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L’impact de la Shoah en Pologne© Vidéo

By 6 février 2018Vidéo
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L’impact de la Shoah en Pologne© Vidéo

L’adoption d’une loi condamnant ceux qui rappelleraient l’implication de la Pologne dans l’extermination des Juifs provoque l’indignation. Ils entrevoient dans cette loi une tentative de faire oublier le rôle de certains Polonais dans l’extermination des juifs.

Six millions de Polonais, dont trois millions de Juifs, ont été tués pendant la Seconde guerre mondiale. Pourquoi la reconnaissance de la Shoah en Pologne est un processus particulièrement long et complexe ?

Bref historique  de la construction de la Mémoire de la Shoah en Pologne

1945: pendant que le “monde libre” commence à découvrir les horreurs commises sous le régime nazi, les Polonais entrent dans une nouvelle période de totalitarisme. Le Parti communiste efface les traces des persécutions commises contre les juifs. A la Libération, ont encore lieu des violences contre la communauté juive. Ce qui donne ainsi lieu au premier pogrom. Le premier pogrom a lieu à Cracovie en Août 1945, celui-ci ce traduit par de nombreuses attaques de synagogues, de centres communautaires et d’appartements, ainsi que de nombreux assassinats de juifs. On voit les pillages se multiplier dans toute la région qui accueille les juifs.

1947 : le Parlement crée le Musée d’Auschwitz. Il est dédié aux victimes polonaises, sans référence aux juifs.

1968 : Le régime communiste soutient une campagne anti-sioniste en  Pologne. La plupart des juifs restés en Pologne émigrent.

Le 10 Juin 1967, jour de la fin de la guerre des Six Jours entre Israël et les pays arabes, la Pologne rompt ses relations diplomatiques avec Israël. Beaucoup de Juifs polonais ont soutenus les Israéliens. En 1967, la très grande majorité des 40 000 Juifs résidants en Pologne sont parfaitement assimilés dans la société polonaise. Malgré cela ils furent l’année suivante la cible d’une campagne menée par le pouvoir central les assimilant à une trahison envers la Pologne. Les “partisans” de Moczar continuent de propager la thèse d’un “complot sioniste révisionniste”. La protestation étudiante contre la censure fournit le prétexte d’une répression contre des étudiants juifs.

L’épuration est menée, plus ou moins ouvertement, sur les lieux de travail et d’études, notamment les universités,  ou encore dans les rangs du Parti. Elle permet également à ses promoteurs de se débarrasser d’adversaires politiques non – juifs. Une centaine de ministres et hauts fonctionnaires sont limogés et exclus du Parti. Au ministère des Affaires Étrangères, 40 % des postes moyens et élevés sont affectés par la purge. Au total, quelque 9 000 personnes seront, au fil des semaines, écartés des postes généralement élevés qu’ils occupent. Les représailles du pouvoir ne se bornent pas à l’épuration antisémite : les intellectuels les plus engagés en sont également victimes, inscrits sur une “liste noire” et interdits de publication. Tous sont régulièrement vilipendés dans la presse.

À cause de la pression, politique et policière, quelque 25 000 Juifs vont émigrer entre 1968 et 1970. La plupart d’entre eux décident de quitter le pays, soit pour Israël (moins d’un quart), soit pour un pays de l’Ouest. Un exode massif commence alors.

La campagne qui visait plus particulièrement les Juifs ayant exercé de hautes fonctions pendant la période stalinienne, atteignit l’ensemble des Juifs polonais, quel que soit leur milieu.

Il y eut de graves conséquences suite aux évènements de mars 1968. La campagne antisémite laissa une très mauvaise image de la Pologne à l’étranger. Certains intellectuels polonais révoltés à l’idée d’une campagne antisémite menée par l’État s’y opposèrent. Certaines des personnes étant passées à l’Ouest à cette période fondèrent des mouvements anti-communistes qui encouragèrent l’opposition en Pologne.

