Le rabbin Yehuda Glick milite pour la construction du «troisième Temple» sur l’esplanade des mosquées. Cette tentative d’assassinat menace d’accentuer encore la tension qui pèse sur la ville.
Correspondant à Jérusalem
L’un des plus influents représentants de l’extrême droite israélienne, le rabbin Yehuda Glick, a été grièvement blessé par balles mercredi soir dans le centre de Jérusalem. Des barrages ont été immédiatement dressés à travers la ville tandis que l’homme était transféré à l’hôpital Shaare Tsedek, où il se trouvait dans un état «stable». «Nous sommes à la recherche d’une moto qui a pris la fuite après la fusillade», a indiqué le porte-parole de la police, Micky Rosenfeld, sans se prononcer sur le mobile de cette tentative d’assassinat. Le maire de la ville, Nir Barkat, a pour sa part dénoncé «un attentat terroriste provoqué par la campagne d’incitation à la violence à laquelle se livrent les Palestiniens depuis des semaines».
D’origine américaine, Yehuda Glick milite depuis de nombreuses années pour la remise en cause du statu quo sur l’esplanade des mosquées. Soutenu par un nombre croissant de Juifs religieux, il appelle à y reconstruire le Temple détruit, en l’an 70, par les Romains. Un engagement qui fait de lui l’une des personnalités les plus détestées par les Musulmans de Jérusalem. Le vaste plateau, qui s’élève au cœur de la vieille ville et abrite le Dôme du rocher ainsi que la mosquée al-Aqsa, constitue en effet le troisième lieu saint de l’islam. Depuis la conquête du site par l’armée israélienne en juin 1967, les pèlerins juifs ont le droit d’y accéder à certaines heures mais pas celui d’y prier.
Fondateur en 1987 de l’Institut du Temple, le rabbin Glick n’a depuis lors cessé d’agir pour faciliter l’accès des Juifs à l’esplanade des mosquées. Des visites qui, longtemps marginales, se banalisent depuis quelques années. Chaque automne, durant les fêtes du nouvel an juif et de Soukkot, plusieurs centaines de pèlerins se rendent ainsi sur le «mont du Temple» sous une forte protection policière. Des heurts quasi-quotidiens opposent alors la police israélienne à des fidèles musulmans qui refusent toute modification du statu quo.
Mercredi, Yehuda Glick venait de donner une conférence intitulée «Israël est de retour sur le mont du Temple» lorsqu’il a été pris pour cible, vers 22h30, au sortir du Centre pour l’héritage de Menachem Begin. Plusieurs autres ténors de la droite nationaliste, dont le député du Likoud Moshe Feiglin, avaient participé à l’événement. Le ministre du Logement, Uri Ariel, a déclaré dans la soirée: «Les balles qui ont visé Yehusa Glick étaient destinées à tous les Juifs qui veulent exercer leur droit de visiter le lieu qui leur est le plus saint. J’appelle le premier ministre à permettre à tous les Juifs d’accéder librement au mont du Temple.»
Cette tentative d’assassinat risque fort d’accentuer encore la tension qui pèse depuis plus de trois mois sur Jérusalem. L’enlèvement et le meurtre de trois étudiants israéliens, suivis de celui d’un adolescent palestinien, ont enclenché au début de l’été un cycle de violences qui ne semble pas devoir s’arrêter. Mercredi soir, plusieurs sites israéliens d’extrême droite appelaient leurs partisans à converger, jeudi en milieu de journée, vers l’esplanade des mosquées. Lors de son récent passage à Jérusalem, le secrétaire-général de l’ONU, Ban Ki-Moon, avait appelé à cesser les «provocations» autour des Lieux saints. Daniel Seidemann, avocat et activiste israélien, pronostique: «Les prochaines heures et les prochains jours vont être le théâtre de menaces extrêmement sérieuses contre la stabilité de Jérusalem».