rails qui conduisaient les convois vers les camps de la Mort !
Ils regarderaient avec admiration les réalisations de ce petit Etat qui, en 75 ans, a réussi à s’imposer dans le concert des Nations ; qui a su faire face à l’adversité d’autres ennemis qui refusent son existence ; qui a su faire jaillir de l’eau du désert et la haute technologie de ses cerveaux ; d’un pays qui a su intégrer tant bien que mal des millions d’immigrants venus réaliser cette aspiration millénaire qu’eux-mêmes, les martyrs, ont murmuré dans les ghettos et dans les baraquements de Birkenau: « L’an prochain à Jérusalem ».
Un pays qui, en dépit des menaces qui ont pesé sur lui depuis sa création, s’est inspiré de l’esprit des prophètes pour préserver les grands principes des démocraties occidentales, qui jamais ne s’est laissé tenter par l’esprit de vengeance après deux milles ans de persécutions, d’inquisitions, de pogroms et cinq années de Shoah !
Alors qu’auraient-ils dit, ces héros du silence, massacrés parce que Juifs, en nous entendant nous disputer, parfois avec haine et mépris, autour de la réforme judiciaire ? La réponse à cette question est là, devant nous… pour peu de temps encore.
Elle est dans la bouche de ces 147 000 survivants qui ont vécu l’Enfer et en sont revenus, de ceux qui, au lieu de sombrer dans le désespoir, ont fait montre d’un incroyable esprit de résilience. Qui, sur la Terre d’Israël, ont su reconstruire des familles et développer un pays. Et qui, tout en perpétuant le souvenir de leurs proches disparus, ont décidé, résolument, avec un formidable courage d’aller de l’avant. Ecoutons-les ces survivants.
Leur message est clair et il nous permet de remettre les choses dans leur juste proportion: « Oui, bien sûr, au débat d’idées, mais non au moindre risque d’affaiblissement de l’Etat. Oui à la polémique mais non à la division ! Oui à la controverse, mais dans le respect mutuel: « Nous avons connu une ère où l’Etat d’Israël n’était qu’un rêve. Nous devons tout faire pour éviter de perdre ce que nous avons acquis à la sueur de notre front. L’Etat d’Israël est le garant de la sécurité de tous les Juifs, ceux qui y vivent et ceux qui n’y sont pas encore. Il faut tout faire pour le préserver ».
Alors bien sûr, disent-ils, il faut protéger nos valeurs juives et démocratiques, mais sans jamais oublier qu’en dépit de nos profondes différences nous sommes un seul peuple. Le peuple qui a le plus souffert dans l’Histoire des Nations mais aussi le peuple qui a toujours su sortir de l’Epreuve renforcé. N’oublions jamais que 3 ans après la plus grande catastrophe de son histoire, le peuple juif a réussi à créer son Etat et que même s’il n’est pas parfait, il reste, de par son existence, le garant qu’une nouvelle catastrophe de cette envergure de ne reproduira pas. Ne le mettons pas en péril ».
« Lorsque nous étions à la marche de la Mort, a dit un jour un vénérable Rabbi qui a survécu à la Shoah, nous étions tous semblables, rabbins et communistes, religieux et agnostiques…Et nous nous serrions forts les uns aux autres pour avoir moins froid. Nous étions unis. Ce sont les seuls instants que je regrette de cette terrible période!