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La médisance, maladie de notre siècle / Israël Magazine / Une étude qui va aux profondeurs de ce problème terrible de conséquences pour tous !

By 4 janvier 2016Le mot du jour

La médisance, maladie de notre siècle

medisancePar Rony Akrich.

La médisance est une affection contagieuse qui fait d’énormes dégâts au sein de la communauté humaine. C’est une authentique calamité dont la gravité et l’ampleur dans notre société sont cause de conflits permanents. La médisance en tant que maladie de l’esprit est un obstacle à l’épanouissement moral. Il n’est pas uniquement défendu de s’exprimer en diffamant son prochain, mais il est également défendu de concevoir arbitrairement, en son for intérieur, de mauvaises pensées vis-à-vis d’autrui.

Revenus d’un exil de 70 ans en Babylonie, suite à l’écroulement du royaume de Judée, des exilés interrogèrent le prophète Zacharie: devaient-ils perpétuer le souvenir du 9 Av dans le deuil et le jeûne? La réponse du prophète les exempta de leurs devoirs, ces derniers n’aspirant qu’à maintenir le peuple dans un sentiment d’expiation.

Rentrés au pays, il fallait tenter non pas de soigner les manifestations de l’affection mais au mieux de la juguler et d’en finir. Ce n’est un secret pour personne, la ruine d’Israël, la destruction des Temples et la dispersion restent intimement liées à la déchéance de l’ordre social et aux méfaits de la haine gratuite. Zacharie, porte-parole de l’Eternel, proclama haut et fort que l’on devait respecter la Parole divine:« Aimez la vérité et la paix », il leur enseigna dans son langage: « Ne pensez point de mal l’un de l’autre » (Zacharie 7).

Cette conception moraliste présentée par le prophète ne diffère guère des écrits contenus dans le texte toranique, il ne fait que réitérer, lui comme tous les autres prophètes, l’Ordonnance morale divine. « Tu jugeras ton prochain selon la justice ».
Il s’agit clairement d’infléchir la tendance critique vers une appréciation plus valorisante et moins défaitiste de la nature humaine. Les comportements de notre prochain nous entrainent bien souvent à des commentaires superflus, si ce n’est, déplacés.

Pourquoi ne pas envisager le meilleur et vouloir préférer l’appréciation la plus favorable? Pourquoi ne pas être un familier de l’optimisme, priser le positif des choses et des êtres ?

Il est grand temps de ne plus concevoir de généralités sur la seule base de phénomènes singuliers, notamment à propos du genre humain, honni soit qui mal y pense de son prochain et louable celui qui préfère la face éclairée.

Quand les sentiments de l’homme sont alimentés par la haine, cette dernière le conduit inexorablement vers une souffrance déchirante. Rongé en son for intérieur, il n’arrive plus à entretenir de relations sociales tandis que ses paroles deviennent offensantes.

La haine absolue, à l’état pur, livre l’individu dans un engagement au risque de sa propre existence, prêt à s’aliéner le monde entier. Elle apparait avec un sentiment d’incapacité, de n’être “rien’’, et se conserve par elle-même, dans sa propre impuissance.

Cependant, plus que la formule d’un découragement, elle atteste d’une faiblesse à pouvoir saisir son prochain différemment. Lorsqu’elle parvient à ce niveau, elle concerne l’être même de l’autre, élimine tout partage possible avec lui. Seul son effacement pourrait le rassurer.
Le haineux affirme qu’il n’accepte plus de perdre son temps avec autrui, ce qu’il veut c’est triompher, pire: il exige “d’être le gagnant’’ de ce qu’il considère comme une compétition, bien qu’il n’ait jamais eu l’honnêteté et le courage de se mesurer à cet autre.

Notre monde est de plus en plus haineux, c’est un monde où l’on aspire très fort à sa petite niche, au cocon où l’on se suffirait à soi-même, inaccessible à l’autre. On tente de contester l’existence de rivalités au lieu de lutter contre, on joue le jeu et quand elles resurgissent, c’est avec une force décuplée.

Au nom du refus de la violence, on produit des violences plus extrêmes

L’œuvre de Rabbi Méir Hacohen de Radin se préoccupe justement des lois prohibant la médisance. Dès son entrée en matière, le Hafetz Haïm évoque les calamités provoquées par la diffamation tout du long de notre Histoire.

Depuis Joseph bradé par ses frères, le récit biblique est parcouru par ce mal qui fourvoie la société des Hébreux vers une désolation des plus totales.

