En passant ce matin devant Gilo, quartier de 35.000 habitants au sud de Jérusalem, et en voyant les grues s’affairer autour d’immeubles en construction, je n’ai pu m’empêcher de rire, de « pouffer » de rire, allusion à la pathétique onomatopée prononcée par John Kerry face au Sénat, et qui qualifiait cette quasi-ville de « settlement » ! {note d’Etzbetzion : “settlement” = “implantation”, traduit de manière inique en français par “colonie”. Or, il est bon de savoir que le quartier de Guilo se situe du côté israélien de la ligne verte et non dans les territoires disputés.}
Je me suis dit que les habitants de ce quartier qui s’affairent ces jours-ci en vue de la prochaine fête ne s’imaginaient jamais que leur lieu de résidence deviendrait un jour aussi célèbre dans le monde, bien plus que les faubourgs détruits et moribonds des grandes villes syriennes.
Quel abîme entre les déclarations hostiles, les éditoriaux du « New York Times » ou du « Haaretz », les ininterrompues résolutions anti-israéliennes à l’ONU et la simple réalité de ce qui se déroule progressivement sous nos yeux : le retour d’un peuple sur sa terre et ses retrouvailles avec la capitale vers laquelle ses yeux et son cœur étaient tournés depuis presque 2000 ans.
Le peuple juif célèbrera dans quelques jour la fête de Pessah, la Pâque juive qui commémore la libération des Hébreux d’Egypte et leur périple dans le désert en route vers la Terre Promise, expression qui fait désormais partie du vocabulaire d’une Humanité qui semble avoir oublié à qui elle fut promise !
Lors de la soirée pascale, où se réunissent les familles juives du monde entier autour d’un rituel didactique, un cri renouvelé depuis la nuit des temps surgit : « L’an prochain à Jérusalem reconstruite » ! Tiens donc ! Jérusalem ? Reconstruite ? Le livre utilisé lors de cette soirée, la Haggada, date du 1er ou du 2e siècle, où l’Islam n’avait pas encore fait son apparition, et où tout le monde savait encore que le terme de « Palestine » avait été trouvé par l’empereur romain Hadrien après la Révolte juive de l’an 132 pour effacer le nom de la Judée vaincue. Tout comme celui de Jérusalem, rebaptisée « Aelia Capitolina ».
Lors de cette même soirée pascale, le rituel introduit un texte qui aurait pu paraître empreint de paranoïa s’il ne traduisait pas une triste réalité qui a accompagné le peuple juif durant sa longue marche dans le désert des Nations, et qui ne s’est hélas pas achevée avec son retour à l’indépendance nationale en 1948 : «…à chaque génération, des gens se sont levés pour nous détruire mais le Saint, béni soit-il, nous a sauvé de leurs mains ».
N’est-ce-pas là un résumé exact de ce qui s’est passé et se passe encore ? Quel que soit leurs habits, leur langue ou leurs mobiles, des gens et des peuples se sont attaqués au peuple juif dans les différentes expressions de son identité : religieuse, nationale ou territoriale. Ils ont utilisé toutes sortes de stratagèmes et méthodes, mais en vain, même si cela a coûté très cher. Et comme le patriarche Jacob recevant le nom « Israël » après son combat avec l’Ange, le peuple juif, blessé à la hanche, poursuivait inlassablement sa marche dans l’Histoire.
J’ai repensé à cette phrase en passant par le quartier de Gilo. Certes, le pathétique et maladroit John Kerry ne veut pas « détruire » Israël même s’il soutient indirectement ceux qui le souhaitent et y oeuvrent. Mais il y a dans cette attitude tout comme dans celle de l’Europe des relents d’un scénario par trop répété dans l’Histoire et qui consiste à s’en prendre au peuple juif par tous les moyens, de manière irrationnelle, pour l’affaiblir, le mettre au ban, le juguler.
Le plus célèbre des commentateurs bibliques, Rachi, qui vécut à Troyes au 11e siècle, écrivait à propos du premier verset de la Genèse « que la Bible commençait par le récit de la Création du monde et l’histoire des Patriarches afin de montrer que la Terre d’Israël a été promise aux Enfants d’Israël, car un jour les Nations du monde viendront vers Israël et lui diront : ‘Vous êtes des voleurs car vous avez pris la terre des sept peuples’ ». Rachi n’était pas un prophète, mais il savait tout simplement que le texte biblique comportait un message d’Eternité et que toute l’Histoire se déroulait selon un schéma déjà décrit dans ce Livre.
John Kerry, Mahmoud Abbas et Catherine Ashton, pour ne parler que d’eux, ne sont que des péripéties de l’Histoire juive. Ils s’inscrivent dans le scénario décrit lors de la soirée pascale et ne sont que des acteurs médiocres d’une pièce qui les dépassent de loin. Sans qu’ils en soient conscients, ils sont là bien plus pour faire prendre conscience au peuple juif de sa mission que pour lui nuire.
Et lorsque je traverse les rues de Gilo, je pense à cette merveilleuse prophétie d’Amos, qui vécut il y a 28 siècles : « Je ramènerai les captifs de mon peuple Israël, ils restaureront leur villes détruites et s’y établiront, planteront des vignes et en boiront le vin, cultiveront des jardins et en mangeront les fruits. Je les replanterai dans leur sol et ils ne seront plus déracinés du sol que Je leur ai donné, ainsi parle l’Et-ernel ton D-ieu ».
Shraga Blum est un journaliste indépendant qui contribue à l’hebdomadaire “P’tit Hebdo” et un analyste politique pour plusieurs sites internet en français.
Article posté sur le site d’I24News quelques jours avant Pessa’h.