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Une belle émotion à ne pas manquer, voyez la vidéo en fin d’article. “Comme si c’était hier”, un éclairage exceptionnel sur les enfants juifs cachés dans la Belgique occupée (Vidéo)

By 13 décembre 2020Le mot du jour

Comme si c’était hier, d’Esther Hoffenberg et Myriam Abramowicz. Ce qui frappe aujourd’hui, plus de quarante ans après sa réalisation, c’est à quel point ce film témoigne de son temps presque autant qu’il éclaire la période dont il traite…….Détails & Vidéo…….

Comme si c’était hier, d’Esther Hoffenberg et Myriam Abramowicz. Ce qui frappe aujourd’hui, plus de quarante ans après sa réalisation, c’est à quel point ce film témoigne de son temps presque autant qu’il éclaire la période dont il traite.
Durant l’occupation nazie en Belgique, la Résistance sauva quelque quatre mille enfants juifs. Réalisé en 1980 et doté d’une saisissante esthétique cinématographique, le documentaire d’Esther Hoffenberg et Myriam Abramowicz entrelace les témoignages de ceux qui les ont cachés ou aidés et les souvenirs des jeunes persécutés qui ont survécu.
L’histoire a une histoire. Elle s’inscrit dans le temps, est soumise à ses modes, ses progrès, ses reculs, ses omissions et ses redécouvertes.
Quand Esther Hoffenberg et Myriam Abramowicz décident, en 1978, de consacrer un documentaire au sauvetage de milliers d’enfants juifs en Belgique occupée, on sait encore très peu de choses de l’action de celles et ceux qui se sont opposés avec autant de discrétion que de courage à la déportation de ces petits persécutés.
« Le sujet est alors inconnu et le restera pendant plus d’une décennie », explique l’historienne Annette Wieviorka dans le livret accompagnant Comme si c’était hier, qui vient de sortir chez Doriane Films en version restaurée.
Un succès de la RTBF
À la fin des années 1970, Esther Hoffenberg n’a pas encore 30 ans. La future autrice de Discorama, signé Glaser (2007), Violette Leduc, la chasse à l’amour (2013) ou Bernadette Lafont, et Dieu créa la femme libre (2016) ignore à peu près tout de la production et de la réalisation documentaires.
Ayant soutiré quelque argent à son père, jadis sauvé à Varsovie par la Résistance polonaise, elle se lance sans expérience ni bagage technique dans la réalisation de ce film avec Myriam Abramowicz, dont les parents ont été cachés pour leur part en Belgique.
Cette dernière projette d’écrire sur le sujet un livre qui ne verra jamais le jour. Leur rencontre avec le père Pierre Capart, reconnu Juste parmi les nations pour avoir protégé cinquante-huit enfants juifs dans le réseau de la Jeunesse ouvrière chrétienne, aiguise leur intérêt pour ce projet qui les occupera pendant deux ans et leur vaudra un succès immédiat.
Annette Wieviorka explique avec justesse le bon accueil du film par « ses qualités esthétiques, humaines et le soin porté à contextualiser le récit ». Sa diffusion à la télévision belge, en 1980, fera d’ailleurs sauter le standard de la RTBF, tant seront nombreux les anciens enfants cachés et leurs anciennes familles d’accueil à vouloir exprimer leur désir de se retrouver.
Un précieux travail historique et cinématographique
Ce qui frappe aujourd’hui, plus de quarante ans après sa réalisation, c’est à quel point ce film témoigne de son temps presque autant qu’il éclaire la période dont il traite.
Dès le pré-générique, qui donne à entendre Marcelle Lacroix parler d’une camarade de classe retirée de l’école pour être « mise à l’abri », nous apparaît une autre façon de parler, de se tenir, de se remémorer des faits, mais aussi une manière différente de capter cette parole avec des moyens qui sont ceux de l’époque.
Le métrage limité de pellicule financé par Sam Hoffenberg induit une forme de concentration chez les témoins, qui organisent leur discours avec une précision et une correction syntaxique devenues rares.
Le caractère précieux du film 16 mm se sent aussi dans l’attention portée aux cadrages, d’une grande élégance ; le besoin de lumière supérieur à ce qu’exige le numérique expliquant par ailleurs l’abondance des prises de vue en extérieur. L’esthétique cinématographique de Comme si c’était hier est ainsi partie prenante de l’éclairage historique proposé par le film.
À la fraîcheur de la mémoire de femmes et d’hommes encore vaillants, parlant de faits remontant à moins d’une quarantaine d’années, s’ajoute une étonnante capacité à rendre vivant ce qu’ils relatent.
Il faut entendre Maurice Heiber, qui dirigea la section Enfance du Comité de défense des Juifs, évoquer comment il fut amené à aller rencontrer des « logeurs » décidés à se défaire d’un enfant de 5 ou 6 ans au prétexte qu’il avait volé le Jésus de la crèche de leur fille, et refusait d’avouer sa faute.
« J’ai pris le gosse à part dans la cuisine, se souvient Maurice Heiber. J’ai commencé à lui parler comme à un adulte : “Tu sais que c’est la guerre, que les nazis veulent nous tuer.
Les gens chez qui tu es sont gentils avec toi. Pourquoi as-tu volé ? — Monsieur, j’ai pas volé. — Si, tu as volé. — Non ! — Écoute, tu ferais mieux de tout me dire ; il ne t’arrivera rien. — Je n’ai pas volé : je l’ai pris pour le cacher. Je savais que Jésus était juif et qu’il était exposé au danger d’une rafle.” »
« L’art de raconter est en train de se perdre », écrit Walter Benjamin (1892-1940) au début de son texte fameux intitulé Le Narrateur (1936). En sauvegardant sur pellicule – et aujourd’hui sur DVD – des manifestations de cet art, appliqué à des faits qui se doivent d’être racontés, Comme si c’était hier accomplit un travail historique et cinématographique des plus précieux.
À la bonté des actes qui y sont relatés s’ajoutent la beauté des paroles et celle des visages, l’émotion des retrouvailles… et l’art d’une documentariste qui trouvait là une toute première occasion de s’exprimer.
Comme si c’était hier, de Myriam Abramowicz et Esther Hoffenberg, Doriane films, 18 €.
En complément : Récits de Sam (2009), court métrage d’Esther Hoffenberg autour de propos de son père, Sam Hoffenberg (1912-1989).

Source Telerama

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