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Pourquoi Netanyahou a joué le tout pour le tout (i24News)

By 7 mars 2015Etz Be Tzion

Le discours du Premier ministre Benyamin Netanyahou devant le Congrès américain peut se résumer ainsi : les États-Unis peuvent et doivent conclure un meilleur accord avec l’Iran ; les restrictions sur le programme nucléaire iranien ne doivent pas être levées ; il faut maintenir la pression économique sur Téhéran et menacer de ne pas signer d’accord du tout. “Ils ont besoin de l’accord beaucoup plus que vous” a insisté Netanyahou. L’argument du Premier ministre est que l’Amérique est la partie la plus forte dans cette équation, qu’elle peut infliger des dommages économiques à l’Iran, et que la perspective d’un effondrement économique finira par convaincre les ayatollahs de renoncer à leurs milliers de centrifugeuses, à leurs tonnes d’uranium enrichi, et à leurs installations à eau lourde. En d’autres termes, l’accord qu’il faut conclure est un accord qui neutralisera les capacités nucléaires de l’Iran.

La leader démocrate Nancy Pelosi a déclaré après le discours qu’il constituait “une insulte à l’intelligence des États-Unis” et qu’il était empreint de “condescendance” envers “la détermination des États-Unis à empêcher la prolifération nucléaire.” L’analyste politique du Haaretz Yossi Verter a écrit quant à lui qu’Obama et Kerry émergent du discours de Netanyahou comme des “crétins naïfs tombés sous le charme des salauds persans.” Après avoir écouté le discours de Netanyahou, on se demande en effet pourquoi l’Administration Obama envisagerait un aussi mauvais accord avec l’Iran. Soit Obama et Kerry sont convaincus que les États-Unis n’ont pas d’autre choix, soit ils sont tout simplement incompétents et irresponsables.

Pour Netanyahou, l’accord imminent avec l’Iran est inacceptable parce qu’il fait deux concessions fatales : 1) L’accord autorise l’Iran à conserver sa vaste infrastructure nucléaire, ce qui permettra à l’Iran de produire une bombe en moins d’un an ; 2) L’accord stipule que toutes les restrictions contre le programme nucléaire iranien seront levées après une décennie. Comme l’a écrit le Washington Post: « un processus qui a débuté avec l’objectif d’éliminer la capacité de l’Iran à produire des armes nucléaires a évolué vers un accord qui tolère et restreint temporairement cette capacité. »

Une autre question cruciale que Netanyahou a abordé est celle des missiles balistiques intercontinentaux de l’Iran. Ces missiles ne font même pas partie des négociations. Téhéran a réussi à axer les négociations sur son programme nucléaire, détournant ainsi l’attention de deux autres questions importantes qui y sont liées :1) L’accumulation par l’Iran de missiles longue portée qui peuvent transporter une ogive nucléaire ; 2) Les activités subversives de l’Iran (y compris son soutien au terrorisme) au Proche-Orient, en Amérique latine, et en Afrique. D’où l’insistance de Netanyahou de ne pas lever les sanctions contre Téhéran.

Un accord n’a de sens que s’il est possible de faire confiance à l’Iran. Or le rapport publié par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) il y a deux semaines prouve qu’il est impossible de faire confiance à l’Iran. Le rapport confirme que les stocks d’uranium enrichi de Téhéran ne cessent de croître (ils ont atteint environ 15.000 kilos), que l’Iran développe une charge nucléaire pour un missile (en d’autres termes, que Téhéran développe une ogive nucléaire), que l’Iran cache son programme militaire et empêche l’accès à l’AIEA à ses installations militaires de Parchin.

Parchin n’est pas le seul site nucléaire militaire que l’Iran a essayé de cacher à l’Occident. Le 24 février 2015, le groupe d’opposition iranien MEK (qui a révélé l’existence des installations nucléaires secrètes à Natantz et à Arak) a révélé une installation souterraine près de Téhéran (“Lavizan 3”) où l’Iran développe une nouvelle génération de centrifugeuses à haut débit pour l’enrichissement d’uranium.

Certains prétendent qu’il n’est pas dangereux de laisser à l’Iran la possibilité de fabriquer une bombe en moins d’un an parce que les Etats-Unis seront capables de s’en apercevoir à temps. Cette théorie est contredite par l’ancien chef de la CIA Michael Hayden, qui a déclaré à la Commission des Affaires étrangères de la Chambre des Représentant le 20 novembre 2014: “sans régime d’inspection permettant de visiter tous les sites dans un court préavis, les renseignements américains ne peuvent pas fournir d’avertissement adéquat sur les développements nucléaires iraniens.”

Pourquoi, donc, l’Administration Obama est-elle aussi irresponsable? Probablement parce qu’Obama veut à tout prix conclure un accord avant la fin de son mandat. Il veut un accord plus que les Iraniens. D’où la petite phrase de Netanyahou: “ils ont besoin de l’accord beaucoup plus que vous.” Obama semble penser le contraire. En effet, il est tellement déterminé à parvenir à un accord qu’il en envisage un qui mettrait clairement en danger Israël. C’est pourquoi Netanyahou a décidé de jouer le tout pour le tout.

C’était un risque calculé, et Netanyahu a eu raison de le prendre.

Emmanuel Navon dirige le département de Science politique et de Communication au Collège universitaire orthodoxe de Jérusalem et enseigne les relations internationales à l’Université de Tel Aviv et au Centre interdisciplinaire d’Herzliya. Il est membre du Forum Kohelet de politique publique.

 

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