Ces révélations ont soulevé un débat houleux en Pologne, mais peu à peu, Gross à fait “école” – si ce n’est dans la population, du moins parmi l’élite culturelle et scientifique. “Ces chercheurs issus des sciences humaines et sociales et regroupés autour de la revue ‘Zaglada Zydow’ (“Extermination des juifs”), ont bâti un discours scientifique et ils ont ainsi permis aux Polonais de sortir quelque peu de leur ‘innocence’ “, estime Jean-Charles Szurek. En 2001, le président polonais de l’époque Aleksander Kwasniewski sort officiellement le pays du déni et présente aux juifs les excuses de la Pologne pour ce crime.

“Les massacres de juifs par des Polonais sont des faits historiques, établis par une équipe d’historiens polonais tels que Jan Tomasz Gross ou Jan Grabowski. Une période très riche pour la recherche a commencé à la fin des années 1990, avec une liberté de la recherche et une ouverture des archives. Mais l’arrivée du gouvernement d’extrême droite [en 2015] y a mis un terme”, tranche Annette Wieviorka.

Années 1970 : Les manuels scolaires commencent à évoquer le sort des juifs pendant la guerre.

1979 : Le pape Jean-Paul II visite le camp d’Auschwitz. Mémorial de Birkenau.

1983 : Des religieuses polonaises fondent un couvent dans l’ancien théâtre du camp d’Auschwitz. La polémique du “Carmel d’Auschwitz” donne lieu à de longues négociations entre, notamment, les plus hautes instances juives et catholiques.

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1985 : La télévision polonaise diffuse Shoah, de Claude Lanzmann.

1988: Première Marche des Vivants

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1990 : Lech Walesa est élu Président de la République.

1995 : La Pologne commémore le Cinquantenaire de la libération du camp d’Auschwitz. La Commission israélo-polonaise pour les manuels scolaires publie ses recommandations.

1996 : Introduction du terme Holocauste pour évoquer l’extermination des juifs.

1999 : Grande réforme des programmes éducatifs. Synagogue du quartier de Kazimierz, à Cracovie. La Pologne redécouvre depuis les années 1980 son patrimoine juif.

2001 : La parution de Les Voisins suscite de vives réactions. L’universitaire américain Jan Tomasz Gross y raconte comment des Polonais ont massacré un millier de leurs concitoyens juifs dans la ville de Jedwabne, en 1941.

2005 : le 19 avril est décrété jour de commémoration de la Shoah, en mémoire du début de l’insurrection du ghetto de Varsovie en 1943.

2007: à la demande du gouvernement polonais, le Comité du patrimoine mondial de l’Unesco a officiellement changé le nom du « Camp de concentration d’Auschwitz » en « Auschwitz Birkenau

2015: Arrivé au pouvoir, le parti Droit et Justice (PiS), conservateur et proche de l’Église catholique, mène une politique visant à réduire la séparation des pouvoirs, rétablir la morale religieuse et prendre ses distances avec l’Europe.La réécriture de son histoire nationale en fait partie.

2018: le Sénat polonais a voté une loi qui punit par des amendes ou des peines de prison, allant jusqu’à trois ans de réclusion, ceux qui attribuent “à la nation ou à l’État polonais, de façon publique et en dépit des faits, la responsabilité ou la coresponsabilité des crimes nazis commis par le IIIe Reich allemand (…), de crimes de guerre ou d’autres crimes contre la paix et l’humanité”.

Quelques faits marquants des persécutions antisémites des Juifs en Pologne durant la Shoah

 

La Pologne a été envahie en 1939 par l’Allemagne nazie, qui a mis sur pied une véritable industrie d’extermination des Juifs. La Pologne comptait à l’époque plus de 3 millions de juifs, la plus grande communauté juive du monde.

Dès 1940, les Allemands les ont rassemblés dans des ghettos ; et en mars 1942, ils ont commencé à les déporter vers les six camps de la mort installés sur le territoire occupé : Chelmno, Belzec, Sobibor, Treblinka, Majdanek et Auschwitz-Birkenau. Environ six millions de personnes y ont été tuées, dont la moitié environ étaient des juifs polonais.