La destruction du Second Temple, balayée par le feu et les flam­mes, est directement conséquente de cette haine gratuite qui sévit parmi les Juifs. Ainsi identifie-t-il la haine gratuite à la médisance ! Nous voici confrontés à des hommes dont la démesure morale est inédite et surtout dramatique, nul ne peut rester serein et paisible au souvenir de l’interprétation de Rabbi Yéhouda Halevi lorsqu’il définit, avec nos maitres, l’Humain comme seule créature dotée de parole. (Kouzari, 1,35)

La parole est donc ce qui distingue l’Homme. Celui-ci est un être pensant, mais ce qui le détermine c’est son verbe, sa bonne parole, une parole positive.

Par contre, un verbe employé à mauvais escient et de manière récurrente prouve qu’il n’est pas simplement question d’une tare originale au sein de la nature humaine mais bien d’un souci capital.

Si l’homme est un être parlant et qu’il ne s’exprime pas comme il se doit, sa dimension de créature Humaine s’en trouve tronquée et le voilà plus proche de la bête que de la belle. “L’infect parler” illustre donc, sans aucun doute, un sérieux démantèlement de la nature de l’être.
La Parole est l’énoncé manifeste d’un esprit offrant au langage un supplément d’âme. L’être humain par sa simple présence véhicule des tendances tant dans le dit que dans le non-dit.

Si les hommes échangent et discutent entre eux, c’est que leurs propos ne sont pas vides de sens. Ce que chacun perçoit de l’autre n’est pas le verbe en tant que tel mais bel et bien sa signification, cette dernière est alors accueillie comme une intelligence absolue composée d’un vocable et d’un sens.

Il faut une intelligence pour constituer le signe et lui donner un sens, il faut une conscience sensible pour appréhender une présence. C’est la Présence qui est intelligente et qui se communique dans les mots.

Bannir les diffamateurs

Revenons donc au diffamateur. Si la nature de cette personne est soumise à la calomnie, il n’est guère étonnant que l’affection déclarée se dénonce comme psychogène. Les constructions de sa demeure moisissent, le derme du délictueux se desquame en morceaux, de même que ses oripeaux.

Afin d’éviter toute contagion et déférence au sujet, pour s’assurer qu’une telle conduite ne portera pas à conséquence sur les autres membres du peuple, on condamnera le coupable au bannissement. On le chassera de son milieu jusqu’à son total rétablissement et le Cohen en charge, authentique thaumaturge de l’âme, lui fournira la thérapeutique appropriée.

Dans ces conditions, il nous faut nécessairement instruire que le jugement en diffamation ne concerne pas uniquement les rapports entre les êtres mais qu’il affecte aussi les relations entre les factions et partis de la nation des Hébreux.

Le rav Kook dénomme “Torat Eretz Israël”, la Torah appréhendée dans ces proportions véritables, c’est-à-dire bien comme un Projet Divin dont Israël se fait fort de transmettre la quintessence à l’ensemble de l’Humanité.

Pour révéler cette “identité morale de la manière d’être Homme-Hébreu’’, il fallait qu’Israël retrouve un caractère National sur sa propre Terre et une fidélité sans faille aux Lois et Commandements de ce Projet. Cet enseignement transcende le particulier pour mieux convoler vers la dimension collective du Peuple, de la Terre et de la Torah d’Israël. (Orot ha-Tora, ch. 13)

Depuis plus d’un siècle le peuple juif se reconstruit sur son terroir ancestral et on se doit d’étendre à présent la leçon du Hafetz Haïm, relative à la médisance, à l’ensemble de notre société. Cette leçon évincera tout mouvement incitant à la haine entre Juifs, voire au déchaînement oral, et à pondérer les rapports entre les différentes communautés, organisations politiques ou écoles de pensée.

Exploitons le retour d’Israël pour asseoir l’estime et l’amitié entre les diverses tendances de notre collectivité. Favorisons les mérites, ne cherchons pas à offenser… En clair exclure de notre vocabulaire tout propos vain et offensant.

Nombreux ceux qui, dans leur vie privée, sont très agréables et soucieux de leurs proches. Ils surveillent leur langage, prennent des gants à chaque instant et témoignent constamment de prévenance.

A l’opposé et concernant leurs rapports avec les factions politiques, entre gauche et droite, religieux et laïcs, orthodoxes et sionistes, ces mêmes individus souffrent bien souvent d’un laisser-aller exacerbé dans leurs déclarations publiques.

Persuadés d’être les responsables du modèle de la vertu, les mandataires de la vérité, ils considèrent leur comportement comme tout à fait conforme et nous assurent que la conjoncture requiert de ne pas lésiner sur les moyens.

C’est bien là que le bât blesse, là que se loge la duplicité contre laquelle le rav Kook nous avait prévenu, toutes idéologies bienveillantes ne justifient guère les écarts de langage et les sentences d’une impudence sans nom.

Le Te’hilim 34 énonce très clairement : “Quel est l’homme qui veut la vie ? … Celui qui garde sa langue du mal‫”.

Or, l’étendue de la calomnie est proportionnelle à la quantité d’individus qui l’écoutent.

