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L’Alabama interdit l’avortement, un coup d’arrêt pour le progressisme / Par Charlotte d’Ornellas

By 25 mai 2019mai 3rd, 2020Le mot du jour

L’Alabama interdit l’avortement, un coup d’arrêt pour le progressisme

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Par Charlotte d’Ornellas

Publié le 15 mai 2019

Deux semaines après le vote du parlement de l’état fédéré américain de l’Alabama, c’est le sénat qui vient d’adopter un projet de loi visant à interdire l’avortement dans l’immense majorité des cas. Aux États-Unis, la bataille de l’avortement se poursuit.

 

Il y a deux semaines, le parlement de l’Alabama (à 74 voix contre 3, les démocrates ayant largement refusé de participer au vote) adoptait un projet de loi visant à faire de l’avortement un crime de classe A pour le médecin qui le pratiquerait illégalement (et non pour la femme y ayant recours). Concrètement, un praticien condamné serait donc passible d’une peine de prison pouvant aller jusqu’à la perpétuité. Ce mercredi, c’est cette fois-ci le sénat de l’état fédéré américain qui a lui aussi adopté le texte. Son président Will Ainsworth s’est alors félicité d’« une étape majeure dans la défense des droits de l’enfant à naître », affirmant que « Roe doit être combattu et je suis fier que l’Alabama ouvre la voie ». Concrètement et en cas d’adoption définitive du texte, les seules exceptions possibles à cette interdiction de l’avortement seraient le danger de mort pour la mère, ou l’anomalie létale pour le fœtus. Le texte se trouve donc aujourd’hui sur le bureau de Kay Ivy, gouverneur de l’Alabama, dernier à devoir apposer sa signature pour que le texte soit adopté.

Un débat vigoureux aux États-Unis, impossible en France

Conséquence prévisible et prévue par les partisans de ce texte : l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU) a immédiatement annoncé qu’elle allait saisir la justice pour empêcher l’application de ce texte dans l’état concerné.
Conséquence non seulement prévue, mais aussi assumée par les soutiens de ce texte, pour une raison simple : ils espèrent que ce recours ira jusqu’à la Cour suprême des États-Unis, ce qui obligerait cette institution – désormais composée majoritairement par des juges conservateurs – à se repencher sur l’arrêt « Roe V. Wade » prononcé en 1973 pour autoriser la pratique de l’avortement aux États-Unis. C’est en effet ce qu’avait déclaré la parlementaire à l’origine de ce projet de loi, Terri Collins, au moment du premier vote : c’est « un moyen de revoir la décision Roe c. Wade, qui est entachée d’un vice constitutionnel ».

Plus qu’un « recul » ou qu’un « retour en arrière », comme certains se sont plu à commenter, il s’agit donc bien là de la traduction politique d’un combat entre partisans et détracteurs de l’avortement qui n’ont pas changé d’avis – ni les uns, ni les autres – depuis l’adoption de cet arrêt par une Cour suprême alors majoritairement démocrate, et donc progressiste.

Ce débat, qui continue à déchirer les États-Unis, demeure quasi impossible en France. Pour la simple raison que progressistes et conservateurs ne parlent pas de la même chose lorsqu’ils abordent le sujet, rendant par conséquent toute discussion impossible, ou pire encore, la réduisant à une série d’invectives salissantes.

Pour les conservateurs, le fœtus est une vie humaine distincte de la femme qui le porte.

Les « progressistes » utilisent d’abord le curieux argument de l’inéluctabilité, l’impossibilité de concevoir pareille décision « alors que nous sommes en 2019 », comme si le temps qui passe constituait en tant que tel un argument. Les Républicains de l’Alabama viennent leur rappeler que la marche du Progrès n’est pas une fatalité, mais bien une somme de décisions politiques et qu’il peut donc être inversé par d’autres décisions politiques contraires. Ils évoquent surtout les « droits de la femme » et sa liberté à « disposer de son corps » et c’est sur ce point précis que le débat est rendu impossible. Car les conservateurs américains, comme tous les opposants à l’avortement du monde, n’entendent pas s’opposer aux droits de la femme ni même remettre en cause sa liberté à disposer de son corps en l’occurrence : ils répondent qu’il ne s’agit précisément pas du corps de la femme, mais de celui d’une autre personne, le fœtus, dont la vie ne peut dépendre de qui que ce soit. Ils insistent même : le fœtus est déjà une vie humaine que la loi des hommes ne peut se permettre de menacer. C’est donc par cohérence qu’ils sont allés jusqu’à refuser l’amendement démocrate visant à élargir l’autorisation aux cas de viol ou d’inceste. Ce qui a fait réagir Bobby Singleton, membre démocrate du Sénat : « Vous dites à ma fille : tu ne comptes pas dans l’état de l’Alabama… Les hommes peuvent te violer et tu auras ce bébé si tu tombes enceinte. »

Or, le viol est puni en Alabama comme ailleurs, et les conservateurs ne remettent évidemment pas cette peine en cause. Leur cohérence est ailleurs : le viol est un crime, et le criminel est le violeur. C’est lui qui doit donc être puni, et non l’enfant éventuellement issu de ce viol, déjà considéré comme tel lorsqu’il est fœtus, et innocent du crime commis par son géniteur.  Les « progressistes » peuvent évidemment contester cette réflexion, ils le font partout dans le monde où la loi est massivement de leur côté. Ils ne peuvent en revanche masquer cette cohérence conservatrice, aussi difficile soit-elle à considérer de nos jours. Le débat reste le même, quasiment impossible à avoir en France : si l’avortement vise à supprimer un embryon, quelle est donc la nature exacte de cet embryon ?

Source : https://www.valeursactuelles.com/clubvaleurs/societe/lalabama-interdit-lavortement-un-coup-darret-pour-le-progressisme-107030

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