Cimetière juif de Treblinka (1992)

“La politique d’extermination des juifs est une politique nazie, mais les Polonais ont mis la main à la pâte. L’antisémitisme en Pologne est ancien et violent. Il existait avant, pendant et après la guerre”, surenchérit Annette Wieviorka, directrice de recherche émérite au CNRS, et codirectrice de l’ouvrage de “Juifs et Polonais : 1939 – 2008”.

Au-delà des dénonciations, des pogroms ont eu lieu dans l’est de la Pologne en 1941 et 1942, dont le plus connu est le massacre de 1 600 juifs dans le village de Jedwabne par des paysans polonais, en juin et juillet 1941.

Longtemps attribué aux troupes allemandes, ce massacre a été documenté par l’historien américain Jan Tomasz Gross. Dans son livre “Les Voisins”, publié en 2001, il est le premier à soulever la responsabilité des Polonais dans des massacres antisémites pendant la Seconde Guerre mondiale.

Pogroms qui se sont d’ailleurs poursuivis après la guerre. En 1946 par exemple, dans le petit village de Kielce, où la population locale s’en est prise à des rescapés juifs de la Shoah. Quarante-deux personnes y ont été assassinées, dont des femmes et des enfants, battus à mort, lapidés ou tués par armes à feu.

Environ 1 500 Juifs ont été tués après la fin de la guerre. 100 000 Juifs ont quitté la Pologne dans les trois mois qui ont suivi le pogrom de Kielce. Il est resté en Pologne, 100 000 à 120 000 Juifs seulement.

Le site du mémorial Yad Vashem à Jérusalem, dédié à la mémoire de la Shoah, recense 6700 Polonais distingués comme “Justes parmi les Nations” pour avoir aidé les Juifs sous l’occupation nazie.

 

Quand les politiques réécrivent l’histoire

Aujourd’hui, les historiens s’inquiètent plus que jamais de l’intrusion du politique dans leur travail. “Cette loi est une volonté politique de réécriture totale d’une histoire qui vient tout juste d’être écrite”, dénonce Annette Wieviorka. Elle, comme Szurek, dénonce les rappels à l’ordre et avertissements que subissent les chercheurs qui ne vont pas dans le sens de l’image “à la fois héroïque et victimaire” que les autorités polonaises veulent donner de leur pays.

Jean-Charles Szurek en a lui-même fait les frais après avoir préfacé le livre de Sidi N’Diaye “Tutsis du Rwanda et Juifs de Pologne, victimes de la même haine ?”. “Si la loi passe, je ne sais pas ce qu’il se passera lorsque je publierai mon prochain article sur la question juive en Pologne”, s’interroge le chercheur.

Le texte a provoqué la colère d’Israël, un avertissement des États-Unis et des protestations de l’Ukraine. Le Sénat polonais a voté le 1er février une loi controversée sur la Shoah.

Destiné à défendre l’image du pays, le texte punit par des amendes ou des peines de prison, allant jusqu’à trois ans de réclusion, ceux qui attribuent “à la nation ou à l’État polonais, de façon publique et en dépit des faits, la responsabilité ou la coresponsabilité des crimes nazis commis par le IIIe Reich allemand (…), de crimes de guerre ou d’autres crimes contre la paix et l’humanité”. La loi n’entrera en vigueur qu’une fois signée par le président Andrezj Duda.

Pour les conservateurs nationalistes au pouvoir, cette loi a d’abord vocation d’empêcher l’utilisation de l’expression “camps de la mort polonais” à propos des camps d’extermination installés par les nazis sur leur territoire occupé. Cette expression est née il y a une vingtaine d’année dans la presse anglo-saxonne, et elle est due à une mondialisation de la mémoire

“Je suis très en colère, car ce sont de vrais gens – des historiens – qui sont mis en cause avec cette loi et c’est leur travail qui est nié”, s’insurge Annette Wieviorka, qui dénonce une “offensive insupportable contre l’intelligence”. Cette “offensive” est d’autant plus inquiétante qu’elle n’est pas isolée. “Cette loi est le fait d’un gouvernement qui s’attaque aux libertés des femmes, à l’Europe, à la démocratie, à la justice, et à la liberté d’énoncer des faits historiques”, rappelle-t-elle.

Adaptation par JG

Sources

www.france24.com

akadem.org

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