Cette critique s’adresse principalement aux hommes politiques qui, pour se disculper ou légitimer leur programme, s’estiment contraints de calomnier leurs opposants.

Maïmonide propose un contenu subsidiaire au délit de calomnie, lorsqu’il définit le médisant comme un “expert” en la matière (Hilkhot déot, ch.7). De pareils “experts” ne perpètrent pas ce méfait par hasard, ils l’établissent comme fonction essentielle et s’abandonnent à la diffamation de manière si méthodique que cet usage transforme leur nature de fond en comble.

Cette expression est analogue à celle de “Baal Teshouva” qui ne se satisfait pas d’un “mieux” restreint mais qui s’améliore perpétuellement vers la perception de D.ieu au travers du bon, du beau et du bien.

De nos jours, les moyens de communication sont devenus les artères foncières de la calomnie. Ils répètent avec malveillance les desseins outrageants que débitent couramment de notoires politicards ou hommes de religion. Le problème reste, cependant, si leurs auditoires doivent, eux aussi, assumer une part non négligeable de culpabilité, quant au délit de médisance, ceux qui diffusent ces propos illicites à des milliers de personnes atteignent le pinacle de l’exécrable !

Le système de défense des medias demeure immuable, ils sont l’unique rempart, l’assurance de nos libertés, car ils défendent le “droit d’expression et le droit du public à savoir”.

Il s’agit pour eux de préserver l’une des caractéristiques de la démocratie.

La question reste en suspens : la société humaine démocratique peut-elle se construire sur de telles fondations ?

Un philosophe disait un jour : “nous n’avons guère besoin du suicide de la démocratie pour illustrer sa volonté’’.

Nul n’est parfait, nous avons tout un chacun la responsabilité d’examiner les tares qui sont en nous, de les fustiger et d’y remédier, tout en révélant et en appréhendant les qualités que possèdent l’autre.

C’est le cas tout autant au niveau individuel qu’au niveau collectif.

Join the discussion 3 Comments

  • Fleur de Pâque dit :

    “On” est un fieffé menteur ! S’en méfier comme de la peste et du cholera !
    Que le Seigneur nous libère, nous Gentils, de cette culture gréco-latine qui nous a enseigné à tout critiquer !
    Amen !

  • Laurent Anoumou dit :

    Merci pour ce texte qui me permet de réaliser l’étendue des dégâts que j’ai fait par le passé. Que le Seigneur Yeshoua me donne la grâce de ne plus me plaire avec les diffamateurs et de tous ces “chrétiens” spécialisés en médisance.
    Un proverbe africain dit” Le mensonge a beau courir mais la vérité le rattrape TOUJOURS….”
    Jusqu’à la mort en Yeshoua leMessie, le Roi des juifs et de tous ceux qui ont placés leur espérance en Lui. Amen.

    • Haïm Goël dit :

      Bravo pour votre franchise et votre courage! Refuser de coeur la médisance et fuir les fameux cercles “spécialisés” en la matière est ABSOLUMENT REQUIS car ce sont le plus souvent les bouches de l’enfer et du mensonge camouflant leurs vrais crimes (vérifiés cent fois ! Ce sont les plus compromis dans le péché, le crime qui se muent toujours en criminels de haine vers autrui par…la bouche habile) qui sortent de là.
      35 ans de vie avec LUI et 33 ans de ministère me l’ont largement confirmé. COMME LE DIT L’AUTEUR DE L’ARTICLE CE SONT CES CRIMINELS LA QU’IL FAUT TRAQUER ET SORTIR DE LA COMMUNION FRATERNELLE ET DU PEUPLE DE D.IEU. QUAND LE PEUPLE DE L’EGLISE SE LEVERA-T-IL POUR LE DIRE QUAND L’OCCASION FERA NON LE LARRON MAIS LE BON SAMARITAIN? QUAND, QUAND? Mais comme cela peut même accidentellement nous concerner tous, ne serait-ce qu’une fois, contentons-nous déjà de nous méfier (de nous en priorité), d’aimer (et en priorité le diffamé) comme l’ecriture nous le demande (avec une gestion biblique…). Ne pas prendre parti à l’audition d’une rumeur et avertir la personne diffamée est déjà un pas excellent qui peut porter du fruit. Car lorsque l’on connaît l’auteur du propos diffamateur et que le diffamé s’adresse à lui, très souvent il se “dégonfle” et s’excuse, ou lâchement mais vrai, déclare qu’il l’a entendu de X, qui le recevait de Y. Cette démarche impressionne souvent les bavards car ils se savent alors sous projetcteur, loin du sale et misérable et confortable anonymat.

      NB: pas inutile de faire rappel: “les lâches n’entreront pas dans le royaume des cieux”…et c’est encore heureux car que faire d’eux ce jour-là et là?
      Shalom
      Haim

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